Bilan de Mai 68 tiré à chaud par Waldeck Rochet (secrétaire général du PCF)

dimanche 20 juillet 2008.
 

Extraits du rapport présenté par Waldeck Rochet, alors secrétaire général du PCF, au Comité Central de Nanterre, les 8 et 9 juillet 1968 reproduit dans la brochure intitulée « Les événements de mai-juin 1968. Leur enseignement ».

« Pour comprendre ce qui s’est passé on ne peut faire abstraction de la composition sociale du milieu étudiant et tenir pour périmés les enseignements des classiques du socialisme scientifique à cet égard. Marx et Lénine nous ont mis en garde, maintes et maintes fois, contre la propension de la petite-bourgeoisie spécialement de la petite-bourgeoisie intellectuelle, à la phrase et à la pose ultra-révolutionnaires, anarchisantes et pseudo-romantiques.

« Ainsi s’explique que des groupes se réclamant de l’anarchisme, du maoïsme, du trotskisme et du “guévarisme”, bien qu’ils comptent un nombre restreint d’adhérents, aient pu entraîner des milliers d’étudiants sur leurs positions démagogiques.

« On a abouti ainsi aux spectaculaires barricades de voitures auxquelles on mettait le feu. Ces nuits de désordre sans résultats pour le mouvement étudiant ne pouvaient causer aucune inquiétude au régime gaulliste. Bien au contraire : elles mettaient en mouvement en sa faveur la “machine à faire peur”. (...) De toute façon, le mouvement ouvrier français vient de faire une expérience décisive du “gauchisme” et de sa malfaisance. Tous les groupes gauchistes, soutenus tout au long de la dernière période par le PSU, sont nés d’un effort pour nuire au Parti communiste et ils sont tout juste bons à porter tort au mouvement ouvrier et démocratique. (...)

« Dès le début, nous avons dénoncé avec force les mots d’ordre aventuristes des groupes gauchistes qui, en tentant d’entraîner les travailleurs et le mouvement démocratique vers un affrontement avec le pouvoir, faisaient exactement le jeu de ce dernier. (...)

« “Tout est possible !” disait un Barjonnet — reprenant le mot du trotskiste Marceau Pivert en 1936, “La situation est révolutionnaire !” affirmaient les gauchistes de tout poil, qui répandaient même des appels à la “grève insurrectionnelle”. Le PSU et certains dirigeants de la CFDT ne furent pas les derniers à adopter ces attitudes gauchistes, incitant les travailleurs à ne pas reprendre le travail, même lorsqu’ils avaient obtenu des satisfactions substantielles. (…)

« Les gauchistes proclamaient qu’il y avait une “situation révolutionnaire” permettant de renverser le capitalisme et d’établir un POUVOIR OUVRIER alors que le pouvoir gaulliste bien qu’affaibli gardait la possibilité d’écraser par la force le mouvement ouvrier et alors que n’étaient pas réunies les conditions d’une entente solide sur un programme des partis de gauche et organisations syndicales ouvrières.

« En maintenant résolument notre lutte en faveur des revendications des travailleurs et de nos objectifs de relève démocratique du pouvoir gaulliste, dans le cadre de la légalité républicaine, nous avons fait échouer le plan gaulliste visant à l’écrasement du mouvement ouvrier et démocratique.

« Nous avons soutenu et nous continuerons de soutenir l’idée qu’il faut remplacer la pouvoir gaulliste des monopoles par un gouvernement d’union démocratique issu, non de la subversion, mais de la volonté populaire clairement et démocratiquement exprimée. (...)

« J’ai reçu une lettre dans laquelle l’auteur soutient que le Parti communiste a eu tort de critiquer les groupes gauchistes et qu’il aurait fallu au contraire s’associer à eux.

« Je réponds que si notre Parti ne s’était pas désolidarisé des méthodes des groupes gauchistes et n’avait pas condamné nettement et publiquement leurs violences aveugles et inutiles, il aurait perdu beaucoup plus de suffrages sans parler du risque d’aventure sanglante. (...)

« Il faut porter le coup contre la phrase ultra-révolutionnaire et la démagogie petite-bourgeoise, le schématisme et le pédantisme, l’esprit doctrinaire qui prétend apppliquer mécaniquement à la situation française originale des procédés et des mots d’ordre intempestifs et déraisonnables. »


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