Crise : le libéralisme en accusation

dimanche 6 avril 2008.
 

Sarkozy et son gouvernement s’efforcent de minimiser la crise financière qui secoue les Etats-Unis et les pays du Nord de l’Europe notamment. « C’est une simple correction brutale des marchés »...déclarait C. Lagarde en janvier. « La France est moins touchée que d’autres pays... » nous assurent les ministres les uns après les autres, récitant l’argumentaire bien appris dans les séminaires gouvernementaux. « Il n’y aura pas de plan de rigueur... » affirme Fillon qui, dans la foulée, découvre que « le plein emploi est la solution à tous nos problèmes... » En attendant, « il va falloir faire des économies sur tout... » Si ce n’est pas un plan de rigueur, qu’est-ce que c’est d’autre ?

Bientôt il va finir par admettre que c’est bien le travail qui est à l’origine du capital -et non l’inverse- comme le disait sous une autre forme Abraham Lincoln qui abolit l’esclavage.

Oui, c’est bien le capital qui, en s’accumulant beaucoup plus vite que la production réelle issue du travail humain, crée cette « bulle financière » en train d’éclater et de déséquilibrer l’édifice capitaliste mondialisé bâti sur du sable. Des économistes américains -pas très critiques à l’égard du système- parlent d’une dépréciation des actifs de l’ordre de 1 000 milliards de dollars !

Evidemment, des spéculateurs avisés y auront gagné des fortunes colossales tandis que des millions de simples emprunteurs, à qui on avait garanti la stabilité des taux d’intérêt, y auront laissé toutes leurs économies et des dettes souvent impossibles à rembourser. Des centaines de banques ont fait faillite et les tenants du système -qui ne pensent pas une seconde à le remettre en question- envisagent ni plus ni moins de demander la... nationalisation des banques qui ont échoué par excès de spéculation !!

Cela pour faire payer l’addition par les contribuables : c’est ce que vient de faire l’Angleterre en nationalisant la Northerm Rock. Aux Etats-Unis c’est la réserve fédérale (FED) qui compense les énormes pertes dues à cet immense gâchis d’argent.

Connaissez-vous la définition du libéral ? C’est quelqu’un qui veut les profits pour lui tout seul mais qui est prêt à partager les risques sans perdre le pouvoir !

Du coup, tous les indicateurs sont rectifiés : les déficits publics ne pourront pas être ramenés à 2,5% du PIB avant 2012, Sarkozy avait promis 2010 et il va prendre la présidence de l’UE avec une mauvaise note pour le pays qu’il préside et qu’il voulait rapidement ramener dans la norme.

La croissance, en 2008, est ramenée prudemment entre 1,7 et 2% après un 1,9% en 2007 en dessous des prévisions, le budget 2008 table sur une croissance à 2,25%.

La dette publique qui atteignait 64,2% du PIB en 2006, sera du même ordre cette année et donc nettement supérieure aux 60% maximum fixés par le pacte de stabilité et de croissance ; Cela fait un total de 1 150 milliards d’euros ! Etat, collectivités locales, sécurité sociale compris.

Ce qu’il faut rembourser chaque année (le service de la dette) représente le second poste du budget national, l’équivalent de l’impôt sur le revenu !

Voilà où mène la liberté totale des mouvements de capitaux, fondement de l’Europe réaffirmé dans le traité de Lisbonne qu’ont approuvé la droite, le centre et le parti socialiste majoritairement.

Rien d’étonnant à ce que le moral des ménages soit au plus bas : le pouvoir d’achat baisse, les acquis sociaux sont laminés un à un, les contre-réformes sont à l’œuvre (santé, protection sociale, retraites, services publics privatisés, droit du travail, lois liberticides...) et après la claque des municipales, le gouvernement veut encore accélérer le rythme !

Résistance et propositions

Son problème : comment rassurer l’opinion en lui faisant croire qu’il a la situation bien en mains et surtout, qu’il n’y a qu’une seule gestion possible : serrer la vis, accroître les recettes fiscales en ménageant les entreprises, réduire les dépenses de l’Etat en transférant sur les ménages (le travail) pour épargner les profits (le capital).

Car à ce qu’on nous serine, les profits seraient les investissements de demain et les emplois d’après-demain. Depuis le temps qu’on nous sert ce plat et que, à part les profits du CAC 40, on n’a pas le loisir d’y goûter, il commence à devenir indigeste et trompe de moins en moins de monde.

Les mobilisations qui s’annoncent seront d’autant plus fortes que grandira la conscience que c’est la société du tout marché, autrement dit, le capitalisme, qui ne peut pas assurer, ni la croissance, ni le progrès social, ni la justice, ni l’égalité des chances, ni l’essor des libertés, ni la sauvegarde de notre environnement... et qu’il faut, du même pas, empêcher toute nouvelle régression sociale et sociétale et proposer des solutions concrètes immédiates pour, notamment, limiter, en les taxant fortement, les mouvements de capitaux à des fins spéculatives et décider d’une tout autre politique du crédit liée aux engagements des entreprises à créer des emplois, à privilégier les investissements productifs, la formation et la recherche. Cela suppose une maîtrise politique des banques centrales.

Et, pour le moyen terme, il importe qu’émerge un projet de société qui invite à rompre avec les logiques capitalistes si l’on veut réellement changer la société et redonner vie à l’idée communiste, dégagée de toute notion de modèle passé, présent ou à venir. Ne nous cachons pas qu’il reste beaucoup de chemin et qu’à gauche le débat promet d’être rude.

par René Fredon


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