"Pardon pour le meurtre, mais aussi pour le racisme anti-musulman enraciné dans la communauté juive"

dimanche 20 mai 2007.
 

“Pardonnez-nous notre racisme” par Gael Pinto

"Le meurtre de Taysir Karaki de Beit Hanina, 35 ans, père de cinq enfants, est le fait d’un individu seul, mais le terreau sur lequel le terroriste juif français Julian S. a grandi n’en réclame pas moins un examen collectif.

Plus d’un juif français a expliqué au cours de la récente campagne de l’élection présidentielle qu’il était pour Nicolas Sarkozy en raison de la main de fer dont il avait fait preuve contre les musulmans lors des affrontements de la banlieue parisienne en 2005. Son soutien sans équivoque à la communauté juive après l’assassinat d’llan Halimi en 2006, et le fait qu’il y ait attribué des motifs antisémites a aussi aidé Sarkozy à gagner à sa cause nombre de français juifs. Des réflexions du genre « Les Arabes sont en train de s’emparer de la France », et « nous avons besoin d’un homme véritable pour remettre de l’ordre ici » ont été émises par plus d’un Juif au cours de cette campagne.

Il y a aujourd’hui en France 600 000 Juifs. Contrairement aux enfants des immigrants musulmans, beaucoup de Juifs français sont parvenus à des postes de haut niveau et bénéficient du respect et la protection du gouvernement. Dans un Etat qui se veut le champion de l’effacement de l’identité religieuse au profit de l’identité universelle de tous les membres de la république, les Juifs ont joué sur les deux tableaux. D’une part ils se sont intégrés à la société française, et d’autre part ils ont constamment manifesté leur grande loyauté envers Israël et en particulier à l’aile droite des gouvernements qui se sont succédés au pouvoir dans les décennies passées.

Le militantisme de bien des juifs français et le racisme de certains d’entre eux à l’égard des musulmans ne sont pas des phénomènes nouveaux. Je me rappelle sans difficulté un matin de shabbat dans une synagogue de Paris. J’avais douze ans. C’était en 1982, lors de la guerre du Liban et le rabbin prononçait la prière pour l’Etat d’Israël et ses soldats. L’assemblée répondait par des interjections du genre « Sharon, montre leur ! » et « Tuons-les ! ». Le rabbin ne chercha même pas à les faire taire.

Il était clair que cette communauté, qui pendant des années avait généreusement donné à Israël, utilisait l’Etat comme un outil de vengeance.

Aucun juif français n’oserait toucher à un Musulman en France. Le meurtrier juif Julien S. a immigré en Israël avant d’assassiner un Arabe. Car, en France, beaucoup de Juifs préfèrent se draper dans le tallit (N. T. châle de prière) de la victimisation - et les incidents anti-juifs leur donnent des munitions suffisantes pour le faire. L’image de la victime fait que le gouvernement, principalement en raison de ses propres sentiments de culpabilité à l’égard de la période de Vichy, leur apporte un énorme soutien.

Il est temps que l’Etat d’Israël mette un miroir devant les Juifs de France qui courent deux lièvres à la fois. Le premier ministre Ehud Olmert, ainsi que Dalia Itzik, présidente de la Knesset, devraient aller voir la famille de la victime du meurtre, et lui demander pardon au nom de l’Etat et du peuple juif, comme le roi Hussein de Jordanie l’a fait après le meurtre de sept jeunes filles à Beit Shemsh au cours de l’attaque terroriste de Naharayim en 1997, et comme le président français et son épouse, - Jacques et Bernardette Chirac - et le premier ministre Dominique de Villepin l’ont fait après le meurtre d’Halimi quand ils ont assisté au service religieux en sa mémoire dans une synagogue de Paris.

Les dirigeants de la communauté juive de France, que dirige le grand rabbin Joseph Sitruk, devrait par ailleurs se rendre à la Grande Mosquée de Paris demander pardon. Pardon pour le meurtre, mais aussi pour le racisme anti-musulman enraciné dans la communauté juive, et qui est l’une des causes premières de la détérioration des relations Juifs-Musulmans en France."

Traduction Carole SANDREL


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