L’expérience dramatique que traverse le peuple grec nous prouve une fois de plus qu’il est indispensable pour la gauche antilibérale de s’affronter à l’épineuse question monétaire et de préparer une potentielle sortie de la zone euro.
Elle doit le faire en France, non pas pour mimer le Front National et ainsi espérer égaler par ce biais sa réussite électorale, mais pour être certaine que quoi qu’il arrive, si elle est au pouvoir, elle sera en mesure d’appliquer son programme. Syriza a été élu en Grèce sur la sortie de l’austérité et non pas sur la sortie de l’euro ou de l’Union européenne. La majorité de Syriza était convaincue que ce n’était pas le mot d’ordre de sortie de l’euro qui lui permettrait d’arriver au pouvoir. Les faits lui ont donné raison. Mais son erreur la plus terrible est sans doute de ne pas avoir tout de même préparé cette sortie. La Grèce est du coup condamnée à subir un énième et dramatique plan d’austérité et à devenir un protectorat allemand. Préparer un plan de sortie de l’euro n’est pas un outil électoral, mais bien une nécessité pratique.
Ce que porte aujourd’hui le Parti de Gauche, c’est que quel que soit l’état du rapport de force au niveau européen, s’il arrivait au pouvoir, il appliquerait son programme, en désobéissance avec les traités européens et avec un contrôle immédiat des mouvements de capitaux pour permettre la mise en place de sa politique. S’ensuivrait une crise diplomatique en Europe qui pourrait amener à une renégociation des traités, mais qui pourrait également conduire au même type d’étranglement que celui qui vient de faire plier le gouvernement d’Alexis Tsipras : le blocage des liquidités par la BCE. Alors, il faudra sortir de l’euro et être prêt à cela.
Au Parti de Gauche, nous assumons que nous travaillons à un plan B : si notre stratégie de désobéissance aux traités n’aboutit pas à une refonte radicale des traités européens, nous organiserons une sortie négociée de la zone euro, qui conduira à un changement radical de structure monétaire, via l’instauration d’une monnaie commune. Cette monnaie aurait un taux de change unique vis-à-vis des monnaies extérieures à la zone, et chaque pays membre de la zone retrouverait sa monnaie nationale.
La position du Parti de Gauche est donc claire : nous ne ferons aucun sacrifice pour l’euro et nous en sortirons plutôt que de renoncer à notre politique. Mais nous considérons que le préalable au changement n’est pas la sortie, mais bien au contraire la bataille politique pour créer une crise diplomatique et politique au sein de l’Union européenne. C’est cette bataille qui, soutenue par les mouvements sociaux, permettra de conscientiser et de fédérer les peuples européens. Notre but stratégique est l’application de notre programme et donc la sortie de l’austérité. Faire de la sortie de l’euro ou de l’Union européenne un but en soi, c’est détourner notre combat de son horizon : sortir de la domination du capital sur la vie.
Notre sortie de l’euro et notre désobéissance aux traités mettront fin à l’Union européenne. Car il n’y a pas d’Union européenne sans la France. Ce ne sera donc pas à la France de sortir de l’Union européenne, ce qui serait une position qui nous minoriserait et qui ferait le jeu de l’Allemagne et de ses alliés. La France devra construire d’autres solidarités avec les gouvernements qui le souhaiteront dans un nouveau cadre européen et internationaliste.
L’enjeu de la période est de se préparer à cette grande bataille politique et sociale. Ainsi la France, avec ses immenses ressources politiques, économiques, sociales et diplomatiques, ne sombrera pas comme vient de le faire le gouvernement grec. Elle utilisera au contraire tout son poids pour aider les autres pays à vaincre l’austérité avec elle, quel qu’en soit le prix à payer.
Guillaume Etiévant, Secrétaire National du Parti de Gauche à l’économie et au travail
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