Est-ce la pression idéologique et électorale de l’extrême droite ? L’effet mécanique des primaires et leur surenchère permanente ? A voir. Mais, le principal chef de la droite semble passé de « Nos ancêtres les gaullistes » à « Nos ancêtres les gaulois ». Inquiétant. De Gaulle laisse la place à la Gaule. Toutefois, ne tournons pas le dos à ce débat, il a son importance et sa potentielle vertu, j’y reviendrai.
D’abord, si la déclaration a fait grand bruit, c’est la responsabilité des médias. Quel barouf ! C’était l’objectif de son auteur. Tel Donald Trump, le candidat des primaires de la droite française Nicolas Sarkozy ciselle chaque semaine des déclarations, murement réfléchies, dans le seul but de polariser autour de lui le débat public. Entre hystérique et Astérix, il alterne. Tel un gigantesque aspirateur à médias, chaque phrase a pour ambition de tout avaler à son profit. Je récapitule pour les étourdies. C’est la semaine dernière, le 19 septembre, à l’occasion d’un meeting Les Républicains (LR) à Franconville que l’ancien président de la République a déclaré : « à partir du moment où l’on devient Français, "On vit comme un Français et nos ancêtres sont les Gaulois". « Mon père est Hongrois, on ne m’a pas appris l’histoire de la Hongrie. Mon grand-père maternel est Grec, on ne m’a pas appris l’histoire de la Grèce »
Badaboum… ! Aussitôt, un débat bruyant et assez désordonné s’est engagé dans tout le pays. La contre-attaque à Sarkozy fut tellement brouillonne que bien des nôtres n’ont rien retenu ni rien compris. Certains historiens, parmi mes amis, ont jugé utile de rappeler d’abord que tous nos ancêtres ne sont pas Gaulois. Ils ont raison. C’est une évidence. Pour être plus précis, il y a bien longtemps, là où est située aujourd’hui la France, il y avait de nombreux peuples : Celtes, Ambiens, Helvètes, Séquanes, Sénones, Carnutes, Parisii, des Vénètes, Pictes, mais aussi des Bellovaques, Ménapes, Aduapes, Allobroges, etc… Et pour faire simple, le nom de « gaulois » fut celui donné par Jules César et les Romains à tous ces peuples très différents qui peuplaient l’espace conquis entre les Alpes et l’Atlantique. Ils étaient si divers, que les Romains parlaient plutôt « des » Gaules (le livre de César se nomme d’ailleurs « la guerre des Gaules ») plutôt que de « la » Gaule. A cette longue liste de peuples originels, on pourrait ajouter enfin qu’en raison de l’immigration qui a aussi fait par vagues successives (italienne, portugaise, polonaise, algérienne, marocaine...) ce pays et l’a enrichi, depuis plus de 150 ans, un quart de nos compatriotes ont à présent un de leurs ascendants nés à l’étranger.
Mais, c’est bien plus tard que le mythe des Gaulois voit véritablement le jour, comme souche originelle du peuple français. Il est né durant la Révolution Française, en opposition aux aristocrates supposés « Francs » (et donc un peu Germains) et au baptême de Clovis présenté comme l’acte de naissance de la France. Le personnage de Vercingétorix est alors imaginé, à partir d’une phrase ambiguë de Jules César, comme le premier de nos héros (inconnu avant le XIXe siècle). Il entre en fanfare dans les manuels d’histoire du Second Empire puis de la République. avec des historiens tel Ernest Lavisse.
Il y a donc beaucoup d’idéologie, d’arrière pensées politiques, et bien peu de sciences à vouloir faire des gaulois le point de départ de notre Histoire. Toutefois, ce simple rappel, certes nécessaire, passe un peu à côté de la cible. Car, il faut relire l’intégralité de ce que dit Nicolas Sarkozy. Il ne s’est pas limité à jouer « austérix » le gaulois.
