Gênes 2001 : La Cour européenne des droits de l’homme condamne l’Italie pour torture (video, arrêts et décisions)

samedi 11 avril 2015.
 

Faits du G8 de 2001 à Gênes- la CEDH condamne l’Italie pour actes de torture commis contre les occupants de l’Ecole Diaz. C’est une immense et émouvante nouvelle, 14 ans après les faits. En outre, l’Italie se fait épingler pour n’avoir toujours pas de législation conforme aux standards européens et appropriée sur la torture.

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"Dans son arrêt de chambre1, rendu ce jour dans l’affaire Cestaro c. Italie (requête no 6884/11), la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu : Violation de l’article 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention européenne des droits de l’homme concernant les mauvais traitements subis par le requérant, et Violation de l’article 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention en raison de la législation pénale appliquée en l’espèce L’affaire concerne les événements survenus à la fin du sommet du G8 à Gênes en juillet 2001, dans une école mise à la disposition par les autorités municipales afin de servir de lieu d’hébergement nocturne pour les manifestants. Une unité de police anti-émeute investit le bâtiment vers minuit afin de procéder à une perquisition. Il s’ensuivit des actes de violence. La Cour juge en particulier que, eu égard à l’ensemble des circonstances exposées, les mauvais traitements subis par le requérant lors de l’irruption de la police dans l’école Diaz-Pertini doivent être qualifiés de « torture » au sens de l’article 3 de la Convention. La Cour note que l’absence d’identification des auteurs matériels des mauvais traitements découle en partie de la difficulté objective du parquet de procéder à des identifications certaines mais également du défaut de coopération de la police. La Cour conclut à la violation de l’article 3 de la Convention, à cause des mauvais traitements subis par M. Cestaro et d’une législation pénale inadéquate quant à l’exigence de sanction des actes de torture et dépourvue d’effets dissuasifs pour prévenir efficacement leur réitération. Après avoir souligné le caractère structurel du problème, la Cour rappelle qu’en ce qui concerne les mesures à prendre pour y apporter remède, les obligations positives qui incombent à l’État sur le terrain de l’article 3 peuvent comporter le devoir de mettre en place un cadre juridique adapté, notamment par le biais de dispositions pénales efficaces."

La Cour rappelle également dans son arrêt les traitements subis par le requérant, M. CESTARO :

"31. Vers minuit, une fois arrivés à proximité des deux écoles, les membres du VII Nucleo antisommossa, munis de casques, boucliers et matraques de type tonfa, ainsi que d’autres agents équipés à l’identique commencèrent à avancer au pas de course. Un journaliste et un conseiller municipal, qui se trouvaient à l’extérieur des bâtiments des deux écoles, furent attaqués à coups de pied et de matraque (jugement de première instance, pp. 253-261).

32. Certains occupants de l’école Diaz-Pertini qui se trouvaient à l’extérieur regagnèrent alors le bâtiment et en fermèrent la grille et les portes d’entrée, essayant de les bloquer avec des bancs de l’école et des planches de bois. Les agents de police s’amassèrent devant la grille qu’ils forcèrent avec un engin blindé après avoir tenté en vain de l’enfoncer à coups d’épaule. Enfin, l’unité de police décrite ci-dessus enfonça les portes d’entrée (ibidem).

33. Les agents se répartirent dans les étages du bâtiment, partiellement plongés dans le noir. Avec, pour la plupart d’entre eux, le visage masqué par un foulard, ils commencèrent à frapper les occupants à coups de poing, de pied et de matraque, en criant et en menaçant les victimes. Des groupes d’agents s’acharnèrent même sur des occupants qui étaient assis ou allongés par terre. Certains des occupants, réveillés par le bruit de l’assaut, furent frappés alors qu’ils se trouvaient encore dans leur sac de couchage ; d’autres le furent alors qu’ils se tenaient les bras levés en signe de capitulation ou qu’ils montraient leurs papiers d’identité. Certains occupants essayèrent de s’enfuir et de se cacher dans les toilettes ou dans des débarras du bâtiment, mais ils furent rattrapés, battus, parfois tirés hors de leurs cachettes par les cheveux (jugement de première instance, pp. 263-280, et arrêt d’appel, pp. 205-212).

34. Le requérant, âgé de soixante-deux ans à l’époque des faits, se trouvait au rez-de-chaussée. Réveillé par le bruit, il s’était, à l’arrivée de la police, assis dos contre le mur à côté d’un groupe d’occupants et avait les bras en l’air (jugement de première instance, pp. 263-265 et 313). Il fut frappé surtout sur la tête, les bras et les jambes, les coups portés causant de multiples fractures : fractures du cubitus droit, du styloïde droit, de la fibule droite et de plusieurs côtes. D’après les déclarations de l’intéressé devant le tribunal de Gênes, le personnel sanitaire entré dans l’école après la fin des violences l’avait pris en charge en dernier, malgré ses appels au secours.

35. Le requérant fut opéré à l’hôpital Galliera de Gênes, où il demeura quatre jours, puis, quelques années plus tard, à l’hôpital Careggi de Florence. Il se vit reconnaître une incapacité temporaire de travail supérieure à quarante jours. Il a gardé des blessures décrites ci-dessus une faiblesse permanente du bras droit et de la jambe droite (jugement de première instance, pp. XVII et 345)."


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