200 ans de lutte contre la traite négrière...

dimanche 1er mars 2020.
 

Les Nations Unies ont célébré avant-hier le bicentenaire de l’abolition de la traite transatlantique des esclaves par un appel à lutter contre le trafic d’êtres humains, alors que se sont élevés à l’Assemblée générale de l’ONU de nombreux appels à ce que les pays ayant jadis participé à la traite présentent des excuses.

Lors d’une séance de l’Assemblée générale, la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, Asha-Rose Migiro (Ban Ki-moon est en voyage officiel au moyen-orient), a rappelé que l’histoire de l’esclavage ne devait "jamais être oubliée".

"Pendant cette période, des souffrances humaines indicibles ont été infligées, au cours des longues marches en Afrique, comme au cours des voyages effroyables pour conduire des hommes vers une vie sans droit", a affirmé Asha-Rose Migiro.

La Vice-Secrétaire générale a demandé à l’Assemblée générale des Nations Unies de ne pas oublier également que des hommes avaient eu le courage de se soulever contre ces pratiques, à travers notamment le mouvement abolitionniste.

"Nous célébrons aujourd’hui le fait que tous les êtres humains naissent libres et égaux en droit. C’est pourquoi nous ne saurions tolérer que le XXIe siècle commence en permettant le trafic des êtres humains, le travail forcé, le viol de masse perpétré contre les personnes les plus démunies en temps de guerre", a ajouté Asha-Rose Migiro, qui a exhorté fermement les États Membres à s’unir contre ces "atrocités » dont « nous devons tous avoir honte".

"Il s’agit là d’une obligation juridique mais, tout autant, d’un devoir moral, d’une dette à l’égard de ceux que nous honorons aujourd’hui", a conclu la Vice-Secrétaire générale.

"Il est établi dans la Déclaration universelle des droits de l’homme que ’nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude’. Néanmoins, pendant trop longtemps, la traite transatlantique a été une calamité mondiale".

Ban Ki-moon avait souligné que cet anniversaire trouvait sa source dans la signature par le Président des États-Unis, Thomas Jefferson, d’une loi abolissant le commerce des esclaves.

"Le mois d’après, le Parlement britannique interdisait le commerce des esclaves dans tout l’empire britannique. Le vent avait tourné. L’Assemblée générale a donc décidé que le monde devrait commémorer cet anniversaire important le 26 mars 2007", a-t-il rappelé.

En ce jour, "nous devons nous rappeler qu’à notre époque encore, plusieurs millions de nos frères humains subissent des pratiques analogues à l’esclavage, telles que la servitude pour dettes et l’utilisation des enfants dans les conflits armés. Les victimes ont généralement trop peur pour dénoncer ces pratiques. Malgré tous les progrès accomplis dans notre action pour les droits de l’homme, il nous reste encore beaucoup à faire", a souligné le Secrétaire général.

Le Premier Ministre de Saint-Kitts-et-Nevis, dont le pays a été brisé pas l’esclavage, a souligné au nom des États Membres de la CARICOM, c’est-à-dire des Caraïbes, que le souvenir de la traite était "encore au cour de la société".

"Plusieurs d’entre nous sommes des descendants d’esclaves", a-t-il indiqué, tout en affirmant que cette traite était "un crime contre l’humanité et une violation des droits fondamentaux" de ses ancêtres. "Leur souffrance ne devrait jamais être oubliée", a-t-il insisté, se félicitant, à cet égard, de l’adoption unanime d’une résolution en novembre dernier, instituant la commémoration de la lutte contre l’esclavage.

Il a également salué le fait que "d’anciennes puissances coloniales aient exprimé leur profonde tristesse pour le rôle qu’elles avaient joué à l’époque dans cette traite méprisable" et espéré que "d’autres pays ayant soutenu ou profité de cette activité inhumaine en feraient autant", et qu’il était indispensable de présenter des excuses sans ambiguïté pour les atrocités de la traite et que les pays qui avaient pris part à celle-ci avaient une obligation morale dans ce sens.

"Aucun pays qui a participé à la traite des esclaves ne peut prétendre appuyer les droits de l’homme sans avoir présenté des excuses et exprimé un repenti officiel sous la forme de réparation", a-t-il ajouté.

Pour sa part, Dumisani Kumalo, représentant de l’Afrique du Sud, dont le pays occupe ce mois-ci la présidence du Conseil de sécurité, a rappelé au nom du Groupe des États africains, que la résolution de l’Assemblée générale soulignait que "la perpétuation de la traite était toujours au c ?ur de profondes inégalités sociales et économiques".

Celle-ci alimente encore la haine et le racisme, a-t-il ajouté.

Dumisani Kumalo a déclaré qu’alors que le monde se trouve à mi-chemin de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), il est évident que l’Afrique continue à subir de plein fouet l’extrême pauvreté.

Il a estimé que le Cycle de Doha, qui pourrait aboutir à une ouverture des marchés commerciaux aux produits africains, était "pour l’heure pris en otage par des pays riches qui, jadis, ont bâti leurs profits et leurs richesses grâce à l’esclavage et la colonisation".

"Les statistiques indiquent qu’une vache européenne reçoit plus de subventions qu’un enfant africain dans l’aide au développement", a-t-il noté, avec un cynisme rarement entendu dans une enceinte de l’ONU, de nombreux pays développés rechignant, en outre, à respecter leurs engagements en matière de lutte contre la pauvreté, notamment le versement de 0,7% du PIB à l’appui au développement.

Enfin, Dumisani Kumalo a souhaité que cette commémoration soit l’occasion d’honorer la mémoire de ceux qui se sont soulevés contre l’esclavage, et qui ont, ce faisant, défendu la valeur que nous devons tous accorder à la vie humaine.

La France célebrera le 10 mai prochain la fin de la traite des noirs.


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