Espéranto II : langue d’avenir. L’espéranto survit et survivra aux persécutions et crimes de guerre dont ont été victimes ses locuteurs et ses défenseurs

vendredi 5 avril 2024.
 

L’espéranto est une langue vivante qui n’est ni morte, ni agonisante mais qui reprend son expansion. Elle reste une langue auxiliaire internationale d’avenir malgré toutes les tentatives de marginalisation tant par les médias que par les gouvernements de l’Europe occidentale.

Article de référence : Espéranto La raison commande de l’adopter comme langue auxiliaire européenne et planétaire

http://www.gauchemip.org/spip.php?a...

C’est avec une certaine surprise que j’ai constaté que mon texte sur l’espéranto est celui qui a suscité le plus grand nombre de réactions parmi les nombreux articles que j’ai rédigés sur ce site.

Je remercie les commentateurs de leur intérêt et notamment Christian Lavarenne concernant ses corrections et précisions sur le sanskrit, de Guy Martin par son témoignage concernant Attac qui ne me surprend pas, de Onagrino notamment pour ses remarques sur l’avenir de l’espéranto. Seul un commentaire (non argumenté) se déclare hostile à l’espéranto

Mon texte est effectivement un peu long et demande une certaine motivation pour être lu en entier. Il n’a pas pourtant l’ambition d’être exhaustif. Je rédigerai ultérieurement pour ce site un article beaucoup plus court et plus concret pour l’espéranto.

J’avais conçu ce texte il y a plusieurs années et avais reconsulté Internet trois ans après sa première mouture. J’avais déjà constaté la multiplication considérable du nombre de sites consacrés à l’espéranto et le processus continue, puisque j’en découvre encore de nouveaux. Il est donc certain qu’Internet constitue un nouveau vecteur de développement pour cette langue.

Attention le passage qui suit est susceptible de heurter la sensibilité de certains lecteurs (trices).

Si l’on tape "espéranto" dans le moteur de recherche Google, apparaît 139 millions d’occurrences, si l’on tape "langue française" : 15,6 millions ; si l’on cherche "langue anglaise" : on trouve 2,63 millions d’occurrences. Amusant, non ?

Vous allez dire : je triche. Sous les conseils d’un médiamétriiste, j’entrepris d’autres essais. Alors tapez le mot "cul". Vous trouvez : 139 millions d’occurrences soit exactement le même nombre que le mot "espéranto" ! Incroyable, mais vrai ! Le mot espéranto apparaît autant de fois que le mot "cul" ! Quel mot pourrait être capable de dépasser ce score : le mot :"bite", probablement. Et en effet, on trouve 192 millions d’occurrences. Score, en revanche, ici sans trop de surprise. Mais remarquez tout de même, que la supériorité de "bite" n’est tout de même pas écrasante sur "espéranto".

À la réflexion, un mot un peu plus noble serait tout de même souhaitable pour dépasser le niveau de la ceinture. J’ai alors essayé le mot "amour". Ouf ! Score de 253 millions d’occurrences, soit à peine le double du score espéranto.

Evidemment il faut relativiser ces résultats car un mot comme "ornithorynque" réalise tout de même 98 500 concurrences alors que ce petit animal n’est pas au centre des conversations de bars, l’enjeu de batailles idéologiques ou prétexte de diversion médiatique. Néanmoins, il est vrai que cet animal a une particularité suffisamment exceptionnelle pour susciter la curiosité des internautes.

Finalement, il semble apparaître que l’espéranto est tout de même une préoccupation non marginale de nombreux internautes. .(Test statistiques effectué dans la soirée du 11 mars 2013)

Claude Piron avait rédigé un texte contre les préjugés les plus courants et basiques concernant l’espéranto, texte intitulé : Espéranto : l’image et la réalité.

http://claudepiron.free.fr/articles...

Il s’attaque point par point aux images fausses, aux préjugés, aux accusations gratuites faites à l’encontre de l’espéranto et des espérantophones. On constatera que ces préjugés n’ont guère évolué depuis l’entre-deux-guerres. Heureusement, il existe des gens critiques ou perplexes dont l’argumentaire peut être intéressant. De toute façon, la critique permet de progresser

Il est vrai qu’il faut avoir une certaine dose d’utopie pour avoir la prétention de s’attaquer à la suprématie de la langue anglaise au niveau international ou de promouvoir une cause qui semble perdue. Il faut aussi avoir une certaine dose d’utopie pour avoir la prétention de s’attaquer à la finance internationale comme le fait par exemple le Front de gauche en France. Mais ces utopies sont des "utopies raisonnables" dans la mesure où elles s’appuient sur la raison, une analyse rationnelle et sur la défense de l’intérêt général non seulement de notre nation mais de l’humanité.

Lorsque je concevrai une nouvelle version de mon texte, je tiendrai évidemment compte des remarques constructives qui m’ont été faites et de nouveautés existant sur le Web.

