Quitter le gouvernement ?

samedi 1er décembre 2012.
 

Faut-il quitter le gouvernement ? Telle est la question que certains d’entre nous n’hésitent plus à poser publiquement, comme s’il s’agissait d’anticiper les interpellations de la presse qui nous harcèle sur ce thème en soulignant à l’envi notre « incohérence ».

Force est de reconnaître que le piège se referme chaque jour un peu plus sur nous : rester en se soumettant serait un suicide politique ; partir signerait l’échec de nos accords passés avec le Parti socialiste en novembre 2011. Même nos plus fervents partisans du compromis prennent aujourd’hui la mesure du danger... A qui la faute ? Faire peser la responsabilité d’une telle situation sur les seuls socialistes et le tandem exécutif est à la fois injuste et lâche, parce que c’est refuser de regarder en face la faiblesse de notre accord programmatique sacrifié sur l’autel de notre accord électoral.

Nous voulions un groupe à l’Assemblée nationale et des ministres. Nous les avons, mais à quel prix ? Le scénario que nous vivons aujourd’hui était déjà écrit sur la liste des désaccords actés entre EELV et le PS. Dans l’euphorie de la victoire, nous avons réussi à dissimuler ce qui ressemble fort à une arnaque politique. Aujourd’hui confrontés au principe de réalité, nous ne pouvons plus nous contenter de langue de bois, d’imprécations ou de contorsions politiciennes... Au prétexte qu’il ne faut pas mettre en difficulté nos ministres.

Comment rester crédible quand on vote le mardi contre le pacte budgétaire européen (TSCG), parce qu’il choisit l’austérité contre la transition écologique, et le mercredi pour la loi organique qui le transpose dans le droit français ? Il faut reconnaître que nous avons contribué à remplir cette coupe que nous trouvons maintenant trop pleine.

Notre faiblesse politique ajoutée à la domination du Parti socialiste nous vaut quelques humiliations : nos ministres ont découvert le texte du « pacte de compétitivité » à l’entrée d’un « séminaire » gouvernemental. Tout était déjà décidé à Matignon, Bercy et l’Elysée. Après la loi de finances qui a gommé l’essentiel des propositions fiscales des écologistes, ledit « pacte » signe la victoire d’un modèle productiviste, à cent lieues de la transition écologique promise par le président de la République.

TROIS CHOIX

Si l’on ajoute à cela la politique d’immigration et de régularisation du ministre de l’intérieur, le recul sur le vote des étrangers dans les élections locales, l’absurdité de Notre-Dame-des-Landes, le doute sur la fermeture de Fessenheim en 2016, la surreprésentation du lobby nucléaire au comité de pilotage du débat sur la transition énergétique, l’exploitation des gaz de schiste qui n’est plus exclue, la liberté de conscience des maires face au mariage pour tous, etc., nos électeurs et sympathisants sont fondés à se demander pourquoi nous avalons autant de couleuvres.

Faut-il, dès lors, quitter le gouvernement ? En 1970, l’économiste et sociologue Albert Hirschman a publié un ouvrage célèbre, Défection et prise de parole (Fayard, 1995). Il explique que trois choix s’offrent aux individus mécontents : la réaction silencieuse, le renoncement à l’action, par fidélité, la protestation et la prise de parole. Nous devons collectivement faire entendre notre voix, des ministres aux parlementaires et au parti, dire au gouvernement qu’il se fourvoie... Pour autant qu’il soit toujours capable de nous entendre.

Noël Mamère député écologiste


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