Les gauches française et allemande à l’attaque contre le modèle d’austérité de Merkel

lundi 12 décembre 2011.
 

Elles ont présenté un projet de loi conjoint contre le modèle d’austérité de Merkel

Les gauches française et allemande ont décidé de passer à l’attaque cette semaine face aux multiples déclarations de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel concernant une convergence supposée entre leurs pays comme base pour un projet d’Europe de l’austèrité. Face à un président français qui est allé jusqu’à affirmer que " tout mon travail consiste à mener la France vers un système qui fonctionne, celui de l’Allemagne " le Front de Gauche français a mis ses économistes au travail pour analyser le mythe allemand, en démontrant qu’il produit de l’inégalité, du chômage, de l’appauvrissement et peu de croissance.

Il y a dix jours, le candidat présidentiel du Front de Gauche français, Jean-Luc Mélenchon, a démonté dans le journal Les Echos le mythe d’une Allemagne prospère. Entre-temps, le Front de Gauche et Die Linke en Allemagne ont présenté conjointement un projet de loi contre l’austérité devant l’Assemblée Nationale française et le Bundestag allemand. Le projet arrivera cette semaine à la chambre tchèque et plusieurs forces de la gauche grecque étudient leur démarche.

Le Front de Gauche français a démonté le mythe allemand

Les français sont-ils fascinés par un hypothétique miracle allemand ? En réalité, selon un sondage de l’Institut Ifop, même les allemands ne le sont pas : 53% jugent insuffisant son système de protection sociale, 64% pensent que l’éducation et la santé ne fonctionnent pas bien et 67% estiment qu’il n’est même pas sûr qu’ils arrivent à percevoir les pensions de retraite qu’on leur doit.

La tribune de Mélenchon est venue résumer une analyse différente sur le supposé miracle allemand : L’Allemagne attire beaucoup moins d’investissement étranger direct que la France (plus d’un milliard de dollars face à 674M), elle a plus de dette (83.2% du PIB face à 81.7%), et dans l’ensemble, dans la dernière décennie, sa croissance a été moindre, pendant la phase aiguë de la crise elle est entrée dans une dépression beaucoup plus profonde et possède des niveaux de pauvreté, spécialement parmi les jeunes, qui seraient insupportables pour la structure sociale française. " Pouvons-nous importer le modèle allemand ? Non ! La démographie allemande est très différente de celle de la France. Le taux de fécondité allemande est la moitié de celui de la France. Depuis 30 ans, il y a davantage de décès que des naissances de l’autre côté du Rhin et le pays, par conséquent, se voit obliger à privilégier une économie de revenu. La France a un besoin vital d’activité. D’ici 2060, la population allemande passera de 82 à 65 millions d’habitants. Celle de la France passera de 65 à 73 millions ", écrit-il.

En outre, le Front de Gauche ajoute une autre objection au mythe allemand. « Outre le fait qu’il est impossible de transposer le modèle allemand, est-il réellement désirable de le faire ? » écrit Mélenchon. « 20% des salariés sont des travailleurs pauvres ».

En Allemagne, 1,5 millions chômeurs ont disparu des statistiques

D’autre part, et c’est l’avant-dernier secret du miracle Merkel, l’hypothétique 6% de chômage officiel en Allemagne cache une réalité beaucoup moins glorieuse. À cause des lois de restriction de droits sociaux, 1,5 millions de chômeurs ont disparu des statistiques. En septembre dernier, 200.000 autres ont été effacés et le Ministère du Travail allemand a dû reconnaître que 57% des chômeurs de plus de 55 ans ne sont pas comptabilisés.

L’économie allemande est en effet une mécanique exportatrice, mais au prix de la dévaluation de sa propre main d’œuvre et de la transformation des autres pays européens (destinataires de 65% de ses exportations) en réceptacles de produits dont seulement 16% sont de haute technologie (et 26% des exportations françaises).

L’attaque du Front de Gauche et de Die Linke a commencé à produire ses premiers effets à la fin de semaine. Le candidat présidentiel du PS, François Hollande, qui jusqu’à présent faisait également l’éloge du modèle allemand, a décidé de changer de registre et dimanche 4 décembre il voyage à Berlin pour critiquer le modèle allemand.

ANDRES PÉREZ CORRESPONDANT

Traduction : Françoise Bague


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