Je ne reviendrai pas ici sur les multiples arguments justifiant l’utilisation de l’espéranto comme langue auxiliaire internationale mais rappellerai quelques ponts

- D’abord répétons-le pour la nème fois, les espérantistes n’ont jamais considéré que l’espéranto devait se substituer aux langues naturelles. D’ailleurs nombre d’entre eux pratiquent plusieurs langues. Le fondateur de l’espéranto pratiquait cinq langues. L’un des meilleurs spécialistes français de l’espéranto, Claude Piron, décédé en 2008 à l’âge de 77 ans, était interprète à l’ONU puis à l’OMS. Il était traducteur de chinois, d’anglais, de russe et d’espagnol. Il a aussi rédigé de longs textes en anglais pour promouvoir l’espéranto. J’ai personnellement rencontré en Bretagne, des espérantophones qui parlent couramment breton.

- L’espéranto, aux antipodes de quelconque totalitarisme, a été, à l’inverse, l’objet de vives répressions qui ont gravement freiné son développement.

"Pour Hitler, l’espéranto est une langue représentant la conspiration juive 2 et la franc-maçonnerie ; pour Staline, il est lié au cosmopolitisme bourgeois. Dans les années 1940, ces deux hommes exercent le pouvoir sur la quasi-totalité de l’Europe continentale. L’espéranto est interdit, ses stocks de livres sont liquidés, bon nombre de ses partisans sont enfermés dans les camps de concentration." (wikipédia : histoire de l’espéranto)

- Les extrémistes de droite voient dans les espérantistes des agents du cosmopolitisme ou du mondialisme, des vecteurs des idées universalistes (déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen) qu’ils combattent, de dangereux "mélangeurs" ou "uniformiseurs" de cultures sachant que pour cette extrême droite, la détestation du mélange des races et du métissage a été remplacé par la détestation du métissage interculturel. (On peut se reporter sur cette question aux sociologues et historiens de l’extrême droite). En outre, n’oublions pas que pour la composante antisémite de cette mouvance, il n’est pas indifférent que Ludwik Lejzer Zamenhof fondateur de l’espéranto, était juif.

- "La Seconde Guerre mondiale a des effets nettement plus importants que la première sur la collectivité espérantophone et la laisse exsangue. La durée du coup de frein qui a interrompu son élan peut être globalement estimée à l’équivalent d’une génération. Le relèvement est d’autant plus difficile que la guerre froide entrave les échanges, et l’anglais s’impose peu à peu comme langue internationale

. Le congrès international de l’Éducation Nouvelle, qui se tient à Paris en 1946, formule un projet pour l’enseignement de l’espéranto et la formation de maîtres à son enseignement. Sa valeur dans les échanges culturels internationaux fait l’objet de recommandations lors des conférences générales de l’UNESCO, en 1954 puis en 1985, et de l’Organisation mondiale du tourisme à Manille (Philippines) en 1980."

(Wikipédia : histoire de l’espéranto http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoi...’esp%C3%A9ranto )

Il est donc un peu facile de dire : l’espéranto ne s’est pas beaucoup développé du fait que c’est une langue artificielle, qu’ elle n’est pas enracinée dans une culture nationale, etc., en ignorant que la plupart de ses protagonistes ont été envoyés dans des camps de concentration et alors qu’entre les deux guerres cette langue était en expansion et avait été soutenue autant par des catégories professionnelles artisanales et ouvrières que par des scientifiques de haut niveau, dont beaucoup de prix Nobel. C’est non seulement faire l’économie de nombreuses souffrances humaines mais aussi ignorer le contexte politique de la guerre froide ou un espérantiste pouvait être considéré comme antiaméricain du fait qu’il promouvait une langue autre que celle de l’empire. Bref, un ennemi intérieur potentiel

En fait, dans une perspective historique, les obstacles fondamentaux au développement de l’espéranto ont été ou sont :

1) Les dictatures totalitaires

2) Les forces politiques au service du colonialisme ou néocolonialisme. Ainsi la France avait refusé la proposition de la SDN d’adopter l’espéranto comme langue internationale du fait que ses colonies étaient francophones.

3) Les forces politiques au service de l’ultralibéralisme ou tout au moins asservies au modèle libéral capitaliste sous ses différentes déclinaisons nationales. Pourquoi ?

Que des élites de décideurs économiques ou politiques et d’intellectuels puissent communiquer entre eux au niveau international est une chose, que les petites gens des différents pays puissent communiquer entre eux en est une autre.

L’intérêt de l’espéranto est justement que, par sa relative simplicité (tout en rendant possible les nuances de la pensée), sa maîtrise est réalisable en un temps relativement court et permet ainsi à une population qui n’a pas été longuement scolarisée de pouvoir communiquer avec le monde entier. Ainsi l’usage de l’espéranto permettrait aux différentes organisations syndicales et associations du monde entier de communiquer entre elles aisément et d’organiser des mouvements sociaux d’ampleur mondiale face à un capitalisme financier mondialisé.

Voilà ce que craignent les puissances économiques et financières et leurs agents politiques conscients de ce danger.

