France Insoumise : Le début d’un processus et non une fin en soi

vendredi 21 avril 2017.
 

Tout au long de cette campagne, il aura été question du moment où la «  bulle  » Macron finirait par éclater. Elle le devait d’abord parce que le clivage droite-gauche était trop solidement implanté pour que jamais le centre ne puisse s’y faire une place. Mais c’était sans compter la configuration inédite de cette élection, où les deux partis centraux ont perdu le contrôle de l’espace politique. Elle devait éclater ensuite parce que l’inconsistance du discours d’Emmanuel Macron et sa fausse nouveauté finiraient par sauter aux yeux, et que le flou de son programme se dissiperait dans la révélation des positions néolibérales, nettement favorables au renforcement élargi de l’exploitation du travail, qu’il tient effectivement.

La première des lucidités politiques aurait dû frapper d’inanité l’entreprise de ravalement Macron  : son venin consensuel vise à abolir le social en tant qu’irréductiblement conflictuel, et ainsi, neutraliser son antagonisme de classe. La première des traductions de sa toxicité est le risque que ce dévoiement de la conflictualité du social se convertisse en conflit identitaire nationaliste. D’où vient que le mirage ne se soit pas encore dissipé  ? La réponse tient en le sempiternel argument du vote «  utile  » et à la position de Macron comme seul rempart supposé d’abord à Marine Le Pen, puis au duo Fillon-Le Pen, voire à l’hypothèse Mélenchon-Le Pen. Le niveau de Macron dans les intentions de vote ne tient qu’à sa position d’équilibre entre les gauches divisées qui n’ont en commun qu’un signifiant éponyme rendu creux par les capitulations et les trahisons et les droites filloniste et lepéniste unies dans le mépris de la décence républicaine.

Or il se pourrait que la montée en puissance de Jean-Luc Mélenchon remette en cause ce positionnement d’équilibriste. Car la dynamique du candidat de la France insoumise crédibilise à la fois l’hypothèse d’un second tour Le Pen-Mélenchon et celle de sa victoire. De quoi faire sauter le verrou du vote «  utile  » pour Macron, celui pour Mélenchon devenant effectivement le «  vote nécessaire  » pour les électeurs de gauche. Ce vote pourrait permettre d’éliminer la candidate du FN sans céder inconsidérément sur ses convictions et ce, malgré les réserves et les désaccords (notamment pour ceux que la possibilité de réformer le capitalisme en négociant avec lui laisse sceptiques) qu’il est possible de soutenir à l’endroit du programme politique proposé par Jean-Luc Mélenchon

Acceptons la perspective intellectuelle du pari lucide suivant  : une victoire électorale de Jean-Luc Mélenchon pourrait constituer un pas important dans la transformation émancipatrice de la société. Ce pari devrait être assorti des deux conditions suivantes  : d’abord, le travail de rassemblement dès le premier tour des électeurs de gauche derrière la dynamique de Jean-Luc Mélenchon. Ensuite, via une vigilance politique inflexible (dans la rue et dans l’entreprise, par la manifestation, la grève et toute forme jugée pertinente de désobéissance civile), faire que ce vote soit le début d’un processus et non une fin en soi, de manière à donner consistance à une logique qui ne manquera pas de se heurter à ce que le capital oppose de plus brutal lorsque, joignant le geste à la parole, il lui est cherché querelle à l’endroit de sa domination sans partage.

Faire le pari de ce ralliement conditionné à la candidature de Jean-Luc Mélenchon est peut-être la piste la plus assurée pour que le conflit social ne s’enferre pas dans la cage d’acier du discours libéral macronien.


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