Nicolas Sarkozy et la tentation d’osmose entre la droite et l’extrême droite (par Alain Ruscio, historien)

mardi 24 août 2010.
 

Quel regard portez-vous sur la chasse faite aux Roms et gens du voyage  ?

Alain Ruscio. Habitué à observer le racisme à la française, pour moi cette chasse n’est pas une surprise. Cette pratique est très ancienne notamment à l’époque coloniale. Ces méthodes se sont d’ailleurs également appliquées 
au cours du XXe siècle aux Polonais et aux Italiens. Les classes dirigeantes les ont toujours utilisées soit pour rediriger l’inquiétude populaire vers « l’étranger », soit par conviction. C’est une permanence dans l’histoire de la société française qui, par ailleurs, a souvent atteint son but. D’où la nécessité que 
les associations, les partis politiques et les citoyens se mobilisent pour combattre le climat actuel et que 
la population ne morde pas 
à l’hameçon tendu par le pouvoir.

Peut-on parler de xénophobie d’État  ?

Alain Ruscio. Tout à fait mais 
le phénomène n’est pas récent. 
Au début des années quatre-vingts, Valérie Giscard d’Estaing signait déjà un article dans le Figaro Magazine sur « l’invasion étrangère » où figurait en couverture une Marianne recouverte d’une voile islamique. Je pense également 
au discours de Chirac sur « le bruit et les odeurs ». Incontestablement, 
il existe une convergence de pratiques et positions de l’État 
et de la droite dans ce domaine qui s’est accéléré toutefois depuis Nicolas Sarkozy. Il y a un aspect stratégique et tactique qui vise 
à dresser des passerelles entre 
la droite et son extrême. De plus 
en plus d’élus UMP tiennent 
le discours du FN par exemple sur 
le thème de la réhabilitation 
de « l’œuvre coloniale » de la France, les « Français de souche » ou les « racines chrétiennes » de notre pays. Il y a ici une « vieille » tentative d’osmose entre la droite et l’extrême droite. À nous d’y être attentifs.

Entretien réalisé 
par Lionel Decottignies


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