Une nouvelle réforme confortant la libéralisation de l’agriculture

jeudi 20 octobre 2011.
 

La Commission européenne a rendu public mercredi 12 octobre ses propositions législatives pour la PAC 2014-2020 destinées au parlement européen et au conseil.

Cette réforme s’inscrit pleinement dans le processus actuel de libéralisation des marchés, en vue de favoriser la "compétitivité" de l’agriculture européenne, terme d’ailleurs mentionné à maintes reprises par le commissaire Dacian Ciolos lors de la présentation des propositions de la Commission.

Elle ne remet pas en cause un système d’aides européennes qui accentue les différentiels de productivité entre exploitations et entre actifs agricoles, au lieu de les compenser et de favoriser l’emploi, comme le feraient des aides ciblées et liées au nombre d’actifs. La réforme annoncée confirmerait ainsi le rôle déterminant de la PAC dans la concentration de la production dans un nombre de plus en plus limité d’exploitations et dans l’effondrement du nombre d’emplois agricoles en France et en Europe.

Des centaines de milliers d’agriculteurs français et européens devront ainsi s’attendre à continuer à vivre dans la précarité, ou à la rejoindre, faute d’ être "compétitifs" et à devoir céder tôt ou tard leur exploitation à plus "compétitif" qu’eux.

Par rapport à la PAC actuelle, certaines propositions de la Commission vont dans le bon sens, comme le plafonnement et la dégressivité des aides de la PAC, la diminution des différences entre les aides à l’hectare au niveau européen et entre exploitations d’une même région, la généralisation de certaines exigences favorables à l’environnement (présence de surfaces à vocation écologique, maintien des prairies permanentes, diversité de cultures).

Toutefois, l’effet de la dégressivité des aides est fortement atténué du fait que les réductions de primes sont effectuées sur des montants calculés après déduction des salaires et cotisations sociales. Ainsi, la PAC financera l’intégralité des salaires et cotisations sociales des salariés des agriculteurs touchant plus de 300 000 euros de primes. Par contre les agriculteurs qui ont un salarié et touchent moins de 150 000 euros de prime PAC n’obtiennent aucun avantage de l’emploi d’un salarié !

De plus, le plafonnement est non seulement à un niveau très élevé, mais, de plus, en sont exclues les aides environnementales du 1er pilier (soit 30% des aides). En fait, le plafonnement est donc en réalité à 450.000 Euros.

Par ailleurs, malgré le "verdissement" de certaines aides, la réforme annoncée ne permettra par ailleurs pas à la PAC d’organiser la nécessaire transition écologique de l’agriculture. En effet :

- d’une part, le processus même de libéralisation constitue un formidable encouragement à des modes de production de plus en plus consommateurs d’énergie, néfastes pour l’environnement et tournant le dos aux grands défis écologiques de l’humanité,

- d’autre part, le "verdissement" annoncé des aides est largement insuffisant pour encourager une véritable transformation des modes de production. Significatif, les aides nationales spécifiques aux cultures de protéines végétales ne seront autorisées que dans la mesure où l’objectif ne serait que de maintenir le niveau des surfaces actuelles. On est donc loin de la reconquête de l’indépendance protéique de l’Europe qui continuera à importer massivement du soja d’Amérique du Sud, au détriment des populations locales et de l’environnement... pour nourrir des élevages européens engagés dans une course folle à la "compétitivité" aux dépens là aussi de l’environnement !

Le Front de Gauche s’opposera à une telle réforme. Il est favorable à une véritable réforme de la PAC basée sur le principe de souveraineté alimentaire, garantissant des prix rémunérateurs aux producteurs, ciblant les aides sur des objectifs spécifiques (emploi, zones à difficultés, transition écologique de l’agriculture). Une telle réforme est incompatible avec les objectifs du Traité de Lisbonne centrés sur l’obsession de la "compétitivité" et sur la concurrence libre et non faussée.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message