Colloque du Centre de recherches politiques de Science Po (Cevipof) sur les sondages dans la campagne pré-présidentielle

mardi 15 septembre 2020.
Source : Marianne
 

Sondages : la part d’ombre

...La question majeure qui est posée aux sondés est : qui peut gagner ?

Les sondés ne parlent donc pas de leurs préférences en terme de programme ou de personne, mais en terme de projection. François Cornut-Gentille, ancien de la Sofres, député UMP non sarkozyste, poursuit : « ces sondages ne servent pas à connaître l’opinion, mais servent, à Ségolène Royal dans son camp et à Nicolas Sarkozy dans le sien, à marginaliser leurs concurrents. »

Tous ceux qui, à l’intérieur de leurs partis, les attaquent sont taxés aussitôt, chiffres à l’appui, de faire jouer la fameuse « machine à perdre ». Et Jérôme Jaffré de mettre l’accent sur les questions qu’on ne pose pas : « Qui ne voudriez-vous pas voir élu ? » ou encore « Préfèreriez-vous ne voter ni pour Ségolène Royal, ni pour Nicolas Sarkozy ? » Questions plus que pertinentes dans une société où la désaffection du politique croise la montée des extrêmes.

Les sondages, une drogue dure pour journalistes ?

« Que ce soit une drogue dure ou une drogue douce, le sondage est en tout cas une drogue hallucinogène et irrésistible », confie Gérard Courtois, directeur des rédactions du Monde. Un bel aveu, qui n’empêche pas les médias, à commencer par le sien, de s’y accrocher, d’en disserter, d’en publier et d’en commander chaque jour. Il est donc bien placé pour parler de la « schizophrénie journalistique » qui veut que le journaliste boive à la coupe de la science sondagière à satiété, tout en s’en défiant comme d’un poison mortel.

Cette schizophrénie ne touche d’ailleurs pas que les détenteurs de carte de presse. Très vite, la rencontre organisée par le Centre de recherches politiques de Science Po (Cevipof), lundi 16 octobre, s’est mise à ressembler à un forum expiatoire de tous ceux qui font, usent et commentent les chiffres de l’élection présidentielle à venir.

Piqûre de rappel

Daniel Boy, directeur de recherche au Cevipof, a commencé très benoîtement par une analyse des sondages réalisés entre février et avril 2002. Evidemment, après-coup, les « intentions de vote » apparaissent comme des fantaisies à mille lieux du résultat final. En creusant un peu plus, on voit évoluer les « petits candidats » au fil de la campagne. Les nouveaux entrants sur la scène politique, comme Christiane Taubira ou Olivier Besancenot, se sont fait connaître, ont naturellement gagné des points et fait évolué leur score. Mais ce qui choque vraiment au terme du travail du chercheur, c’est l’énorme surestimation de la gauche (+10% par rapport à l’élection, tous partis de gauche confondus) et la sous-estimation non moins grande de l’extrême droite (-10% par rapport à l’élection).

« Les sondeurs peinent à cerner le vote Le Pen pour deux raisons : la première c’est qu’ils touchent difficilement les classes les moins diplômées, la seconde c’est qu’il est souvent difficile, aux personnes interrogées, de dire qu’elles votent Le Pen. » Jusque-là, rien de nouveau. Et pour la gauche ? On ne sait pas trop, mais on s’est aperçus que « les gens de gauche se prêtent plus facilement à l’exercice du sondage ». Bon, très bien, mais qu’est-ce que ce constat d’échec nous dit des chiffres actuels ?

Selon une étude du Cevipof réalisée sur 5600 personnes : 67% des gens « ne font confiance ni à la droite, ni à la gauche pour gouverner ». La question du « troisième homme », incarné à la fois par François Bayrou et Jean-Marie Le Pen, a donc longuement fait parler sondeurs et chercheurs sans, pourtant, aucun chiffre à l’appui !

Mardi 17 Octobre 2006

Anna Borrel


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