4) L’imposition de l’anglo-américain comme langue hégémonique internationale qui est une conséquence du point précédent. La langue dominante étant alors la langue de l’empire économique dominant. Cette imposition a comme conséquence une régression de l’influence des différentes langues nationales (excepté l’anglais évidemment) dont le français et même locales.

En France, le refus obstiné des gouvernements libéraux ou sociaux libéraux de permettre l’enseignement de l’espéranto dans le cadre scolaire et universitaire comme langue auxiliaire alors que ces mêmes gouvernements font la promotion de l’anglais comme langue à apprendre dès l’école primaire, de facto confortent l’hégémonie de l’anglo-américain et affaiblissent notre langue nationale. Plurilinguisme nous dira-t-on ? Alors intégrons aussi l’espéranto ! Pourquoi cette exclusion, sinon pour les raisons exposées ci-dessus ? Le non ancrage de l’espéranto dans une culture nationale séculaire n’est en fait qu’un alibi pour dissimuler les raisons précédemment décrites .

Cette hégémonie économique du monde anglo- américain ne peut exister sans une hégémonie culturelle qui légitime cette domination économique en véhiculant ses codes. Cinéma, séries télévisées, musique anglo-saxonne, jeux vidéo sont des vecteurs importants de cette influence culturelle qui passe par …l’usage de la langue anglaise ou de sa variante nord-américaine.

Je ne parle évidemment pas de la sphère financière, commerciale et informatique ou l’anglais règne en maître.

Avec un tel matraquage et ce quasi totalitarisme linguistique, on peut être étonné que notre jeunesse ne parle pas couramment anglais même après sept ans d’étude de l’anglais au collège, au lycée ! Et on voudrait nous faire croire que cette langue est ultra simple à apprendre et à comprendre !

Le plan Marshall a joué un rôle essentiel dans l’influence de la culture américaine dans nos pays européens et notamment dans les médias. La guerre froide a renforcé cette influence.

On peut se reporter au documents du CNDP Télédoc : "Comment nous sommes devenus tous américains" (CNDP : centre national de documentation pédagogique) http://www2.cndp.fr/TICE/teledoc/Mi...

On peut se reporter aussi au webzine Info guerre : L’hégémonie du cinéma américain en Europe et le rôle des accords Blum-Byrnes http://www.infoguerre.fr/culture-et...

Modern Economic Warfare 1 : le jeu vidéo, vecteur d’influence http://www.infoguerre.fr/culture-et...

Mais disant cela, il serait totalement illusoire d’en déduire que l’espéranto est en soi un instrument politique pour changer le monde et établir la paix.

L’espéranto reste un instrument linguistique privilégié pour avoir une ouverture sur toutes les cultures du monde. L’acquisition d’une conscience politique critique ne relève pas de l’usage d’une langue particulière mais d’une formation en économie politique ad hoc.

Il serait contre-productif d’assujettir la promotion de l’espéranto à de simples finalités politiques. Cela ne relève pas du même champ de formation. N’oublions pas que des députés de droite ont proposé à l’Assemblée nationale de notre pays que l’espéranto soit étudié dans le cadre scolaire. Et c’est bien ainsi.

- Avoir une ouverture sur toutes les cultures du monde ne signifie pas les amalgamer en masse informe mais de connaître et de respecter leurs spécificités : c’est une évidence pour les espérantos phones !

- En s’enracinant dans différents pays du monde, le terroir linguistique de l’espéranto n’est pas une vallée, une région, un pays mais notre petite planète Terre. Cette diversité des enracinements permet à l’espéranto de s’enrichir de vocabulaires apportés par les espéranto phones de chaque pays. Pour illustrer ce fait sur un exemple, prenons le cas de l’influence des langues slaves. Dans la conclusion de l’étude intitulée : "L’influence des langues slaves sur le système sémantique de l’espéranto", de la Revue des études slaves (Tome 51, fascicule 1-2, 1978. Communications de la délégation française au VIIIe Congrès international des slavistes Zagreb ; 3-9 septembre 1978), on peut lire :

"Les emprunts lexicaux faits par l’espéranto aux langues slaves sont très restreints. Mais le rôle joué par celles-ci dépasse ces emprunts — ou ces « apports » — et justifie la notion d’influence. Cette influence se manifeste par la coïncidence entre le contenu sémantique de certains vocables d’origine non slave avec le contenu de vocables russes ou polonais. Mais il faut noter que toute adéquation trop nette a été ressentie comme « slavisme » et souvent éliminée. Ce processus montre comment l’espéranto a conquis son autonomie par rapport aux langues dont il est issu. C’est ainsi que facila s’est affranchi de toute correspondance rigoureuse d’une part avec les langues romanes."

De nouvelles générations d’espérantistes et espérantophones ont pris le relais des générations précédentes décimées par la guerre et la répression. Ils disposent dorénavant d’un outil puissant : Internet

L’espéranto n’est pas morte, l’espéranto n’est pas une cause perdue, l’espéranto est une langue d’avenir et même plus : une longue d’espérance, en l’espérant tôt !

Hervé Debonrivage


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