Les Français, le changement et le Parti communiste français (sondage Viavoice de 2008 pour L’Humanité)

samedi 30 janvier 2010.
 

Nous sommes en 2010. Nous nous permettons donc de mettre en ligne ce sondage de 2008 très intéressant.

Que recouvrent aujourd’hui le communisme et le Parti communiste aux yeux de l’opinion française ? Après une lente et longue période de déclin, le PCF connaît désormais des signes encourageants. Electoralement, les scrutins municipaux de mars dernier sont apparus comme la consécration de reconquêtes (Dieppe, Vierzon)

Idéologiquement, l’anticapitalisme séduit désormais une fraction importante des électeurs de gauche, à un moment où le Parti socialiste apparaît assumer un positionnement plus libéral que naguère.

Dans ce contexte, Viavoice a mené une enquête d’opinion quantitative approfondie, afin de dresser l’état des lieux des perceptions et des attentes à l’égard du communisme et du Parti communiste français, dans la société actuelle. Les données recueillies conduisent à trois enseignements majeurs : il existe aujourd’hui dans la société française un puissant désir de changement ; mais l’image du communisme et du PCF demeurent ternies par les contraintes de la mémoire ; enfin les Français adressent au PCF des attentes de renouveau.

Un puissant désir de changement

Sur plusieurs registres, les Français expriment un puissant désir de changement :

- Les Français ne sont « pas satisfaits » par « la société dans laquelle nous vivons actuellement » (71 %), et cette insatisfaction s’élève à 78 % auprès des électeurs de gauche ;

- L’idée d’un changement s’impose donc, lequel devrait être « rapide » pour 60 % des Français, et « très rapide » pour 20 % d’entre eux ;

- Ce changement doit s’accomplir en priorité « en France » (42 %), puis « dans le monde » (36 %) ;

- Concrètement, les « domaines » dans lesquels « les pouvoirs publics » devraient « agir en priorité, en France » sont « l’augmentation du pouvoir d’achat » (47 %), la « réduction des inégalités sociales » (35 %) et la « création d’emplois » (34 %).

L’idée de ce changement est certes limitée par les possibilités effectives de transformation, perçues par les Français : seulement 43 % des personnes interrogées estiment qu’il est possible de réaliser des changements importants en « France » aujourd’hui, 37 % « dans le monde », 36 % « en Europe » et 21 % « dans la commune » dans laquelle ils vivent.

Les contraintes de la mémoire

Interrogés sur les « mots » qui correspondent « à l’idée » qu’ils se font « du communisme aujourd’hui », les Français citent en priorité la « solidarité » (60 % estiment que ce mot « correspond bien à l’idée » qu’ils se font du communisme), l’« anticapitalisme » (58 %), la « lutte contre l’exploitation » (55 %) et la « lutte contre les discriminations » (54 %).

Mais plus largement, le communisme et le Parti communiste souffrent des contraintes de la mémoire collective de l’opinion française, par oubli ou au contraire par excès de souvenirs :

- Le communisme est victime de n’être plus majoritairement associé à des valeurs qui lui sont historiquement propres : nationalisation (43 %), progrès social (39 %), paix dans le monde (35 %), Etat (30 %) ;

- Le communisme et le Parti communiste sont victimes d’être encore trop associés à la mémoire de l’Union soviétique : à propos du communisme, une retraitée sans proximité partisane déclarée cite « le Goulag » et « la perte de liberté », avant d’observer : « c’est un régime qui a été atroce » ; à propos du Parti communiste français, une majorité relative des personnes interrogées (47 % contre 40 %) estiment que le parti « n’a pas suffisamment pris ses distances avec ce qui s’est fait en Union soviétique ».

Cette mémoire collective a pour double conséquence de reléguer le communisme à un héritage historique, pas nécessairement d’actualité (« ce n’est plus à la mode », soutient une jeune femme proche des Verts), et d’entretenir des interrogations sur l’application de l’idéal communiste, une fois la conquête du pouvoir réalisée.

Des attentes de renouveau

Pour l’avenir, les Français attendent du Parti communiste une transformation significative. Concrètement, 30 % des personnes interrogées estiment que « les idées communistes, dans le monde actuel », devraient être « profondément adaptées », et 25 % qu’elles devraient être « en partie adaptées » ; seul un gros tiers des Français (36 %) considère que les idées communistes « n’ont plus aucune pertinence ».

En pratique, les attentes dominantes sont celles d’une ouverture du Parti communiste français, sur des registres différents :

- Ouverture politique : 83 % des Français pensent que le PCF « doit davantage s’ouvrir aux idées écologistes », et 76 % qu’il « doit être plus positif à l’égard de la construction européenne » ; en termes d’alliances, les Français préféreraient que le PCF « privilégie des alliances » avec « le Parti socialiste » (36 %), puis avec la LCR et le NPA (21 %) ;

- Ouverture sociologique : 59 % des Français affirment que le PCF « s’intéresse trop aux ouvriers et aux employés et pas assez aux autres catégories de la population ».

François Miquet-Marty, Directeur de la société Viavoice

André Gattolin, Sociologue


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