La conversion à l’« écologie politique » de M. Mélenchon divise dans le camp Joly

mercredi 11 avril 2012.
 

Ils ne l’ont pas vu venir sur leur terrain et ils ne s’en remettent pas. Non, les écologistes ne savent que faire face à Jean-Luc Mélenchon, dont les discours sur la régulation du capitalisme, mais aussi sur l’écologie, semblent intéresser un nombre croissant d’électeurs. Conscient de son succès, l’intéressé a longuement expliqué sa « conversion » : « L’écologie politique a été un choc intellectuel », a confié M. Mélenchon, sur Reporterre, le site de Hervé Kempf du Monde.

Le candidat du Front de gauche a certes reconnu lors de cet entretien sa dette intellectuelle envers les écologistes, mais ses déclarations ont provoqué de nouveaux débats dans le parti de Mme Joly. Un courrier du député européen Jean-Paul Besset, adressé aux membres du conseil fédéral le 4 avril, a suscité de nombreuses réactions dévoilant les questions qui agitent certains cadres du mouvement.

« Avant de se livrer frénétiquement à la chasse aux hérétiques, il faut prendre connaissance de la réflexion personnelle de Mélenchon », écrit M. Besset, un proche de Nicolas Hulot. Il pointe dans les rangs écologistes une stratégie de diabolisation « sous prétexte de concurrence électorale » et conclut sa missive en expliquant que l’évolution de M. Mélenchon « vaut mieux que quelques minables coups de griffe ».

MAILLON FAIBLE DE LA GAUCHE

Les attaques des écologistes contre le Front de gauche se sont intensifiées ces dernières semaines, menées par Cécile Duflot, secrétaire nationale d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Jean-Vincent Placé, président du groupe parlementaire au Sénat, mais aussi le député européen Yannick Jadot, ancien porte-parole de la candidate qui, après avoir démissionné de ses fonctions en novembre 2011, fait un retour en force dans la campagne de Mme Joly.

La montée en puissance du Front de gauche et l’affaiblissement continu de Mme Joly, créditée désormais de 2 % des intentions de vote dans la plupart des sondages, font pour l’heure des écologistes le maillon faible de la gauche. La situation fragilise le partenariat mis en place avec le PS en novembre 2011, et incite EELV à passer à l’offensive. A Bordeaux, où Mme Joly était en meeting le 28 mars, Noël Mamère et Yannick Jadot s’étaient livrés à une attaque en règle contre M. Mélenchon, parlant d’« escroquerie écologique ».

Cette stratégie d’affrontement ne fait pas l’unanimité. Présente le 4 avril au meeting d’Eva Joly à Saint-Herblain près de Nantes, Dominique Voynet, membre de l’équipe de campagne de la candidate écologiste, a tenu des propos plus nuancés : Jean-Luc Mélenchon « a fait amende honorable, il a découvert l’écologie à titre personnel. C’est une grande avancée, mais je ne compte pas sur d’autres que nous ».

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la direction d’EELV éprouve de réelles difficultés à traiter le « cas Mélenchon ». Réuni le 16 mars pour aborder une nouvelle fois les incertitudes de la campagne de Mme Joly, l’état-major du parti avait alors décidé de ne pas attaquer M. Mélenchon... avant de se raviser quelques jours plus tard.

Dans ces circonstances, le courrier de Jean-Paul Besset au conseil fédéral du mouvement ne pouvait que susciter de vives polémiques. Si la direction a fait bloc derrière Yannick Jadot - qui a répondu : « Je vous invite à écouter les discours de Jean-Luc Mélenchon quand ils ne sont pas formatés pour les écolos. S’opposer à ce point à l’Europe et à la décentralisation est contraire à mes idées » -, certains membres du conseil fédéral ont pris leurs distances.

Pierre Minnaert s’est dit « exaspéré par les attaques ridicules prenant Mélenchon pour cible », tandis que Michel Bock, président de la CPE (commission politique électorale) du parti, s’est dit « complètement d’accord » avec Jean-Paul Besset avant d’estimer que « l’important, c’est de savoir où on peut aller ensemble et pas d’où on vient ».

LE RALLIEMENT DE M. HULOT EN QUESTION

La lettre de M. Besset rend d’autant plus nerveux l’état-major d’EELV qu’elle est interprétée comme un signe d’un possible ralliement de M. Hulot au Front de gauche. Si le candidat malheureux à la primaire écologiste ne cache pas en privé l’intérêt qu’il porte à la candidature de M. Mélenchon, un ralliement en bonne et due forme apparaît peu probable.

M Hulot est en effet tenu par les statuts de sa fondation à une stricte neutralité politique. Dominique Voynet l’a néanmoins appelé, mercredi soir, lors du meeting de Saint-Herblain, à apporter son soutien à Mme Joly : « Prends ta part comme nous la prenons ! » « Hulot appelant a voter Mélenchon, il ne manquerait plus que ça », soufflait un membre de l’équipe de campagne.

Anne-Sophie Mercier, Saint-Herblain (Loire-Atlantique)


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