INSEE 2016 : 8,6 millions sous le seuil de pauvreté... Les plus modestes paient la crise

samedi 23 juillet 2016.
 

L’Insee a dévoilé hier l’édition 2016 de son rapport «  Revenus et patrimoine  ». Si la France a «  mieux résisté  » que d’autres, ce sont tout de même les plus pauvres qui ont le plus pâti de la crise de 2008.

L’Insee a rendu public, hier en fin de journée, son rapport annuel sur les revenus et le patrimoine des ménages français. Une étude qui porte sur la période 2008-2013 (en raison des délais nécessaires pour établir des statistiques significatives). Soit le cœur de la crise économique, mais aussi la période de sa gestion par le gouvernement Sarkozy et le début du quinquennat de François Hollande.

Baisse du revenu médian entre 2008 et 2013

En 2013, l’Insee évalue donc le niveau de vie médian de la population autour de 20 000 euros annuels, soit 1,1 % de moins qu’en 2008. Une baisse que l’institut considère « modérée » en comparaison avec « d’autres pays d’Europe ». Soit. Mais si ce revenu médian reste, à l’échelle d’une société complète, très relativement stable, il n’en va pas de même quand on se penche sur le détail de ses composantes.

De fait, l’étude démontre que ce sont sur les extrémités de l’échelle que les populations connaissent les plus fortes variations. Et la constatation est effrayante  : « Sur la période 2007-2013, un individu 20 % au-dessus du niveau de vie moyen une année pouvait anticiper être encore 16 % au-dessus l’année suivante. Un individu 20 % en dessous devait s’attendre à rester encore 15 % en dessous un an plus tard.  » la moitié de la population voit son revenu évoluer- que ce soit à la hausse ou à la baisse- de plus de 10%.

«  La baisse des revenus du patrimoine »

Ainsi, l’Insee note qu’entre 2008 et 2011 les inégalités se sont « nettement creusées », jusqu’à atteindre pour cette dernière année un record depuis 1996, principalement sous l’effet de la hausse du chômage dans la période. Un creusement des inégalités « porté par la forte augmentation des très hauts revenus et le repli des revenus les plus modestes entre 2008 et 2011  ». Et si elles se sont réduites entre 2011 et 2013, ce n’est pas par un retour de l’emploi ou une hausse des revenus pour les plus modestes, mais « du fait notamment de la baisse des revenus du patrimoine » (dividendes, loyers perçus…). Une baisse que les auteurs du rapport expliquent par deux phénomènes  : « Le repli des taux d’intérêt et la perspective d’une hausse de la fiscalité s’appliquant aux dividendes versés en 2013 ». Deux phénomènes conjoncturels, donc, dont il n’est pas dit que l’effet se poursuit sur les années suivantes. Il faut ainsi s’attendre à voir les prochains rapports constater la fin de cette baisse des inégalités.

«  Sur cinq ans, la pauvreté a augmenté de 0,7 point  »

« La crise n’a donc pas changé le profil de la pauvreté, mais en a accentué certains traits, analyse l’Insee  : une plus forte présence des chômeurs, des ouvriers, de familles monoparentales ou nombreuses, se répercutant nettement sur la pauvreté des enfants. » En 2013, l’institut chiffre le nombre de personnes vivant en France en dessous du seuil de pauvreté (établi pour 2013 à 1 000 euros mensuels, correspondants à 60 % du revenu médian) à 8,6 millions. Cela représente 14 % de la population. « Cette proportion diminue légèrement en 2012 et 2013 (– 0,4 puis – 0,3 point), mais, sur cinq ans, la pauvreté a augmenté de 0,7 point », relèvent les auteurs. Une hausse qui, lit-on, « touche surtout les ménages actifs, notamment les ouvriers, les familles monoparentales et les familles nombreuses ». Au-delà de la hausse du taux de pauvreté, le rapport pointe surtout une progression de « l’intensité » de la pauvreté de 0,5 point, « traduisant la détérioration de la situation des plus pauvres par rapport au reste de la population ». De plus, entre 2008 et 2012, l’institut constate une augmentation de 2,6 points de la pauvreté touchant les enfants, qui, malgré un léger repli en 2013, s’établit tout de même pour cette dernière année à 19,6 %.

Pour l’Insee, cependant, les caractéristiques socio-démographiques pèsent de moins en moins sur les inégalités. « Quelle que soit la caractéristique démographique considérée (âge, catégorie socioprofessionnelle, etc.), le poids de l’inégalité entre chacune de ces catégories recule au profit de celui observé au sein de chaque catégorie. » La pauvreté et les inégalités deviendraient donc de plus en plus un problème individuel. Raison de plus pour protéger les protections collectives…

Le patrimoine des ménages

En 2015, 94 % des ménages français détiennent un patrimoine privé, constate l’Insee. Un Français sur dix détient des produits financiers (livrets, épargne logement, assurance-vie, épargne retraite ou valeurs mobilières). Près de deux sur trois sont propriétaires d’un bien immobilier. Mais seuls 16,5 % des ménages métropolitains détiennent des valeurs mobilières (soit des actions ou obligations), 8 % de moins qu’en 2004. Pour l’Insee, les ménages auraient « délaissé les valeurs risquées » pour l’épargne retraite ou l’assurance-vie, « plus avantageuses en termes de sécurité et de fiscalité ».

Adrien Rouchaleou Mercredi, 29 Juin, 2016 L’Humanité


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