Le socialiste Rafael Correa, ami d’Hugo Chavez et d’Evo Morales fête sa victoire lors des élections présidentielles en Equateur

mercredi 29 avril 2009.
 

Après dépouillement lundi de 70% des bulletins, le président sortant Rafael Correa recueille 52% des suffrages, ce qui confirme les projections qui le donnaient élu dès le premier tour, et il garde 24 points d’avance sur son principal adversaire Lucio Guttierez. Avec une victoire de cette ampleur, Rafael Correa pourrait se targuer d’avoir changé la politique en Equateur.

S’il se confirme qu’il est élu dès le premier tour, Rafael Correa pourra mesurer le chemin parcouru en à peine un peu plus de deux ans. Car lors de la précédente élection présidentielle, ce jeune économiste antilibéral avait seulement conquis une deuxième place, avec moins de 23% des voix, et il ne l’avait emporté qu’à la faveur d’un second tour.

Mais c’est aussi pour cette raison qu’il a parlé d’événement historique : ce serait la première fois depuis le retour de la démocratie en Equateur, en 1979, qu’un candidat s’imposerait aussi nettement et sans nouvelle intervention des électeurs ; toutes les joutes présidentielles précédentes ont donné lieu à un second tour, faute de candidat suffisamment charismatique pour éviter un ballotage. En outre, la démocratie équatorienne est devenue particulièrement instable au cours de la dernière décennie, avec le passage à la magistrature suprême de pas moins de sept titulaires, dont trois se sont fait renverser par des mouvements de rue.

Ces deux ans de pouvoir ont permis à Rafael Correa de mettre au service d’une politique sociale tous azimuts les milliards de dollars provenant des revenus du pétrole. Il a ainsi relevé le salaire minimum et les retraites, réhabilité les écoles et les hôpitaux, financé la gratuité des repas dans les cantines scolaires, promu des programmes de logement social. S’il est ainsi relégitimé, il compte bien persévérer dans la voie de généreuses dépenses publiques, en s’appuyant sur la nouvelle constitution socialiste qu’il a fait adopter il y a six mois.

« La misère insultante »

La chute des cours de l’or noir pourrait pourtant briser son élan, tout comme à son allié Hugo Chavez. Un risque qu’il écarte d’un revers de main : les Equatoriens ont beau commencer à ressentir les effets de la crise, le FMI a beau prédire à ce pays pauvre une baisse de l’économie de 1,5 % en 2009, sans même parler d’un recours à l’emprunt rendu difficile par la décision de Rafael Correa d’annuler un tiers de sa dette internationale, ce président de 46 ans a prévu de faire baisser le chômage, aujourd’hui d’environ 9%, en s’engageant notamment dans un programme d’infrastructures routières. Il se veut plus « radical » encore contre ce qu’il a appelé « la misère insultante ».

Cette élection le confirme en tout cas : Rafael Correa jouit aujourd’hui en Equateur d’une cote de popularité inédite, qu’il doit non seulement à ses initiatives en faveur des plus pauvres, mais aussi à sa fermeté envers l’extérieur. Outre sa décision de ne pas reconnaître une partie de la dette de son pays, le président a ainsi exigé des compagnies pétrolières davantage de dividendes, et il a donné son congé à l’armée américaine qui, à partir de la base de Manta sur la côte Pacifique, menait des opérations de lutte contre le narcotrafic.

En remportant cette victoire électorale, Rafael Correa marque un nouveau point dans le camp des pays opposés au leadership de Washington dans la région. La coalition des présidents populistes de gauche conduits par le Vénézuélien Hugo Chavez s’en trouve renforcée. Toutefois, le chef de l’Etat équatorien semble avoir apprécié, lors du récent sommet de Trinité-et-Tobago, Barack Obama et le nouveau ton de la diplomatie de Washington envers ses voisins latino-américains.

Pour poursuivre son programme sans entraves de nature politique, Rafael Correa devra encore s’assurer, à l’issue du dépouillement en cours, qu’il dispose bien d’un solide appui au Parlement. Il en semble convaincu, mais les premiers chiffres contredisent cette vision optimiste. Si son parti, Alianza Pais, arrive bien en tête du scrutin législatif qui avait lieu également ce dimanche, il n’obtiendra vraisemblablement pas la majorité absolue. Gare alors aux autres partis qui, quoique divisés, pourraient se rassembler pour tenter de faire échec au « Socialisme du XXIe siècle » prôné par Rafael Correa !

par Michèle Gayral


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