Plus que ces gauloiseries, je suis davantage agacé de l’entendre dire, dans le même discours, sous les applaudissements d’un public peu informé manifestement, qu’à lui, on ne lui a pas appris l’histoire de la Hongrie ou celle de la Grèce. Là, le sous-texte est plus important que le texte. Tendez l’oreille. Il sous-entend qu’aujourd’hui, sur les bancs de nos écoles, on apprendrait davantage l’histoire des pays d’origine des immigrés (et bien sûr, suivez mon regard : des maghrébins) à des enfants étrangers qui sont scolarisés dans nos écoles, que l’histoire de France elle même. Et le voilà qui nous décrit des programmes scolaires sous la pression des revendications communautaires. Énorme mensonge. Pour éviter les fausses polémiques, j’invite chacun à consulter un manuel scolaire. Évidemment, comme depuis des décennies, on n’apprend pas que l’Histoire de France (encore heureux d’ailleurs), mais c’est bien elle ultra-majoritairement qui est enseignée, chronologiquement de l’école primaire à la Terminale. La vraie difficulté que rencontrent les enseignants est d’ordre pratique. Près de 80 000 postes d’enseignants ont été supprimés durant le mandat de M. Sarkozy, et en réalité bien peu ont été rétablis sous le quinquennat de M. Hollande, malgré les promesses. Et, si Nicolas Sarkozy redevenait le prochain président de la République, les choses ne s’amélioreraient pas, puisqu’il vient de promettre aujourd’hui qu’il y aurait 300 000 postes supprimés dans la fonction publique, dont beaucoup d’enseignants. Comment mieux enseigner l’Histoire de France dans de telles conditions matérielles ? Et il conviendrait également de s’interroger sur la manière dont l’Histoire se transmet, notamment à la télévision, à commencer par le service public. J’ai déjà indiqué qu’il n’était pas normal que les seules émissions historiques se résument à spectacle patrimonial, souvent bien faites d’ailleurs, sous la houlette du toujours souriant Stéphane Bern.
Dans la foulée, M. Sarkozy déclare qu’il veut qu’en France on vive « comme des français ». Vaste débat. Poser comme cela, à priori qui est contre ? Moi, j’aime passionnément la France, sa culture universaliste, ses bistrots, ses librairies, son pinard, son peuple rouspéteur et son Histoire tumultueuse… Le petit provincial que je suis, aime Paris et ses monuments qui racontent chacun une Histoire complexe et bouleversante. Mais finalement qu’est-ce au juste que « vivre comme un français » ? Quels sont les canons de référence ? En fonction de quoi ? Qui juge ? Aimer danser la salsa en buvant des mojitos dans des boites de nuit, est-ce français ? Aimer le Sumo et la bière Corona, est-ce français ? Regarder un spectacle de base-ball et manger dans un fast-food, est-ce français ? Se promener en kilt ou en kimono et boire du thé à 17h, est-ce français ? Fêter Halloween et manger des sushis, est-ce bien français ? Regarder une majorité de films américains et écouter des chansons essentiellement en anglais, est-ce bien français ? Aller à Disneyland avec ses enfants sur les épaules, est-ce bien français ? En 2016, beaucoup de mes compatriotes font ainsi. La réponse à tout cela est donc assez floue et il serait hasardeux de considérer que la France fantasmée des années 50 à laquelle Sarkozy fait sans doute référence, celle de Jean Gabin parlant avec les mots de Michel Audiard, a évoluée uniquement par la présence de quelques millions de nos compatriotes qui ont de la famille de l’autre coté de la méditerranée. Au passage avec eux, les liens culturels sont souvent bien plus forts que toutes ces nouvelles identités bricolées. Et au bout du compte, « vivre comme un français » n’a qu’une seule réponse pertinente : respecter les lois de la République. Ni plus, ni moins…
On me répondra que Nicolas Sarkozy, en cette période de terribles attentats, et d’excitation nationale autour du burkini, pointe surtout le refus du fanatisme religieux et refuse l’insupportable oppression des femmes, évidemment contraire aux valeurs de la République. Le sujet est grave et important. Il mérite de la précision. Il faut combattre sans relâche l’obscurantisme religieux et notamment « salafiste » que des gredins veulent voir prospérer sur le territoire national. Soyons clair. "L’islamisme" est une idéologie politique que je ne saurai comparer à simplement une forme de patriarcat. Mais l’affronter exige de rester ferme sur les valeurs de la laïcité et non en exaltant les "racines chrétiennes de la France" comme MM. Sarkozy, Wauquiez et bien d’autres le font si régulièrement. Au fanatisme religieux et meurtrier des uns, on ne répondra pas par une envahissante ferveur religieuse, même fraternelle, des autres. Pour la République, c’est un combat majeur qui lui impose de ne pas appliquer une laïcité à géométrie variable.
