Arabie saoudite : 1000 coups de fouet et 10 ans de prison pour Raif Badawi, simple blogueur

samedi 11 août 2018.
 

Raif Badawi a été condamné en mai 2014 à 10 ans de prison, 226000 euros d’amende et 1000 coups de fouet pour avoir créé un forum de discussion en ligne. Vendredi 9 janvier 2015, il a subi son premier châtiment public (50 coups de fouet devant la mosquée de Djeddah). Nous pouvons empêcher ce châtiment corporel scandaleux. Raif Badawi est un prisonnier d’opinion. Il doit être libéré.

C) Lettre adressée au Président de la République Française : Libérez le blogueur saoudien Raif Badawi !

Monsieur le Président,

Nous vous écrivons aujourd’hui, monsieur le Président, avec le soutien de vingt neuf associations, afin de porter à votre attention une situation d’une extrême gravité qui requiert une intervention de la France dans les meilleurs délais. Il s’agit de la vie même du prix Sakharov 2015, le blogueur saoudien Raïf Badawi, âgé de 34 ans et emprisonné depuis le 17 juin 2012 dans son pays d’origine, l’Arabie saoudite, en raison de sa défense pacifique des droits humains.

Ce jeune père de famille fut publiquement flagellé de cinquante coups de fouet le 9 janvier 2015 après la prière du vendredi sur une place faisant face à la mosquée al-Jafali à Jeddah. La sentence complète de M. Badawi est de 1000 coups de fouet, de dix ans d’emprisonnement, d’une amende de plus de 200 000 euros et d’une interdiction de quitter le territoire saoudien pendant dix ans après avoir purgé sa peine. Ce digne défenseur des droits de la personne est de plus coupé du monde et placé en isolement.

Sa santé s’est gravement détériorée ces derniers mois, nous affirme son épouse, Mme Ensaf Haidar, présidente de la fondation Raïf Badawi, que nous avons rencontrée le 13 janvier dernier à Saint-Denis et avec laquelle nous nous sommes longuement entretenus.

En effet, à l’invitation de quelques associations œuvrant dans le domaine de la laïcité et des droits des femmes en partenariat avec plusieurs médias, Ensaf Haidar nous faisait l’honneur de participer à l’événement Avec Charlie, laïcité j’écris ton nom qui se tenait en présence de plus de 400 personnes dont une trentaine de représentants du monde associatif.

Ce jour-là, madame Haidar a rappelé l’engagement infaillible de son mari en faveur de la liberté de conscience, de la liberté d’expression et des droits des femmes. À travers des mots simples et percutants Mme Badawi a notamment expliqué les circonstances et les enjeux entourant l’arrestation de son compagnon et père de ses trois enfants (3). « Mon époux était coupable, selon son acte d’accusation, d’avoir « insulté l’islam » et d’avoir « par ses productions, troublé l’ordre public, les valeurs religieuses et la morale ».

En fait, son crime n’était autre que sa conviction profonde à exprimer librement ses opinions – la liberté d’expression est au cœur même de la question. Il ne s’agit pas d’un choc de civilisations, ni d’un conflit est-ouest. Il s’agit d’un droit universel que revendiquent, partout dans le monde, les défenseurs et les militants des droits humains. Ils demandent ce droit, tout simplement parce qu’il est la pierre angulaire de tout système démocratique, transparent et ouvert »

Voilà un jeune homme né dans un pays hostile à toute forme de liberté, en particulier celle qu’incarne d’une façon magistrale l’esprit de notre Révolution française ainsi que ses grands idéaux. Comment ne pas voir en lui un Voltaire d’Arabie ? Comment rester insensible au terrible sort de cet humaniste qui croupit dans les geôles d’un pays qui suffoque sous la férule de lois qui abaissent l’être humain, bafouent sa dignité et abrogent les libertés ?

L’engagement du prix Sakharov 2015 ne peut nous laisser indifférent. Plus encore, il interpelle nos consciences, agit sur nos mémoires, questionne notre capacité à faire respecter les droits humains. Une chose est sûre, considérant les risques encourus : nous ne pouvons le laisser seul face à l’arbitraire.

Pour nous tout comme pour sa famille, son emprisonnement est insupportable ! M. Badawi mérite de rejoindre les siens le plus tôt possible. Ces derniers sont installés au Canada depuis 2013. C’est pourquoi nous vous demandons d’intercéder pour sa libération.

