Maroc : succès historique de la grève générale nationale du 29 octobre 2014

lundi 29 décembre 2014.
 

Quatre grandes centrales syndicales Marocaines : l’UMT, CDT, UGTM et FDT appellent à une grève générale interprofessionnelle de 24 h dans les secteurs privés et publics. La date de la grève est fixée au 29/10/2014.

Les syndicats demandent notamment l’application des accords signés avec l’actuel gouvernement le 26 avril 2011, dans le sillon des révolutions arabes et du Mouvement du 20 février au Maroc. « Le gouvernement doit ouvrir des négociations collectives tri-partites ; associer les centrales syndicales aux réformes sociales », demande Abderrahmane Hachemi, membre de la FDT.

La retraite à 65 ans ?

Les tensions entre le gouvernement et les syndicats se sont cristallisées, en cette rentrée, sur la réforme du régime de la Caisse Marocaine des Retraites (CMR) qui gère les pensions des militaires et des fonctionnaires. Début août 2014, le gouvernement a soumis son projet de loi à l’avis du Conseil économique social et environnemental. Il souhaite faire passer l’âge de départ en retraite de 62 à 65 ans, le taux de cotisation sur le revenu de 10 à 15%. Il veut également réduire les retraites en modifiant leur mode de calcul. « Nous comprenons qu’il y ait des problèmes, mais le gouvernement doit adopter un point de vue global de la question. Il faut prendre en compte les équilibres financiers mais aussi le pouvoir d’achat et les conditions de vie des fonctionnaires », soutient Abderrahmane Hachemi.

Parmi les secteurs qui seront bien touchés par la grève, signalons l’université (puisque les cours sont annulés suite à la grève des enseignants et que l’Union des Etudiants Marocains appelle au mouvement), Casatramway, Poste, Transports routiers, Banques, Taxis..., perturbations dans le transport aérien...

C) Maroc : déclaration suite au succès historique de la grève générale nationale du 29 octobre

UNION MAROCAINE DU TRAVAIL – TENDANCE DEMOCRATIQUE

Secrétariat National

Déclaration

Suite au succès historique de la grève générale nationale unitaire et préventive du 29 octobre 2014, les travailleurSEs marocains :

Exigent l’arrêt immédiat de l’agression contre les libertés, leurs acquis et droits et la satisfaction de leurs revendications pressantes.

Expriment leur volonté de renforcer leurs luttes unitaires conformément au mot d’ordre : « Ce qui ne s’obtient pas par la lutte, s’arrache par une lutte plus puissante ».

* * *

Le Secrétariat National de la tendance démocratique au sein de l’Union Marocaine du Travail, réuni le 30 octobre 2014 à Rabat, après analyse des données sur la grève générale nationale unitaire et préventive du 29 octobre 2014, déclare :

1/ - Notre satisfaction quant au succès historique de la grève générale nationale unitaire préventive du 29 octobre 2014 ; malgré les entraves répressives de la mobilisation pour la grève dans certaines villes et les manœuvres hostiles, la grève a été suivie massivement par l’écrasante majorité des fonctionnaires et employés des différents services ministèriels, des collectivités territoriales, des établissements et entreprises publiques et par une bonne partie des employés et ouvriers du secteur privé et même par les petits et moyens commerçants de certaines villes.

Le succès de cette grève générale nationale historique s’explique par le ras le bol des travailleurSEs et par le caractère unitaire de la grève à laquelle ont appelé l’ensemble des centrales et organisations syndicales et professionnelles importantes, avec la défection de la centrale syndicale liée au parti du président du gouvernement. La grève a été appuyée par l’ensemble des forces progressistes et vives du pays : organisations politiques, de défense des droits humains, des jeunes, estudiantines, associatives diverses, diplômés enchômagés et mouvement du 20 février.

2/ Nous félicitons la coordination intersyndicale regroupant l’UMT, la CDT et la FDT qui est à l’origine du lancement de la dynamique de l’unité militante en perspective de l’unité syndicale organisationnelle tant espérée par les travailleurSEs et qui a pris l’initiative de décider la grève générale, de fixer la date de son exécution et son caractère en tant que grève nationale unitaire et préventive.

