Japon : les électeurs déçus se détournent du Parti Démocrate (article national du PG)

mercredi 21 juillet 2010.
 

L’engouement populaire né de l’élection de Yukio Hatoyama (Parti Démocrate du Japon, PDJ) l’été dernier a fait long feu. Après cinquante ans de règne quasi ininterrompu de la droite japonaise, l’accession du PDJ au pouvoir avait suscité de grands espoirs dans la population. Or, après seulement dix mois aux commandes du pays, ce parti de centre-gauche a suscité déception sur déception chez les travailleurs Japonais.

Nombreux sont ceux qui se sont ainsi détournés du PDJ, qui n’a pas réussi à obtenir la majorité absolue au Sénat lors des élections partielles qui se sont tenues le 11 juillet dernier. Bien que premier parti de la chambre haute et détenteur de la majorité absolue à la chambre basse, le Parti Démocrate va se voir dans l’obligation de contracter des alliances au cas par cas sur les différents projets de loi, ce qui risque de freiner radicalement le train de leurs réformes.

Pourquoi les électeurs ont-ils ainsi lié les mains du parti qu’ils avaient plébiscité en août 2009 ?

L’un des sujets sur lesquels l’ancien Premier Ministre PDJ Yukio Hatoyama a été le plus attaqué est l’affaire des bases militaires américaines sur l’île d’Okinawa. Ce dossier est même l’une des principales raisons de sa démission, en juin dernier, en faveur de Naoto Kan, son ministre des finances. Le programme du PDJ mentionnait une volonté d’établir des rapports plus équilibrés avec les Etats-Unis qui, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, influent fortement sur la diplomatie japonaise. Certes, Hatoyama a retiré ses troupes qui participaient aux opérations l’OTAN en Afghanistan. Cependant, sa faiblesse face aux pressions américaines concernant la relocalisation de la base de Futenma a jeté un discrédit sur la volonté qu’aurait le PDJ de véritablement appliquer un programme de paix et de transformation sociale.

La cote d’impopularité d’Hatoyama a atteint des sommets lorsque son nom ainsi que celui de son bras droit Ichiro Ozawa ont été éclaboussés dans une affaire de financement occulte du PDJ, alors même que la transparence était brandie comme valeur centrale de leur programme.

Yukio Hatoyama n’est pourtant pas le seul responsable de la défaite de son parti. Naoto Kan a également suscité une méfiance de la population face au plan de réduction du déficit budgétaire qu’il a élaboré en tant que ministre des finances d’Hatoyama et actuellement dans ses fonctions de nouveau Premier Ministre. Le PDJ avait été amené au pouvoir grâce au soutien des syndicats, des couches populaires, des travailleurs car il était porteur d’un espoir d’une société plus juste et d’une alternative au néolibéralisme. Or, le projet d’augmentation des taxes à la consommation et de coupes budgétaires présenté par Naoto Kan fragilisera davantage les plus pauvres auxquels on demande de se serrer la ceinture pour éviter la catastrophe grecque, agitée comme un épouvantail jusqu’aux confins de l’Asie.

Le décalage entre le programme annoncé comme social et les mesures néolibérales de fait du parti au pouvoir au Japon n’est pas sans rappeller la situation en Grèce, il est vrai. Or, ce qui devrait effrayer Naoto Kan n’est pas la situation financière de la Grèce mais bien la rage de son peuple contre un gouvernement qui l’a trahi.

Agathe Nougaret


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