Non aux JO 2024 : la ville olympique n’est pas une ville écologique

mercredi 10 avril 2019.
 

Tribune de Danielle Simonnet, Frédéric Viale, Alice Le Roy, Mathilde Panot et Sergio Coronado

Le projet Paris 2024, c’est bel et bien Paris 1984. Quand Anne Hidalgo promet des « Jeux olympiques sobres et écologiques », c’est le triomphe de la double-pensée. Quand elle lance sur l’écologie une OPA pour Coca et McDo, quand elle associe ses partenaires Martin Bouygues et Bernard Arnault à la sobriété, on est déjà dans le record olympique du greenwashing.

Tout ce qui est commun est privatisé, au seul bénéfice des promoteurs et investisseurs

Culte de la compétition, culte de la consommation, les JO sous leur forme actuelle sont un contre-exemple absolu au moment où l’humanité, entrée dans la nouvelle ère anthropocène et capitalocène, a plus que jamais besoin de justice, de coopération et de régulation. Pour Paris, la Seine-Saint-Denis et la région Île-de-France, les JO sont une machine qui vise à extirper des biens communs le maximum de profits au seul bénéfice des promoteurs et des investisseurs. Tout y passe, logements, terres agricoles, réseau de transports, même la Seine, qu’Anne Hidalgo veut privatiser pour réaliser des passerelles pour centres commerciaux. Et maintenant le ciel de Paris, que la mairie parle de transformer en autoroute à taxis volants pour 2024 : tout ce qui est commun doit être privatisé. Rien ne doit résister à la logique marchande.

Les Jeux olympiques, un prétexte pour accélérer l’urbanisation et la métropolisation de l’Île-de-France.

Paris 2024 est le grand accélérateur de la métropolisation et de la gentrification. La loi olympique facilite ainsi la construction de l’inutile Tour Triangle ou l’extension du domaine de la pub, qui se déploie jusque sur les façades des monuments. La perspective de 2024 sert aussi bien à promouvoir le mastodonte centre commercial EuropaCity (avec piste de ski artificielle, comme à Dubaï) qu’au projet écocide d’un quatrième terminal pour l’aéroport de Roissy, sans oublier le Charles-de-Gaulle Express, train qui permettra aux plus riches de rallier Paris en 20 minutes et 24 euros, au détriment des galériens qui subissent chaque jour les retards du RER B.

Paris étouffe : la moindre parcelle libre est construite, le moindre espace public bradé

L’histoire se répète à chaque épisode du feuilleton des JO. Se souvient-on que le catastrophique projet des Halles, devenu Canopée d’Unibail, a commencé avec la précédente candidature olympique de la mairie, le fiasco « Paris 2012 » ? La suite de ce film-catastrophe est en production, cette fois à la Gare du Nord destinée à être convertie en nouveau centre commercial géant. Inauguration en 2024 bien sûr, en même temps que la première tranche du nouveau quartier marchand Montparnasse ! La planète brûle mais l’Hôtel de Ville, passés ses sermons de Tartuffe sur l’éco-citoyenneté, est plus que jamais un vaste temple du consumérisme.

La machine infernale est enclenchée. La frénésie de béton s’empare de toute la ville sous influence olympique :

Dans le futur quartier Chapelle-Charbon (18e arrondissement) les espaces verts ont réduit comme peau de chagrin ; à Bercy-Charenton (12e arrondissement), le Tunnel des artisans et son potentiel thermique qui lui a valu le surnom de frigidaire naturel sont condamnés à servir de dalle pour des tours de bureaux inutiles et énergivores. Paris étouffe : la moindre parcelle libre est construite, le moindre espace public bradé, et peu importe les arbres à abattre. Même vouloir préserver un terrain de sport des quartiers populaires – où jouent les gosses et les boulistes et où poussent des herbes qu’on dit mauvaises – devient un crime contre la croissance et donc une hérésie pour la sainte trinité CAC40-BTP-JO qui détient désormais les clés de l’Hôtel de Ville.

Il n’est pas trop tard, la catastrophe peut être évitée

Aujourd’hui, le béton, la pollution, et des écarts de richesse de plus en plus insupportables sont devenus l’horizon des Franciliens. Mais il n’est pas trop tard pour stopper la machine infernale. La catastrophe peut être évitée. Elle doit l’être si nous voulons que Paris devienne une ville vivable et juste et que le grand désaménagement libéral du territoire de la métropole et de la région cesse.

La première chose à faire est de rétablir la démocratie. Jamais la maire de Paris n’a voulu que les citoyen.ne.s soient consulté.e.s au sujet des JO. Au contraire, au cœur de son dossier de candidature, elle a souligné que rien ne l’y obligeait. Voilà comment, en l’absence de concurrence (car les citoyen.ne.s des autres villes candidates s’étaient justement opposé.e.s aux Jeux Olympiques, à Boston, à Hambourg, à Budapest et à Rome), la mairie a imposé sa version contemporaine du pain et des jeux : du CO2 et des JO.

Si nous voulons arrêter la catastrophe olympique et changer de modèle, sortir de l’étau du béton et du profit pour inventer un nouvel écosystème parisien qui nous protège de la gentrification et de la métropolisation barbare, nous le pouvons.

Dire non aux JO est encore possible, mais seulement au prix d’un grand effort collectif et d’une conscience citoyenne claire des enjeux. Sans oublier ce principe aussi : la politique et l’écologie sont des sports d’équipe, et de combat. Exigeons que les citoyen.ne.s puissent voter par référendum sur les JO !


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