De même, nous saluons vivement l’ensemble des organisations syndicales et professionnelles qui ont participé à la bataille du 29 octobre et l’ensemble des forces progressistes qui l’ont appuyée.

A cette occasion, nous nous félicitons des initiatives de coordination et d’action unitaire de base qui ont joué un rôle important dans la mobilisation pour le succès de la grève dans plusieurs villes.

Nous appelons énergiquement à préserver l’action unitaire de base et à barrer la route à toute régression dans le domaine de la coordination syndicale quelqu’en soit la justification et en ayant présent à l’esprit que les forces makhzéniennes et le patronat ont toujours été des ennemis de l’unité syndicale et plus généralement de l’unité populaire.

3/ Nous sommes fiers du rôle important et qualitatif – totalement escamoté d’ailleurs au niveau des média – joué par la tendance démocratique au sein de l’UMT qui a persévéré depuis plus de deux ans à brandir et à mettre en œuvre le mot d’ordre de « lutte unitaire ascendante dans la perspective de la grève générale nationale »

La tendance démocratique n’a pas hésité à participer à toutes les luttes syndicales unitaires sérieuses (marches nationales du 27 mai 2012 à Casablanca, du 31 mars 2013 à Rabat, du 06 avril 2014 à Casablanca), en parallèle d’ailleurs avec ses luttes propres : grèves et marches nationales de février 2012, février 2013 et février 2014.

4/ La volonté des travailleurSEs, suite au succès de la grève nationale unitaire du 29 octobre c’est d’abord l’arrêt par le Makhzen et son gouvernement réactionnaire – exécutant zélé de ses politiques d’appauvrissement et des dictats des institutions financières impérialistes – et par le patronat de l’agression contre les acquis et les droits des travailleurSEs et contre les libertés ; cette volonté c’est également la satisfaction sans tarder de leurs revendications pressantes qui ne peuvent être réduites à l’ouverture d’une nouvelle session de dialogue social – qui n’aura aucun résultat positif en l’absence d’un engagement formel du gouvernement à respecter d’abord toutes les clauses de l’accord du 26 avril 2011 – ou au traitement du dossier du régime des pensions civiles de la Caisse Marocaine de Retraite malgré son importance.

Les revendications pressantes des travailleurSEs peuvent être résumées ainsi : arrêt de la vague de hausse des prix, augmentation générale des salaires et des pensions de retraite avec diminution de la pression fiscale, respect des libertés en général et des libertés syndicales en particulier en commençant par le droit à l’organisation et le droit de grève, mettre un terme à la précarité de l’emploi, respect du droit au travail stable et des stipulations de la législation du travail en dépit de ses tares, mise en œuvre des engagements gouvernementaux relatifs à l’accord du 26 avril 2011 et aux services sociaux publics notamment dans les domaines de la santé, de l’enseignement et de l’emploi.

S’agissant du dossier de la retraite, il ne peut être réduit aux menaces concernant la CMR et représentées par le trio maudit (augmentation de l’âge de la retraite, des prélèvements sur salaire et diminution des pensions de retraite) puisqu’il englobe également les problèmes relatifs aux Régime collectif des Allocations de Retraite (RCAR) et à la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale (CNSS).

5/ Même après le succès de la grève générale, les déclarations gouvernementale affirment la volonté du gouvernement à persévérer dans la « réforme » du régime de retraite conformément à la stratégie du « trio maudit » et à procéder à l’application généralisée de sa décision arbitraire concernant le prélèvement sur salaires des grévistes tout en continuant à ignorer les revendications pressantes essentielles des travailleurSEs consignées dans l’appel à la grève des trois centrales syndicales et qui sont étayées par le mémorandum revendicatif du 11 février 2014 présenté au gouvernement et qui rassemble l’ensemble du mouvement syndical ouvrier.

