Madame Le Pen (encore) en justice

lundi 4 avril 2016.
 

Mardi 22 mars se tenait l’audience du procès que Marine Le Pen a intenté à mon avocate, Raquel Garrido, pour des propos tenus dans son travail pour me défendre. Cela concerne toujours l’affaire des faux tracts xénophobes réalisés par le FN contre moi en 2012. Attaquer l’avocat d’un adversaire politique pour lui nuire est une innovation perverse qu’aucun responsable politique n’avait imaginée avant Mme Le Pen. Des manœuvres devant la justice d’autant plus cyniques qu’elle est avocate.

Je rappelle les faits : ayant pris en flagrant délit des militants FN, dont certains venus en voiture du siège national du FN à Saint-Cloud, en train de distribuer des faux tracts contre moi dans la campagne législative d’Hénin-Beaumont, nous avons décidé de poursuivre Marine Le Pen par citation directe devant le tribunal correctionnel de Béthune. Pour avoir commis deux délits : celui de manœuvre électorale frauduleuse et celui de montage portant atteinte à mon image. Mme Le Pen avait elle-même avoué le 2 juin 2012 sur France 3 qu’elle était bien à l’initiative de ces faux tracts.

Mon avocate a donc expliqué le 4 juin 2012 à l’AFP le sens de notre plainte en concluant : « Nous sommes sûrs de nous quant au fait que Marine Le Pen est une délinquante ». Rien de plus normal pour l’avocat chargé de rédiger et déposer une plainte et de convaincre la justice en ce sens. Avez-vous déjà vu un avocat citer quelqu’un devant la justice en disant qu’il n’est pas sûr que cette personne soit coupable ? Ce serait contraire à la mission même que la loi confie aux avocats pour garantir le droit à la défense. C’est pourtant ce que Marine Le Pen reproche à mon avocate en la poursuivant pour diffamation. Une plainte qui ne doit rien au hasard ou à un quelconque emportement de campagne puisqu’elle l’a déposée en plein milieu de l’été qui a suivi, le 7 août 2012. Il s’agissait donc de poursuivre sournoisement le combat contre moi en usant d’une démarche d’intimidation contre mon avocate.

Quatre ans plus tard, l’audience tenue mardi 22 mars a largement permis à la 17ème chambre correctionnelle du Tribunal de Grande instance de Paris de se rendre compte de la brutalité incongrue de cette méthode. Et du manque de sérieux de la poursuite. Le tribunal a ainsi noté qu’il n’avait même pas reçu les conclusions de la plaignante Marine Le Pen avant l’audience, comme c’est en principe l’usage. Quatre ans de délai n’avaient certainement pas été suffisants aux fins juristes du FN pour rédiger ces conclusions à temps.

En se plongeant dans le dossier, le tribunal a aussi constaté avec stupeur que la dépêche AFP fournie par l’avocat de Marine Le Pen, Wallerrand de Saint Just, au moment de la plainte, n’était pas la bonne ! Cette pièce étant justement celle sur laquelle repose la poursuite contre mon avocate et l’AFP qui a relayé ses propos ! Le nouvel avocat de Mme Le Pen ne disposant pas non plus de cette pièce à l’audience, il fallut que ce soit l’avocate de l’AFP qui la fournisse au tribunal pour nous épargner un nouveau délai de procédure. Le nouvel avocat de Mme Le Pen n’a pas non plus été capable d’expliquer le choix procédural effectué par Wallerand de Saint Just à l’époque, en affirmant sans rire qu’il l’ignorait. Le tout sous l’œil médusé de la procureure de la République manifestement consternée par une telle légèreté de l’accusation.

À l’issue des débats, la procureure conclut d’ailleurs au nom de la société que la bonne foi professionnelle de mon avocate était avérée dans cette affaire. De quoi justifier sa relaxe. D’autant que la loi interdit de poursuivre les avocats pour les propos qu’ils tiennent lors des procédures judiciaires. Au passage, ces débats ont permis d’établir une nouvelle fois que Marine Le Pen avait bien reconnu être à l’origine des faux tracts que nous avons poursuivis. Le plus incroyable restera ce moment où la Cour d’appel de Douai a finalement considéré qu’ils ne pouvaient lui être pénalement imputés faute d’enquête de police et d’action du parquet. Ainsi, la carence de l’État qui perd l’enquête de police après avoir prétendu que c‘était la plainte elle-même qui était perdue, et la « neutralité » du parquet qui en est résulté, tout a tourné contre moi. Une terrible forfaiture de la justice sur laquelle j’ai interpellé à deux reprises la ministre de la Justice Christiane Taubira, sans jamais recevoir de réponse.


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