Gaz de schiste : le nouveau combat des écologistes

dimanche 2 janvier 2011.
 

Aux Etat-Unis, le gaz de schiste est exploité depuis déjà dix ans. Ils sont devenus les premiers producteurs du monde de gaz devant la Russie, transformant parfois leurs paysages en gruyère.

Le bruit est descendu du plateau du Larzac, il a dévalé les flancs du causse, franchi la Dourbie et puis, de vallée en vallée, il a traversé les campagnes cévenoles, l’Ardèche et la Drôme, si bien que, le 20 décembre, ils étaient plus de trois cents à envahir la petite salle polyvalente de Saint-Jean-du-Bruel, en Aveyron. Paysans, militants, épiciers ou élus des communes alentour sont venus chercher des éclaircissements face à cette nouvelle menace qui plane aujourd’hui sur leurs têtes : le gaz de schiste.

Trois petites signatures du ministre de l’époque, Jean-Louis Borloo, pourtant déclaré champion des énergies renouvelables, au bas d’arrêtés autorisant début mars 2010 la recherche de ces hydrocarbures sur de vastes territoires du sud-est, auront suffi à mettre le feu aux poudres.

Le gaz de schiste ? Du gaz naturel qui, contrairement à celui que l’on extrait en général, comme à Lacq, ne se trouve pas concentré au sein de vastes poches souterraines où il suffit d’aller le pomper, mais disséminé dans les argiles très compactes datant du lias (200 millions d’années) ou du carbonifère (350 millions d’années). Longtemps sa capture a semblé un rêve compliqué ou trop onéreux mais la raréfaction des réserves en hydrocarbures a poussé les ingénieurs à forcer le destin.

QU’IMPORTE LA GUEULE DE BOIS !

Le principe est simple : après avoir foré verticalement, on pénètre horizontalement les schistes, dans lesquels on envoie à forte pression des millions de litres d’eau et de sable pour ouvrir la roche d’où l’on va extraire le gaz.

On appelle cela la " fracturation hydraulique ". Et cette technologie est la clé à la fois géniale et monstrueuse d’une révolution énergétique : " On estimait jusqu’à présent qu’on avait du pétrole pour quarante ans et du gaz pour soixante ans. On se projetait déjà dans une société post-énergies fossiles, expliquait dans les colonnes du "Monde" du 30 juillet 2010 le PDG de GDF-Suez, Gérard Mestrallet. Si l’on a du gaz pour plus de cent vingt ans, alors il pourrait devenir l’énergie centrale et propre du XXIe siècle."

Centrale, sans doute ; propre, seulement si on compare le gaz avec le charbon. La perspective de ce nouvel eldorado est en fait l’assurance que le monde va oublier toutes ses bonnes résolutions sur les émissions de gaz à effet de serre. Qu’importe la gueule de bois pourvu qu’on ait l’ivresse ! Voici déjà dix ans que les Etats-Unis se sont lancés dans l’aventure. En 2009, ils sont devenus grâce à cela le premier producteur mondial de gaz devant la Russie... transformant au passage leur pays en gruyère. Car chaque puits ne peut supporter guère plus d’une quinzaine de fracturations par forage, d’où ces images incroyables de vastes étendues de terres transformées en taupinières... et zébrées de routes pour que les camions puissent par centaines acheminer l’eau ou emporter le gaz.

Mais il y a pire. Car, pour casser la roche et laisser ensuite filtrer le gaz, les industriels ont mis dans leurs tuyaux – traversant terres arables et nappes phréatiques – des adjuvants chimiques. Et le résultat est effrayant. Josh Fox était metteur en scène de théâtre lorsque les industriels sont venus proposer à son père et à ses voisins de Pennsylvanie de creuser leurs terres en quête de cette nouvelle manne. Pour comprendre, il a pris une caméra et parcouru les Etats-Unis d’est en ouest et du nord au sud, collectant les témoignages. Le résultat est saisissant.