En conséquence, le mouvement syndical devra conformément à ses engagements à l’égard des travailleurSEs et pour faire face à l’entêtement prévisible du Makhzen et du Patronat et aux manœuvres attendues du gouvernement, s’apprêter sérieusement à mettre en œuvre le caractère préventif de la grève générale du 29 octobre, en renforçant l’action militante unitaire par le recours à une nouvelle grève générale plus puissante et à des marches ouvrières et populaires dans toutes les villes et à des formes de luttes unitaires nouvelles.

La grève générale du 29 octobre, malgré son grand succès et son caractère unitaire, peut s’avérer insuffisante pour imposer la satisfaction des revendications pressantes des travailleurSEs ; le mouvement syndical ouvrier devra donc se préparer à l’escalade militante comme unique alternative à la démoralisation qui peut toucher les fonctionnaires, les employés et ouvriers du fait de l’hostilité gouvernementale. TouTEs les militantEs devront garder à l’esprit que « ce qui ne s’obtient pas par la lutte s’arrache par une lutte plus puissante ».

Vive la lutte unitaire ascendante pour la réalisation

des revendications des travailleurSEs et des masses populaires ;

Vive la classe ouvrière à l’avant-garde du combat populaire.

Vive l’unité syndicale.

Vive le peuple

Pour le Contact

Abderrazzak DRISSI Abdelhamid AMINE

Khadija RHAMIRI

UMT (Tendance démocratique)

2) La réforme des retraites signe la rupture du dialogue entre le gouvernement et les syndicats

Le gouvernement fait la promotion de sa vision de la réforme des régimes de retraite. Cette fois, c’est le ministère de la Communication qui monte au créneau avec un document détaillant et défendant l’approche du gouvernement. Présenté en une trentaine de pages, le nouveau document tire la sonnette d’alarme sur la situation des caisses de retraite et évoque « une démarche pénible et onéreuse », mais qui reste « indispensable ». Selon le ministère de la Communication, la réforme partielle que compte entamer le gouvernement, et qui retardera le déficit de huit années supplémentaires, sera suivie d’une réforme globale pour assurer la pérennité du système. Pour le moment, le gouvernement envisage trois mesures d’urgence. Il s’agit de la hausse de l’âge du départ à la retraite, de la révision de la base de calcul des pensions et de l’augmentation des cotisations des adhérents. Dans son document, le ministère affirme que l’âge de départ à la retraite ne peut être facultatif. Le système devra s’appliquer à tout le monde, souligne le document qui fait référence à une approche participative de la part du gouvernement pour l’élaboration de la réforme. Le ministère a affirmé que le Chef du gouvernement avait invité les centrales syndicales à prendre part au débat sur la réforme à la fin 2013, une invitation qui a été déclinée par plusieurs syndicats.

Le « niet » des syndicats

De leur côté, les centrales syndicales semblent plus déterminées que jamais à faire face aux mesures prises par le gouvernement. Appelant à une grève générale avant la fin du mois d’octobre (la deuxième en deux mois), les syndicats s’estiment éjectés de tout dialogue social, notamment en ce qui concerne la réforme des retraites. Contacté par « Le Matin », le secrétaire général de l’Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM), Mohamed Kafi Cherrat, dénonce « une approche unilatérale » de la part du gouvernement. Fraichement élu à la tête du syndicat à la place de Hamid Chabat, secrétaire général actuel du Parti de l’Istiqlal, M. Kafi Cherrat clame que le retour au dialogue est le seul chemin de la réforme.

