La France flouée en Europe

jeudi 17 juillet 2014.
 

Le souvenir de la grande tuerie qui nous fait le devoir de paix sur le vieux continent ne compte pour rien aux yeux des faiseurs de phrases néolibéraux qui gouvernent partout. Pas davantage la célébration de l’évènement révolutionnaire qui a « ouvert l’ère moderne » selon Goethe. Mais dans ce cas, il y plus. La détestation de tout ce qui est français par le monde politique européen voué aux valeurs anglo-saxonnes est une réalité palpable de l’univers européiste. Je le ressens parce que je ne le supporte pas. Il s’enracine dans tout ce qui a résulté de l’avènement républicain et des principes politiques que celui-ci a introduit dans l’Histoire politique réelle. Ce mépris a son écho dans la conscience des Français eux-mêmes. Le mépris de soi et le déclinisme morbide des « élites » françaises et de leurs miroirs médiatiques fait le travail. A la faveur de cette mise à l’écart, les Allemands profitent de la stupidité euro bêlante des dirigeants français pour pousser leurs pions de tous côtés. La France, rappelons-le, est « contributrice nette » pour six milliards d’euros au budget de l’Europe. Cela veut dire que nous recevons de l’Europe six milliards de moins que nous lui donnons pour subir sa dictamolle. Pour autant, la France sous François Hollande est plus absente que jamais des postes clefs des institutions européennes. Soyons juste : l’abaissement a commencé avant l’actuel euro-ravi qui nous préside.

Avec le traité de Nice, Jacques Chirac avait déjà accepté d’entrer dans l’inacceptable. Depuis lors, en effet, la France sera moins représentée que l’Allemagne au Parlement européen. Or, il n’est d’Europe viable que sur la base d’une stricte égalité entre Français et Allemands, comme l’avaient déclaré conjointement De Gaulle et Adenauer. Et cela fut respecté quand il y avait deux Allemagnes sans que les Français, alors bien plus puissants, y dérogent jamais. Mais sitôt la réunification allemande faite, sans barguigner, la volonté de puissance fut de retour. L’argument était que le nouveau nombre des Allemands leur créerait des droits supplémentaires à être représentés plus nombreux au Parlement européen. Et les dirigeants français, gorgés d’illusions et de souvenirs dépassés, sans tenir compte des permanences de l’Histoire ni des changements de mentalités, cédèrent sans réfléchir plus avant. Munificents, ils allèrent même bien au-delà du raisonnable. En effet, l’écart entre le nombre de députés français et allemands au Parlement européen est supérieur à l’écart de population entre nos deux pays. Bien sûr, l’écart est en faveur de l’Allemagne. Le nombre de députés attribué à chaque pays est censé prendre en compte son poids démographique mais, avec ses 96 députés, l’Allemagne a 30% de députés de plus que nous pour une population seulement 25% plus nombreuse, provisoirement.

L’abaissement se traduit également dans les présidences de commissions parlementaires. La France, pays fondateur de l’Europe, avec ses 65 millions d’habitants, est singulièrement absente. Ainsi, les prestigieuses commissions Affaires étrangères, Emploi et Affaire sociales, Commerce international, Transport ou encore Contrôle budgétaire sont présidées par des Allemands. De même, les Polonais ou les Italiens dirigent quatre commissions quand seulement deux sont présidées par des Français. Du côté de la Commission européenne, ce n’est pas mieux. Les Français pressentis pour être commissaires, que ce soit Elisabeth Guigou, l’actuelle présidente de la Commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale ou encore de Pierre Moscovici, ne sont attendus à aucun poste clef. En revanche, la Grande-Bretagne, après avoir pourtant menacé d’organiser un référendum sur la sortie de l’UE, a obtenu un poste de Secrétaire général à la Commission européenne. Poste certes peu connu. Il est néanmoins tout à fait stratégique. Car c’est là que se fait la veille de l’application des traités et législations européennes. Et le titulaire participe aux nominations de hauts fonctionnaires au sein de la Commission. Après quoi c’est encore un Allemand, Martin Selmayr, ancien directeur de campagne de Jean-Claude Juncker et ancien chef de cabinet de Viviane Reding, qui obtient la tête du cabinet d’intérim du futur président de la Commission européenne.

Hollande ne dit rien, ne fait rien. Tout le fait rire sans doute, comme d’habitude. Et il fait rire tout le monde en Europe. Car la France de Hollande a capitulé d’entrée de jeu sous le nouveau quinquennat. Hollande l’avait annoncé en léchant les mains de la Commission qui frappaient notre pays : « la France est le bon élève de la classe Europe ». C’est fait : elle est la colonie la plus méprisée de la Commission européenne.


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