Le dopage dans le cyclisme (et autres sports) : petit manuel

dimanche 29 juillet 2007.
 

Envie de devenir un champion ? Médecins et spécialistes vous décryptent comment contourner les contrôles antidopage.

L’expression « cyclisme à deux vitesses » revient en vogue dans le peloton. Il y a ceux qui « prennent » et les autres. Mais au fait, comment font-ils pour tromper les contrôles ? Petit manuel.

La transfusion sanguine

En se faisant pincer au contrôle mardi, Alexandre Vinokourov a commis une « erreur de cadet » puisqu’une méthode mise au point en 2004 par l’Institut d’hématologie de Sydney en Australie permet de distinguer les « populations différentes de globules rouges », bref de déterminer avec certitude s’il y a eu transfusion sanguine.

Rappelons qu’il existe deux sortes de transfusions : homologues, comme dans le cas Vinokourov, c’est-à-dire avec le sang d’un donneur compatible ayant les mêmes groupes et rhésus, et autologue (avec son propre sang). La transfusion est une méthode vieille comme Moser, Francesco, recordman du monde italien de l’heure dans les années 1980. Gérard Dine, professeur de biotechnologies à l’École centrale de Paris, explique facilement la manière dont « Vino » a été confondu : « À partir de la prise de sang, on met en évidence qu’il y a deux populations de globules rouges. Les analyses cherchent ensuite à repérer les groupes sanguins rares qu’un autre donneur ne peut pas avoir, à moins d’être un jumeau parfait du coureur. »

Cependant, comme le coureur américain Tyler Hamilton en 2004, Vinokourov se défend en évoquant une intervention chirurgicale, en l’occurrence les points de suture qu’on lui a posés sur les genoux suite à sa chute du 12 juillet dernier. Un argument que réfute Dine : « Une expertise bien menée fera la différence sans problème, même s’il prétend par exemple avoir été transfusé suite à une opération. »

Avertissement aux apprentis sorciers, les transfusions ne sont pas sans risques. Gérard Dine raconte par exemple avoir été le témoin lors des Jeux d’hiver d’Albertville, en 1992, « d’accidents dramatiques » et se souvient du cas d’un « biathlète russe dont l’autotransfusion avait mal tourné parce que ses poches de sang avaient été mal conservées au froid ». D’après le professeur Michel Audran, de la faculté de pharmacie de Montpellier, « un sportif peut réaliser jusqu’à douze transfusions et retraits de sang sur une saison ». Mais il faut conserver le sang à 4 ºC et pas plus de six semaines. Autrement, il doit être congelé.

L’hormone de croissance ou hGH

C’est l’hormone en vogue dans le sport professionnel. L’ancien golfeur sud-africain Gary Player a provoqué un certain émoi la semaine dernière en assurant qu’elle était répandue sur le circuit professionnel. Normal, elle est indétectable parce que sa durée de vie dans l’organisme ne dépasse pas une heure, selon le docteur Jean-Pierre de Mondenard, auteur d’un Dictionnaire du dopage. Pratiquement, l’hGH stimule la sécrétion de facteurs de croissance des muscles et des organes. Selon certains avis scientifiques, elle n’aurait, utilisée seule, que peu d’effet anabolisant et devrait être couplée à une prise de stéroïde pour avoir un effet optimal. Selon une source proche de l’Agence mondiale antidopage, l’hGH, dont l’AMA promet depuis plusieurs mois la détectabilité à courte échéance, devrait être repérable par les labos d’ici à début 2008.

EPO et Dynepo

L’EPO ou érythropoïétine, qui améliore l’oxygénation du sang, apparue au début des années 1990 dans les pelotons, est loin d’être démodée. Gérard Dine l’explique facilement : « C’est un mythe d’imaginer que, par les urines, l’EPO par exemple est détectable. On sait bien qu’un seul cas sur dix au maximum est détecté. Dans les suivis que je coordonne, je dépiste des gens sous EPO qui sont négatifs aux tests. »

D’autant que la Dynepo, une nouvelle forme d’EPO fabriquée sur lignée cellulaire humaine, et non animale comme l’EPO, est fortement répandue dans les milieux sportifs. Dine encore : « Avec la Dynepo, il se passe la même chose que pour l’EPO traditionnelle dans les années 1990. On a commencé à bouger seulement en 1998, et il a fallu l’affaire Festina. Il y a une inertie terrible. »

Et l’avenir n’est pas plus rose, toujours à suivre Gérard Dine : « On prévoit déjà pour 2008-2010 les EPO synthétiques. Entre 2007 et 2020, on a une vision précise de ce qui sera pris pour faire des globules rouges, du muscle, pour stimuler l’énergétique. Autour de 2015, sortira par exemple une substance qui fait produire de l’EPO par le rein. »

La testostérone

Le toujours présumé vainqueur du Tour 2006, Floyd Landis, s’était fait piquer avec de la « testo ». Apparemment, il était à la pointe de la mode. Qui a néanmoins un peu évolué, comme l’explique Christiane Ayotte, directrice du laboratoire d’analyses de Montréal : « Il y a quelques années, la testostérone se prenait par injection ou par voie orale. Maintenant, la tendance est aux patchs ou aux gels microdosés. »

Une manière de faire du « rééquilibrage hormonal, tranche le professeur Michel Audran, car l’effort fait baisser le taux de testostérone. Dans ces cas-là, le produit n’est pas utilisé pour son effet anabolisant mais réparateur ».

Frédéric Sugnot


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