Catholiques, protestants, juifs et musulmans ont fait cette proposition le 6 janvier, la veille de l’attaque contre Charlie Hebdo, lors d’une audition commune à Paris devant l’Observatoire de la laïcité, une instance rattachée aux services du Premier ministre.
« Cela montre que les cultes sont conscients du caractère excessif d’une telle mesure, et de son caractère attentatoire à la liberté d’expression. Ils nous ont proposé eux-mêmes d’y mettre un terme », a déclaré Nicolas Cadène, le rapporteur général de l’observatoire.
Le blasphème est théoriquement réprimé en Alsace et en Moselle par un article hérité du code pénal allemand de 1871, resté en vigueur après le retour à la France de ces trois départements, en 1918.
En 2013, la Ligue de défense judiciaire des musulmans avait invoqué le blasphème pour attaquer Charlie Hebdo devant un tribunal strasbourgeois suite à une manchette de l’hebdomadaire satirique. Mais la procédure avait été déclarée nulle, pour des raisons de forme. Un délit obsolète
L’archevêque de Strasbourg, Mgr Jean-Pierre Grallet, a confirmé que les représentants des cultes avaient « mûri » depuis un certain temps l’idée de demander l’abrogation de ce délit « obsolète ».
L’archevêque a rappelé qu’il avait « refusé d’invoquer le délit de blasphème » en portant plainte, en novembre dernier, contre une militante Femen qui avait « profané » l’autel de la cathédrale de Strasbourg en y montant seins nus, pour protester contre la venue du pape.
Communiqué commun d’Égale, du CLR et de l’UFAL
8 membres de la rédaction de Charlie-Hebdo et 1 policier chargé de les protéger sont morts pour la liberté d’expression dans un attentat qui a fait 3 autres victimes. En France, cette liberté fondamentale implique le droit de critiquer les religions, et de les tourner en dérision. Ce que les dogmes religieux appellent « blasphème » est relatif aux seuls adeptes d’un culte donné, et ne saurait donc s’appliquer à l’ensemble des citoyens. Le blasphème est non seulement inconnu du droit de la République, mais légitime et autorisé. Seules sont interdites et sanctionnées pénalement les attaques contre les personnes ou les groupes de personnes, quand elles revêtent un caractère diffamatoire, raciste, antisémite, xénophobe, ou discriminatoire.
Or nous rappelons qu’il subsiste encore, dans les départements d’Alsace et la Moselle, un « délit de blasphème », vestige dans le « droit local des cultes » de l’occupation bismarckienne de 1870. Il est toujours prévu et réprimé par l’art. 166 du droit pénal local.
Les associations laïques soussignées exigent l’abrogation immédiate, par voie législative, de ce délit de blasphème dérogatoire aux lois de la République, et à jamais lié à la justification prétendue de meurtres barbares.
Une telle abrogation ne porterait aucunement atteinte au libre exercice des cultes, puisque celui-ci est garanti partout en France par la Constitution et la loi du 9 décembre 1905. Cet acte hautement symbolique nous paraît un devoir minimal du Parlement et du Gouvernement français, à l’égard de la mémoire des victimes de la liberté d’expression, saluée le 11 janvier par des millions de personnes. Mettre fin à cette dérogation locale potentiellement meurtrière aura en même temps la valeur d’une réaffirmation, pour l’ensemble du territoire, de la portée des libertés républicaines.
CLR (Comité laïcité république)
ÉGALE (Egalité, Laïcité, Europe)
UFAL (Union des familles laïques)
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