Une France égoïste et conservatrice a voté Fillon

samedi 3 décembre 2016.
 

La mobilisation électorale a été plus importante au second tour de la primaire de la droite en dépit de l’élimination de cinq candidats sur sept au premier tour. La victoire de François Fillon semble surtout provenir d’un électorat plutôt âgé. Dans une société en crise l’ancien Premier ministre semble être le candidat le plus rassurant pour les patrons comme pour les petits rentiers.

Comme on pouvait s’y attendre au vu des résultats du premier tour, François Fillon l’a emporté hier avec 66,5% des suffrages exprimés lors du second tour de la primaire organisée par la droite pour désigner son candidat à l’élection présidentielle de 2017. Grosso-modo, deux fois plus de voix se sont porté sur son nom que sur celui d’Alain Juppé, lequel était pourtant le favori des sondages tout au long de la campagne de l’avant premier tour. En France métropolitaine, seuls des départements de la Gironde et de la Corrèze ont voté majoritairement pour le maire de Bordeaux. La carte publiée ce matin par le Figaro donne à voir les départements où François Fillon a obtenu plus de 75% des suffrages. Les départements de Vendée, Mayenne, Orne, Sarthe, Aube, Meuse, Vosges, Haute-Saône, Jura, Ain, Alpes-Maritimes, Var, Haute-Corse, et Pyrénées-Orientales figurent dans ce peloton de tête. En revanche, la Bretagne, la Normandie, l’Ïle-de-France et le grand Sud-ouest sont les régions qui ont donné une moindre faveur au natif de la Sarthe. On sait que l’homme est devenu député de Paris en 2012 pour ne pas risquer de perdre le siège qu’il occupait depuis 1981 à Sablé dans son département d’origine.

La sociologie de l’électorat du premier tout donnait à voir un profil majoritairement masculin et relativement âgé dans les villes de province. Avec une participation accrue, il est probable que le second tour accentue cette tendance. On peut penser que nous avons à faire ici à des hommes et des femmes de plus de 50 ans en majorité, dont une grande proportion de retraités. Il s’agit aussi d’une France de propriétaires, de cadres, d’artisans, de commerçants, de paysans, d’investisseurs disposants d’actions pour un certain nombre. Nous avons aussi des habitués de l’optimisation fiscale via l’investissement dans le logement locatif privé dont les plan Périssol, Besson, De Robien, Scellier, Apparu, Duflot et autres Pinel ont multiplié les opportunités de placements. Ce sont surtout des électeurs de droite qui ont ainsi vu croître leur patrimoine et leur revenu en tirant parti des loyers payés par les locataires, sans oublier l’Aide personnalisée au logement destinée rendre les locataires solvables, mais qui atterrit finalement dans la poche des bailleurs en maintenant les locataires dans la pauvreté. Tout à gagner avec Fillon pour les patrons et les rentiers

Cet électorat ne pouvait que se retrouver dans le projet de François Fillon de supprimer l’Impôt de solidarité sur la fortune ; de baisser les droits de successions, de mettre fin aux 35 heures, de baisser les impôts sur les sociétés et les « charges des entreprises ». De telles mesures laissent supposer que la rémunération des actionnaires sera ainsi revue à la hausse. De même, la volonté de François Fillon « mettre en œuvre une augmentation modulée de la TVA de 3 points » permet à cet électorat de se dire que cet impôt indirect sur la consommation payé par tout un chacun permettra aussi de réduire les impôts directs.

Alors que plus de quatre millions d’électeurs auraient pris part au vote de ce second tour, il semble donc acquis qu’il s’agit d’un électorat soucieux de défendre des positions acquises dans une société en crise minée par le chômage et la précarité de l’emploi. Les retraités qui on voté pour Fillon ne sont plus concernés par le recul de l’âge donnant droit à une retraite à taux plein. Mais ils sont probablement assez nombreux à compter sur une amélioration du revenu du patrimoine avec Fillon à l’Elysée. Les enjeux climatiques absents

Notons enfin que le second tour de l’élection primaire de la droite s’est déroulée moins d’un an après la conclusion de la Cop 21 à Paris et deux semaines à peine après la Cop 22 de Marrakech. A aucun moment les enjeux climatiques n’on fait l’objet du moindre débat quand les sept mercenaires de la droite se sont retrouvés sur les plateaux de la télévision. Fillon a même déclaré qu’il y avait des choses plus importantes que cela, la seule fois où le sujet fut évoqué, c’est avec Nathalie Kosciusko-Morizet. Il n’y a pas une ligne sur les enjeux climatiques dans le projet de François Fillon. En revanche, il est partisan de l’exploitation du gaz de schiste en France et plaide aussi pour la mise en culture des organismes génétiquement modifiés (OGM) au moment où les fermiers américains en sont à se dire que les OGM les ont conduits dans une impasse en moins de vingt ans. De même s’est-il, à plusieurs reprises déclaré hostile au principe de précaution.

Au regard de l’intérêt bien compris des générations futures, il n’y a pas plus mauvais candidat que François Fillon pour l’élection présidentielle de 2017.

Gérard Le Puil Journaliste de l’Humanité et auteur


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