Primé lors du célèbre festival américain de cinéma de Sundance, le documentaire, Gasland, sort cette semaine en Grande-Bretagne. On y voit un homme qui, en plaçant simplement un briquet devant le robinet de son évier, déclenche une grande flamme lorsque, entre deux arrivées d’eau, du gaz s’en échappe... On y découvre des terres dévastées, des eaux empoisonnées, des gens malades. Car la plus grande opacité règne sur les adjuvants que les ingénieurs pétroliers ont mis dans leur cocktail hydraulique : ils répugnent à en donner la recette, se barricadant derrière le "secret industriel ". Au point qu’en 2010, l’Etat de New York s’est prononcé pour un moratoire arrêtant tout type d’exploration du gaz de schiste.

UN RASSEMBLEMENT DE PRÊTS-À-EN-DÉCOUDRE

Au pied du Larzac, la salle des fêtes de Saint-Jean-du-Bruel est archicomble. De mémoire de militant, cela faisait longtemps qu’on n’avait vu un tel rassemblement de prêts-à-en-découdre. "Geler les autorisations de prospection est un préalable ; le moratoire, un minimum : on stoppe tout parce qu’on ne sait rien ! ", martèle l’orateur. Une sorte de ferveur flotte dans l’air. De celles, solennelles, qui précèdent les combats, teintées de détermination, d’angoisse et de plaisir d’être à nouveau ensemble. Un gars d’Alès prend la parole : " Oui pour une action non violente... mais déterminée. La dernière fois, pour le barrage, on a quand même dû brûler quelques bulldozers. " Applaudissements.

Des manifestants réclament un moratoire sur l’exploration du gaz de schiste, à Saint-Hyacinthe au Québec, en septembre 2010.

Des manifestants réclament un moratoire sur l’exploration du gaz de schiste, à Saint-Hyacinthe au Québec, en septembre 2010.AFP

Caussenards, cévenols, ils sont tous venus à l’appel de Jean-Marie Juanaberria, 50 vaches allaitantes, enfant du pays et d’un père basque, carrure de rugbyman, qui a convoqué la réunion. Le boulanger et l’épicier sont descendus de Sauclières. Le patron de la conserverie de pâté a glissé son obole dans la caisse commune. Les spéléologues, la société de pêche, la Confédération paysanne, chacun y va de son inquiétude et de sa détermination. Et le maire de Nant – qui en est aussi le garagiste – exprime en privé son indignation.

Il a eu beau appeler la préfecture et la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, il n’a reçu aucune réponse : " Quand vous êtes un élu, que les gens vous posent des questions et que vous ne savez rien, vous passez pour un incapable, et ça – comment dire ? – c’est très désagréable. " Déjà on lance l’idée de monter une coordination – " Ici et maintenant " – ; d’organiser un jumelage avec une de ces villes de la vallée du Saint-Laurent au Québec en proie à la même menace et à la même mobilisation, ou avec les Indiens de l’Equateur qui refusent qu’on puise le pétrole qui dort sous leurs pieds. "Parce qu’une technique est possible, parce qu’elle est utilisable, doit-on pour autant l’utiliser ?, demande José Bové à l’assemblée. On nous dit que nos besoins en gaz vont doubler dans les vingt ans à venir : une manière d’imposer un choix énergétique en disant qu’on n’a pas le choix. Mais si on continue de raisonner uniquement en termes de croissance, on ne s’en sortira jamais... "

LE POURFENDEUR DE LA MALBOUFFE EST ICI CHEZ LUI...