Nous savons pertinemment bien, monsieur le Président, que notre requête est délicate.

Cependant, les récentes mesures du Royaume saoudien à l’endroit des femmes sont autant de signaux positifs, porteurs d’espoirs qui augurent une ère plus propice à la discussion et aux échanges.

Bientôt vous recevrez à Paris le prince héritier Mohamed Ben Salmane. Nous vous prions donc de saisir cette opportunité pour en appeler à la libération de Raïf Badawi, notre frère en humanité. Nous vous faisons confiance pour trouver les mots justes, le ton approprié ainsi que le moment opportun pour plaider en sa faveur et nous vous serions reconnaissant de bien vouloir nous faire connaitre la suite qui sera donnée à notre demande.

La France a un rôle éminemment important à jouer dans le concert des nations. Nous ne vous apprenons évidemment rien ici. Elle ne saurait donc rester sourde aux appels de Ensaf Haidar et de ses soutiens afin de faire libérer Raïf Badawi. Il y va de son honneur et des valeurs qu’elle défend vaillamment. Il y va aussi de son image dans le monde. Ce n’est qu’en maintenant la France à la hauteur de ses valeurs de justice et de liberté que vous mettrez en cohérence la République et ses principes fondateurs.

Acceptez, monsieur le Président, l’expression de notre plus haute considération.

B) Pétition lancée par Amnesty International

Votre Majesté, Votre Excellence,

Je vous écris au sujet de Mr Raif Badawi, blogueur et prisonnier d’opinion saoudien.

Raif Badawi a été condamné le 7 mai 2014 par le tribunal pénal de Djedda à 10 ans de prison et 1000 coups de fouet, cette condamnation est assortie d’une interdiction de voyager pendant 10 ans à l’issue de sa peine, d’une interdiction d’utiliser les médias et d’une amende d’1million de riyals saoudiens (environ 226 000euros).

Je suis consterné-e d’apprendre que ce 9 janvier, il a été fouetté publiquement devant la mosquée Al-Jafali à Djedda. Je vous demande d’annuler la condamnation à la flagellation de Raif Badawi sans plus tarder. Ce châtiment viole l’interdiction de la torture et de tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant, inscrite dans le droit international. Raif Badawi est un prisonnier d’opinion détenu uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression. Je vous exhorte par conséquent à veiller à ce que le verdict de culpabilité et la peine prononcés à son égard soient annulés et à le libérer immédiatement et sans condition.

Par ailleurs, je suis profondément préoccupé-e par le nombre de militants persécutés en Arabie Saoudite, pour avoir ouvertement exprimé leurs points de vue sur internet. Je vous appelle donc à cesser d’accuser, de poursuivre et de condamner des militants simplement pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion.

Je vous prie de croire, Votre Majesté, Votre Excellence, à l’expression de ma haute considération.

A) Faits et contexte

Raif Badaoui, 31 ans, est détenu depuis 2012 par le régime saoudien. Il a été condamné à 1 000 coups de fouet livrés sur la place publique, à 10 ans de prison ainsi qu’à une amende de 1 millions de rials (soit 226 000 €). Quel crime a bien pu commettre Raif ?

Celui de tenir un site d’orientation politique démocratique (« Free Saudi liberals »), défendant la liberté d’expression, la libération des prisonniers politiques et l’ouverture d’un débat sur les questions politiques en Arabie saoudite.

Il critiquait sur son blog les grands du Royaume, dont des figures religieuses comme le Grand Mufti d’Arabie saoudite, et tournait en dérision la police religieuse de la monarchie saoudienne, la Commission pour la promotion de la vertu et la prévention du vice.

Crimes d’apostasie, blasphème, lèse-majesté : le Moyen-âge en 2015

Dans un premier temps, l’accusation avait réclamé la peine de mort pour « apostasie », soit l’abandon de l’Islam. Finalement, c’est le crime d’ « insulte à l’Islam » qui a été reçu. Derrière l’accusation de « blasphème », c’est bien plus un « lèse-majesté » dont il s’agit.

La monarchie saoudienne s’appuie sur une vision fondamentaliste de l’Islam, le wahhabisme, accompagnant sa politique de diffusion du terrorisme islamiste dans le monde.

Elle constituait jusqu’alors une interprétation fort minoritaire de cette religion. Elle n’a connu une renaissance que dans les années 1930 en Arabie même, avec l’installation de la dynastie Saoud, patronnée par la puissance coloniale britannique puis soutenu par l’allié américain.