Pour sa part, le secrétaire général de l’Union marocaine du travail (UMT), Miloudi Moukharik affirme qu’il s’agit là d’une nouvelle tentative de fuite en avant de la part du gouvernement. Sur le plan de la forme, « le gouvernement est en train d’emboiter le pas au Conseil économique, social et environnemental, saisi pour donner son avis sur le dossier », affirme M. Moukharik. Sur le fond, le responsable affirme que l’UMT a toujours attaché une grande importance à la réforme de la CMR en tirant la sonnette d’alarme sur sa situation depuis 2003. À ce niveau, le syndicaliste souligne que l’État employeur n’avait pas payé ses cotisations depuis 1960, accumulant des arriérés de plus de 11 milliards de dirhams. « Et là on voit que le gouvernement récidive encore en voulant faire endosser la responsabilité aux fonctionnaires », a-t-il déclaré. Le secrétaire général de la Fédération démocratique du travail (FDT), Abderrahman Azzouzi, n’a pas dérogé à la règle. Dénonçant un traitement unilatéral du dossier de la part du gouvernement, M. Azzouzi affirme que le gouvernement n’a pas donné suite à un mémorandum commun qui lui a été adressé par trois centrales syndicales (UMT, FDT, CDT). Pour le syndicaliste, l’approche du gouvernement pour traiter ce dossier est l’une des principales raisons de la prochaine grève générale programmée le 29 octobre prochain.

Ayoub Lahrache, LE MATIN

1) Appels des dirigeants syndicaux

Miloudi Moukharik, secrétaire général de l’UMT

« La réforme des retraites ne doit aucunement se faire au détriment des intérêts des travailleurs. C’est pour cette raison que l’UMT propose que le départ à la retraite, au-delà de 60 ans, reste facultatif. Cette mesure doit être appliquée pour une durée transitoire de deux ans, durant laquelle, les différents partenaires pourront évaluer son impact. S’agissant de l’augmentation de la valeur des cotisations, je peux dire que le Maroc est le seul pays au monde où l’État paie une cotisation égale à celle du fonctionnaire. Ce que nous proposons, c’est que l’État assume ses responsabilités en payant les 2/3 de la cotisation, comme cela se fait partout dans le monde, et que le fonctionnaire paie le 1/3 restant. Cependant, l’UMT refuse catégoriquement toute baisse des pensions, car tout travailleur a le droit d’avoir une pension honorable après tant d’années de travail. Pour assurer l’accompagnement de la réforme et l’inscrire dans la durabilité, l’UMT propose la mise en place d’une haute autorité d’orientation des systèmes de retraite composée de représentants du gouvernement, des syndicats, du patronat et du CESE. »

Abderrahmane El Azzouzi, secrétaire général de la FDT

« Le dossier de la réforme de retraite traine depuis plus de huit ans déjà. Une commission technique et une commission nationale ont vu le jour pour mieux cerner la problématique et la dernière réunion de cette commission date de juin dernier. Le gouvernement avait exposé sa vision de la réforme et avait demandé l’avis des centrales syndicales. Chose à laquelle on avait répondu favorablement en adressant un mémorandum commun (UMT, FDT, CDT) au Chef du gouvernement. Malheureusement, le Chef du gouvernement a ignoré le document et au lieu de convoquer une nouvelle réunion pour débattre de son contenu, il a préféré faire la promotion de sa vision en optant pour des mesures unilatérales nuisant aux intérêts des employés qui devront supporter, seuls, le coût de la réforme. Cette façon de faire du gouvernement est l’une des principales causes de la prochaine grève générale prévue le 29 octobre prochain. »

Mohamed Kafi Cherrat, secrétaire général de l’UGTM

« L’approche adoptée par le gouvernement dans le traitement du dossier de la réforme des retraites est frustrante.

Les syndicats ne peuvent adhérer à une réforme à l’élaboration de laquelle ils n’ont pas participé.

Aujourd’hui, on voit clairement que le gouvernement veut traiter le dossier d’une façon unilatérale, alors que les syndicats ne cessent de réclamer le règlement du dossier dans le cadre du dialogue.

La commission technique a fait un grand travail sur le sujet et les résultats de son travail ont eu l’approbation des syndicats, mais le gouvernement a préféré faire cavalier seul, ce qui a conduit au climat de tension actuel et à la grève générale programmée à la fin de ce mois.

Les syndicats sont conscients de l’importance de la réforme, mais veulent à tout prix éviter que les travailleurs supportent seuls le coût d’un désastre qu’ils n’ont pas causé. »

- See more at : http://www.lematin.ma/journal/2014/...


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