L’homme du Larzac, l’alter-paysan, le pourfendeur de la malbouffe, l’arracheur volontaire d’OGM, est ici chez lui... Et cette histoire de gaz de schiste a de quoi le piquer au vif. Aussi, pourquoi avoir choisi ces hautes terres de révolte pour lancer en France leur exploration ? Par le plus grand des hasards, parce que c’est là qu’il y a le plus d’espoir de trouver des réserves importantes ? Bêtement, parce qu’elles sont moins peuplées que d’autres ? Ou, comme le fantasment certains, parce que le camp militaire doit justement fermer dans deux ans et qu’utiliser ses sous-sols top secret à l’abri des regards pourrait être une sacrée opportunité ?

De chez José Bové – qui a cessé l’élevage depuis qu’il est devenu député européen –, le regard embrasse à perte de vue les terres grandioses et désolées des causses. "Les hydrogéologues le disent : le Larzac est le château d’eau du sud de la France. C’est un sous-sol très mal connu, un relief karstique qui est comme un gruyère, tout ce que tu laisses tomber par terre descend immédiatement dans le sous-sol... Je ne vois pas comment on pourrait faire ainsi péter nos ressources en eau. "

L’homme est calme et attentif. Il remplit sa bouffarde, fermant à moitié son œil droit pour concentrer son attention sur un véhicule qui longe le camp en contrebas. " La campagne, c’est le lieu le moins discret qui soit. La première estafette ou bagnole un peu bizarre qui passe, les gars seront prévenus. Un truc qui arrive de l’extérieur en milieu rural, cela se sait immédiatement. On l’a vu pour les OGM, on les a toujours trouvés. Il y a toujours quelqu’un qui savait, prévenait... "

"C’est marrant parce que tout cela arrive quarante ans quasiment jour pour jour après l’annonce de l’extension du camp militaire du Larzac à l’automne 1970. Et rien ne semble avoir changé depuis dans le fonctionnement de l’Etat, poursuit-il. A l’époque, les gens avaient appris du jour au lendemain qu’ils allaient devoir partir sans que jamais on ne les ait consultés. Aujourd’hui, si quelques journalistes et personnes à l’affût n’avaient donné l’alerte, on se retrouverait avec des forages un peu partout sans pouvoir rien y faire. Même chose avec les OGM : l’autorisation de mise en culture s’est faite en novembre 1997 sans aucun débat... Les gens vont dire : c’est Borloo ou c’est Sarkozy, mais je suis persuadé que le premier n’a pas compris ce qu’il signait et que le second ne sait même pas de quoi nous parlons... Enfin pas encore. Nous sommes aux mains d’une logique administrative quasi autonome. Il n’y a eu aucun débat public ni même, à ma connaissance, de discussion interministérielle sur la question. On se retrouve devant le fait accompli par la grâce des arcanes de l’administration. "

Grande arche de la Défense. Paroi nord. 29e étage. Bureau 25,6 m2 au sol. Une photo du général de Gaulle épinglée au mur, une Marianne de Delacroix franchissant les barricades au-dessus de l’ordinateur. C’est ici que, le 8 avril 2008, Martin Schuepbach – l’homme par qui le scandale arrive –, patron de Schuepbach Energy LLC, " Explorations and solutions in clean energy ", est venu de Dallas (Texas) déposer la première demande de permis d’exploration sur le bureau de Charles Lamiraux, géologue de formation, " Responsable exploration France " à la direction générale de l’énergie et du climat.

"À LA FRANÇAISE "

Ce dernier s’insurge : " On est dans l’émotionnel absolu sans base concrète. Il n’y a pas plus transparent que ces procédures officielles : après le dépôt de la demande, il y a eu rapport de la Drire [la direction régionale de l’industrie et de la recherche et de l’environnement], consultation des services locaux, du préfet de la Drôme, qui était préfet centralisateur pour les trois dossiers de Montélimar, Nant et Villeneuve-de-Berg. Jugées recevables sur la forme, les demandes ont été ouvertes à la concurrence pendant 90 jours, au dernier desquels Total s’est mis sur les rangs. Pour montrer sa solvabilité, M. Schuepbach s’est associé à Suez, et Total a obtenu le permis de Montélimar... José Bové, de toute façon, il est contre tout. Il faut qu’il fasse parler de lui, alors forcément... "