Une peine barbare en tout cas, pour un crime obscurantiste. Les 50 premiers coups de fouet ont été donnés vendredi dernier dans sa ville natale de Jeddah, devant une mosquée.

Une foule de plusieurs centaines de personnes ont rythmé les coups de fouet d’applaudissements, de sifflets d’encouragement et de cris « Allah Akbar » (Dieu est grand).

Selon ce qu’un témoin a conté à Amnesty international, « Raif était menotté et enchaîné mais son visage n’était pas couvert. Un officier de police s’est approché avec un grand bâton et a commencé à le frapper. Raif a levé sa tête vers le ciel, fermant ses yeux et cambrant son dos. Il n’a rien dit, mais vous pouviez voir sur son visage et son corps qu’il souffrait le martyr ».

Ce vendredi, il doit subir une seconde salve de 50 coups de fouet à Djeddah, un rituel qui devrait continuer pour les 19 prochaines semaines. Sa femme, Ensaf Haidar, désormais exilée à Montréal a déclaré – après l’avoir eu au téléphone – qu’elle n’était pas sûr qu’il résisterait à un second supplice.

« Raif m’a dit qu’il avait énormément souffert après sa flagellation, sa santé est précaire », a-t-elle confié à Amnesty.

Son avocat condamné à 15 ans de prison pour sa défense des droits humains

Son avocat, Walid Abou al-Khair a lui aussi été condamné en juillet à 15 ans de prison pour avoir dénoncé les violations des droits de l’Homme en Arabie saoudite. Il s’agit, prétextant le contexte anti-terroriste (un comble), de réprimer toute dissidence interne, fut-elle modérément libérale.

Une semaine après la condamnation officielle par Riyad des attentats de Paris, après la présence d’un ministre saoudien à la manifestation officielle de dimanche dernier, ce piétinement de la liberté d’expression crée un certain malaise, dans le monde arabe. Les caricatures ont fleuri sur le web.

Une montrant un homme ressemblant à Raif fouetté alors qu’à côté le bourreau criait, des fleurs plein la bouche, « l’Arabie saoudite condamne les attaques contre la liberté d’expression à Paris ». Une autre image montrait un crayon lacéré de coups de fouet.

Notre allié saoudien : champion du monde de la peine de mort et du terrorisme

C’est un secret de polichinelle, l’Arabie saoudite a armé les factions islamistes en Syrie contre le régime d’Assad, dans une émulation morbide avec le Qatar, usant des facilités offertes par la Jordanie et la Turquie, avec la bénédiction de ses alliés américains, français et britanniques.

Ce n’est pas un secret du tout, la Charia est appliquée sous une forme extrêmement rigoriste. Sont considérés comme crimes passibles de la lapidation, la mutilation ou la décapitation : sodomie, athéisme, trafic de drogue (y compris cannabis), fornication, blasphème ou sorcellerie (sic).

L’Arabie saoudite détient le record du nombre de condamnations à mort avec 89 décapitations en 2014 prononcées par la monarchie absolue. La loi du talion y est appliquée, elle a ainsi conduit l’an dernier à la condamnation d’un jeune homme … à la paralysie après une agression durant son adolescence qui avait conduit tragiquement à la paralysie de sa victime.

Ce que dénonçait Raif, c’était la police des mœurs, les « mutaween » (pieux) qui patrouillent dans les rues s’assurant du code vestimentaire, de la stricte séparation entre hommes et femmes, du respect des prières dictées par leur interprétation particulière de la Charia.

Le gouvernement encourage la délation de ses concitoyens. Un tribunal saoudien vient tout juste de condamner cinq hommes à 32 ans de prison et 4 500 coups de fouet pour avoir organisé une … Fête illégale de St-Valentin avec des femmes avec lesquelles ils auraient dansé et bu.

2015 sera l’année de la dénonciation de l’hypocrisie. Au moment où on nous demande de rejoindre l’ « Union sacrée » nationale pour une « Sainte-Alliance » internationale menée par la France, les USA, appuyant l’Arabie saoudite, le Qatar, Israel, les premiers soutiens et acteurs du terrorisme international. Aujourd’hui, « nous sommes tous Raif ».

AC pour Solidarité Internationale PCF

Pour signer cette pétition, cliquer sur l’adresse URL portée en source (haut de page, couleur rouge).


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