« Je demande aux pays du monde de protéger nos enfants »

vendredi 25 juillet 2014.
 

Reportage à Jabaliya où des milliers de personnes tentent d’échapper au massacre alors que les bruits sourds des chars israéliens résonnent sans discontinuer.

Cette nuit, l’armée israélienne s’est encore déchaînée. Les fusées éclairantes embrasaient le ciel alors que les bruits sourds des tirs de chars résonnaient sans discontinuer. Comme un boucher qui aplatit la viande pour mieux l’attendrir. Déjà 620 Palestiniens tués. 80% sont des civils.

Sofiane Juda arrive de al-Attatra, la dernière localité palestinienne au nord de la bande de Gaza, particulièrement exposé. Il raconte : « Hier, vers cinq heures du matin, les chars israéliens sont entrés à al-Attatra. Ils ont tiré sur les maisons, sur les gens et même sur les vaches. Ils ont lancé des gaz qui nous empêchaient de respirer. Il a fallu qu’on parte précipitamment, sans rien pouvoir emporter. Mon oncle a été tué et on n’a pas pu emmener son corps. Il git là-bas, sans sépulture. » Sandrella Saleh vient de Beit Hanoun. Elle parle aussi de ces gaz suffocants. Très certainement des gaz lacrymogène particulièrement puissants comme ceux utilisés par les Britanniques en Irlande lancés par un MK-19, évidemment de fabrication américaine. « Une grenade est entrée dans notre maison, déplore la jeune femme en faisant la queue pour s’inscrire auprès de l’UNRWA. « Mes enfants sont particulièrement affectés, ils sont très nerveux et développent des tics depuis cette nuit, se plaint-elle. Moi-même, je suis enceinte de quatre mois, je ne sais pas ce qui va se passer. » Son mari est resté à Beit Hanoun. « Il dit qu’il préfère mourir sur place ».

Hannan el Assari, arrive elle de Soudaniya, un quartier tout proche de Gaza qui s’étend jusqu’à la mer. « Hier, des bateaux et des hélicoptères ont tiré sur nous, des balles ont traversé la maison », se souvient-elle encore tremblante, ses enfants regroupés autour d’elle. « Pas très loin, la résistance a commencé à répliquer en tirant sur les Israéliens qui tentaient d’avancer en lançant des fusées éclairantes. Les combats se sont arrêtés vers 2h30. On avait tellement peur. Ma fille de 14 ans s’est fait pipi dessus. Deux autres de mes filles sont maintenant à l’hôpital tant elles étaient choquées. » Elle demande au journaliste de transmettre son appel. « Je demande aux pays du monde de protéger nos enfants. Quand je regarde mes filles, je me demande qui va mourir la première. Nous ne sommes que des civils. »

Alors que le martèlement des obus israéliens est couvert par intermittence par le départ des rockets palestiniennes qui laissent une traînée blanche dans le ciel, la voix du muezzin s’élève de la mosquée toute proche. Il prévient la population qu’il y a des morts, qu’ils vont être enterrés. Dans le cimetière limitrophe, Ramadan et Ahmed, les fossoyeurs, creusent des trous au milieu des tombes.

Pierre Barbancey, L’Humanité


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