Drôle d’homme, cheveux gris, mi-longs et raides tirés en arrière, sincère et courtois, Charles Lamiraux se régale. " Je suis à quatre ans de la retraite. Une vie de travail dans l’ombre et là, d’un seul coup, je me retrouve au milieu d’une révolution énergétique qui bat en brèche une idée reçue : en France on n’a pas de pétrole. J’avoue que c’est excitant. " Sur un petit carnet à spirale, il a commencé de noter ses arguments afin de ne pas être pris au dépourvu. Un forage va utiliser 15 millions de litres d’eau pour fracturer la roche ? "Les Français en dépensent deux fois plus chaque année pour laver leurs voitures." Les nuisances environnementales ? "La fracturation hydraulique, on la pratique déjà. Et je peux vous assurer qu’en surface on ne voit rien, on n’entend rien." La composition des additifs qui seront utilisés dans les sous-sols ? "Des proppants – des adjuvants qu’on trouve dans les glaces et le dentifrice."

Les informations qui nous viennent des Etats-Unis, le gaz dans les robinets, les eaux empoisonnées ? "C’est parce que c’est mal fait. Nous on va faire ça à la française, pas à l’américaine." C’est donc ça, notre secret : nous travaillons "à la française". On aimerait être rassuré. Le problème c’est que les techniques de fracturation sont loin d’être une spécialité locale. Au point que Total a jugé nécessaire, pour se mettre dans la course, de créer un joint-venture avec une grosse société américaine, Chesapeake energy, pionnière dans le secteur, et que GDF-Suez a fait appel aux services d’une autre compagnie made in USA, Dale.

"IRRESPONSABILITÉ POLITIQUE"

Bah, on ne va pas jouer les rabat-joie. Depuis l’Arche de la Défense, le ciel semble limpide et les solutions droites comme les couloirs de l’administration de l’énergie. " Peut-être qu’on pourra même créer un label de qualité !, sourit le bon soldat Lamiraux avant d’ajouter, mi-naïf, mi-facétieux : L’accès aux matières premières est une priorité de l’Union européenne, et je suis payé pour promouvoir la ressource. Mais ça va, j’ai la santé... Et puis les vraies décisions industrielles, avec enquêtes publiques – ça c’est de l’artillerie lourde –, viendront plus tard. Dans cinq ans. Pour l’instant, je vous le répète, on n’en est qu’au stade de l’exploration. "

"On ne me fera pas croire qu’une telle information ne remonte pas au ministre ! La vérité c’est qu’ils ont fait ça dans la discrétion parce qu’ils avaient peur de mettre le feu aux poudres." Fabrice Nicolino est journaliste et écrivain. Sur son blog, Planète sans visa, il pourfend les ennemis de la nature et tient la comptabilité précise de ces petits mensonges quotidiens qui cachent la vérité environnementale. C’est lui qui a alerté José Bové lorsqu’il a découvert l’existence des permis d’exploration de gaz de schiste. "Un cas de flagrant délit d’irresponsabilité politique. Face à la crise climatique, la France a voulu donner des leçons au monde entier. Ce qui a abouti à la loi du 13 juillet 2005 sur l’énergie qui implique que nous réduisions par quatre sinon par cinq nos émissions d’ici à 2050. Là c’est machine arrière toute ! Avec le gaz de schiste, la loi ne sera pas seulement violée, elle sera un bout de papier au fond d’une poubelle..."

