19 septembre 2006 Coup d’Etat en Thailande, "allié majeur" des Etats Unis (lien vers 8 articles depuis 2006)

jeudi 22 septembre 2022.
 

Qu’ont fait le roi et les généraux thaïlandais après leur putsch ? un sondage pour bénéficier du soutien du monde médiatique ! Imaginez le sondé à peine réveillé qui voit les tanks dans la rue, allume le transistor et apprend que tout groupe (+ de 5) est interdit, 300 radios fermées.

Le téléphone sonne :"L’armée a pris le pouvoir. Vous approuvez, désapprouvez ou vous êtes sans opinion ?". Les médias du monde entier répercutent : "83,7% pour un putsch populaire".

Sondage ô combien scientifique. Verdict journalistique particulièrement déontologique. Diantre ! 16,7% ont-ils eu le courage de s’opposer ou est-ce encore un bidouillage de communication pour médias occidentaux ?

Dans la nuit du 19 au 20 septembre 2006, l’armée thaïlandaise a effectivement occupé Bangkok puis tout le pays. A 0h30, elle a informé la population par la télévision de sa prise du pouvoir et et de la loi martiale. Le gouvernement est remplacé par un "Conseil pour la réforme démocratique" composé des généraux en chef des armées de terre, air, mer, police.

Une fois acquis son sondage auprès d’un échantillon représentatif, la junte a poursuivi son travail de communication. Sonthi Boonyaratkalin, chef de l’armée, a justifié son putsch dans les médias :

1) Le premier ministre déchu aurait "insulté" le roi

Dans un pays où près de la moitié de la population vit dans des zones rurales marquées par des caractéristiques sociales et idéologiques moyennageuses, il s’agit là d’un bon "angle" de communication. Les relations entre le roi (protecteur des intérêts économiques et financiers de l’armée et des féodaux locaux) et le premier ministre Thaksin (lié au capitalisme financier international) étaient effectivement devenues difficiles.

2) L’ancien premier ministre serait responsable d’"une corruption répandue et du népotisme"

Ce sont surtout le roi et l’armée qui mériteraient ce reproche depuis 60 ans. Mais Thaksin marchait de plus en plus sur leur plate-bande, plaçant ses proches (35 en un an à la tête d’unités militaires) et les enrichissant (aéroport de Bangkok).

3) L’ancien premier ministre aurait "provoqué un clivage sans précédent dans la société"

Les militaires font encore preuve de sens de la communication avec cet argument. En effet, d’immenses mobilisations de masse se déroulaient dans la capitale depuis janvier 2006, date où la population avait appris le gain par Thaksin de deux milliards sans débourser un centime d’impôt.

4) Les militaires s’affirment sujets loyaux du roi

En se montrant devant les caméras, agenouillés au pied du monarque, les 4 généraux félons ont signé leur acte politique réactionnaire.

Le roi Bhumibol a immédiatement avalisé le putsch. Il est vrai qu’il appartient à une dynastie déjà fondée en 1782 sur un coup d’Etat et le meurtre de tous les dignitaires. Il est vrai qu’il a lui-même vécu 17 coups d’Etat militaires depuis son entrée en fonctions en 1946 et son alliance privilégiée américaine.

5) Quelle allait être la réaction du grand allié américain ?

On ne peut nier les différences d’intérêt entre :

- d’une part le capitalisme financier transnational rêvant de piller les ressources naturelles du pays tout en laissant les "citoyens" voter sur la largeur des rues et gober la communication locale.

- d’autre part la dictature monarcho-militaire nationaliste, fondée sur des partages de profits entre clans locaux.

Pour cette raison et par souci de leur image internationale, "Les Etats-Unis continuent de demander un retour rapide à la démocratie et des élections en Thaïlande" ( déclaration d’un porte-parole de la Maison Blanche). Par ailleurs, les USA ont gelé 18,8 millions d’euros de programmes militaires ; c’est peu, en comparaison des sommes qu’ils investissent chaque année dans ce pays.

Comme dans les années 1960-1974, les USA paraissent à nouveau préférer dans le Sud-Est asiatique des dictatures militaires aux aléas des élections.

Jacques Serieys

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