Car il n’y a pas que les causses ou les Cévennes dans la mire des pétroliers. Des permis d’exploration pour le Quercy – Cahors, Brive, Agen –, pour la région Rhône-Alpes et la Provence sont en préparation. Le bassin parisien lui-même est depuis longtemps dans la cible. Non pas cette fois pour du gaz mais pour du pétrole de schiste (la technique et les conséquences sont les mêmes). Une étude de l’Institut français du pétrole estime en effet que ses sous-sols en recèleraient quelque 60 à 100 milliards de barils. Soit, dans sa fourchette haute, le montant actuel des réserves prouvées du Koweït. Suffisamment en tout cas pour que Julien Balkany, le jeune frère du maire de Levallois, ait persuadé le groupe texan Toreador resources, dont il est devenu vice-président, d’installer son siège à Paris, et des investisseurs américains comme le pétrolier Hess d’investir des millions de dollars pour partir à la chasse au trésor.

Suffisamment pour que, au moment même où la révolte commence à gronder dans le midi, à l’Assemblée, le député UMP de l’Oise François-Michel Gonnot pose une question au gouvernement : "Aujourd’hui, les demandes de permis de recherche de gisements se multiplient en France. Le gouvernement se doit de les autoriser. Il n’y a pas de raison que la France se prive d’éventuels gisements qui lui permettraient de trouver des ressources gazières nouvelles dont notre territoire manque cruellement." Suffisamment pour que, partout en Europe, les lobbies s’agitent pour soutenir cette "énergie du futur" dont on vante forcément l’aspect "propre" et "alternatif ". Au Parlement européen, les élus verts ont ainsi failli laisser passer sans comprendre une proposition de délégués – principalement polonais, dont le pays est en première ligne dans l’exploration de gaz de schiste – appelant la commission à "soutenir financièrement les programmes de recherche pertinents visant à renforcer les activités de développement technologique portant sur l’extraction de gaz naturel à partir de sources alternatives". Les grandes manœuvres ont commencé.

"C’EST ENCORE PRÉMATURÉ "

On peut toujours penser que personne n’a sérieusement envie de transformer les vignobles champenois en terre à derricks et qu’au fond ces nouvelles réserves d’hydrocarbures sont d’abord le moteur d’une revalorisation spéculative des entreprises pétrolières – je suis assis sur tant de millions de barils, donc je vaux tant. En attendant, rachats et acquisitions, investissements, prises de participations, permis d’exploration à tout-va : un grand Yalta planétaire des couches sédimentaires du lias et du carbonifère est en marche. La question n’est déjà plus de savoir si on va les exploiter, mais où elles seront exploitées.

Chez Total – qui, avec le permis de Montélimar, a conquis des droits pour cinq ans sur une large portion du territoire français –, on avoue être un peu pris de court par la levée de boucliers de Saint-Jean-du-Bruel. "Tout ça est très prématuré. Nous, nous en sommes encore à nous demander si c’est seulement un sujet, sourit off the record un de ses spécialistes. Il n’est même pas encore prouvé que nous trouvions du gaz... Et si c’est le cas, il faudra encore prouver que son extraction est économiquement rentable. Après, oui, la question de son acceptation par les populations locales va devenir la question-clé. Et elle va demander une pédagogie que nous n’avons pas encore déployée."

L’acceptabilité sociale des forages est en effet fondamentale dans une Europe densément peuplée et qui, au fond, ne regroupe que 5 % des ressources mondiales estimées en gaz de schiste. Pour Total, fouiller les schistes argentins du Neuquen – où la question sociale serait marginale – est beaucoup plus simple qu’affronter l’ire des populations françaises si tel était le cas. Les zones du Larzac et des Cévennes – attribuées à Schuepbach et GDF-Suez – font en l’occurrence office de tests : si cela passe ici, cela passera partout en France.

A Saint-Jean-du-Bruel, alors que dehors la gelée de l’hiver rigoureux a recouvert les routes, José Bové tente, dans la salle polyvalente surchauffée, de faire descendre un peu la fièvre militante : " Eh les gars, si vous voyez des gens de GDF, avant de leur crever les pneus, demandez-leur d’abord pourquoi ils sont là. "

Laurent Carpentier


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