A la lumière de l’Histoire, nous le savons, d’autres religions aussi ont longtemps maltraité les femmes. Et ce n’est pas terminé. Puisque nous évoquons l’Histoire, ne perdons pas de vue que la femme a longtemps eu un statut de mineure, qu’il a fallu attendre 1944 pour que les femmes aient le droit de vote en France, et que longtemps, en France, les femmes se sont baigné habillées pour ne pas choquer les bonnes mœurs. Au début du 20e siècle, un bikini sur une plage française aurait provoqué un scandale qui se serait terminé devant les tribunaux. Jusqu’au milieu des années 70, l’épouse devait demander à son mari l’autorisation d’ouvrir un compte en banque. Et avant 1968, il était impossible pour une jeune française d’aller au lycée en pantalon. Je remonte le temps pour brandir d’autres exemples, aux 18e et 19e siècle, il existait pour les jeunes filles des retraites au couvent subies, imposées par les familles, etc… Et la liste est longue de toutes les brimades faites aux femmes qui se déroulaient en France. Il en existe encore aujourd’hui, sans pour cela aller dans des familles de confession musulmane. En 2015, 122 femmes sont mortes sous les coups de leurs maris, qui dans leur grande majorité n’avaient pas lus la moindre ligne du Coran.
Pour assurer l’égalité des droits, il importe surtout de vivre "comme des républicains"... et c’est là une vision universaliste, qui ne se limite pas à nos frontières.
On l’aura compris, dans le débat qu’il ouvre, la précision historique importe peu à Sarkozy. Il simplifie à grands coups de truelles. Concernant sa sortie sur les Gaulois, il a donc à la fois raison et tort. Non, tous nos ancêtres ne sont pas des Gaulois (et qui peut croire sérieusement cela d’ailleurs ?), mais, comme le taureau, ne fonçons pas dans le chiffon rouge qu’il nous agite sous les yeux. Laissons la peur du rouge aux bêtes à cornes. Nicolas Sarkozy en réalité ne dit pas vraiment l’inverse et l’enseignement de l’Histoire nécessite parfois des simplifications, surtout quand on s’adresse aux plus jeunes. Ce qu’il veut dire, avec son style si provocateur, c’est qu’il est souhaitable que nous nous rassemblions autour d’une Histoire commune, partagée par tous, même si nous sommes français depuis peu. Pourquoi pas ? Je suis d’accord. Mais quelle Histoire ? Et c’est là que le débat devient intéressant et qu’il peut, pourquoi pas, s’engager un échange idéologique fructueux avec la droite qui permettra de comprendre les désaccords et tracer éventuellement de vrais lignes de clivages permettant de faire des choix politiques.
J’invite donc tout le monde à bien méditer sur ce qu’a déclaré dimanche Jean-Luc Mélenchon lors de l’émission Punchline sur C8, animée par Laurence Ferrari. Cela n’est pas « nul » de parler d’Histoire de France. Bien sûr que non. Et il a ajouté pour être bien compris : « Je ne dirais pas « Nos ancêtres les Gaulois », je vous dirais que le moment fondateur c’est le moment où on devient citoyen, c’est plutôt la Révolution de 1789 ». J’approuve à 100 % et cela n’étonnera personne. Je pousse même le raisonnement plus loin et marche dans les pas de Jean-Luc Mélenchon. Et je m’adresse à Nicolas Sarkozy. En quoi le fait de nous référer aux Gaulois peut-il nous aider en 2016 à faire peuple et à construire une Nation plus égalitaire et plus fraternelle ? Réponse : en rien. Par contre, se réclamer de la Révolution Française, de son inspiration que sont les idées des Lumières, de son œuvre qu’est la déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen, de sa devise « Liberté, égalité, fraternité », de sa profonde rupture avec l’Ancien Régime, de son exigence de laïcité, de ce Peuple mobilisé qui écrase le fanatisme, etc… il y a là autant de sources auxquelles nous pouvons nous désaltérer sans fins et qui restent d’une étonnante modernité.
Je souhaite que l’on me comprenne. Se réclamer de pages de notre Histoire passée pour bâtir le projet d’un Peuple tourné vers l’avenir, oui, oui et oui ! Mais quelle Histoire ? Quelles pages ? Dans quel but ? Pour quels enseignements ? Ouvrons la discussion à ce sujet, y compris dans un débat avec la droite puisqu’elle l’engage. Pourquoi pas ? La controverse historique peut devenir ici passionnante pour l’ensemble de notre Peuple. Car, contrairement à ce que nous déclarons dans notre beau chant d’émancipation : du passé ne faisons pas table rase. Une société aura toujours besoin de définir son passé, et elle aura toujours besoin de son passé pour définir son avenir. Aussi, une nouvelle fois Jean-Luc Mélenchon a raison. Non, il n’est pas forcément « nul » de vouloir débattre de l’Histoire de France que nous souhaitons voir enseigner dans nos écoles, et aux enfants de l’immigration. Ne haussons pas les épaules. Pour faire France de tout bois c’est un sujet d’intérêt général. Dans ces moments de doutes existentiels qui secouent notre pays, il est nécessaire de mener des batailles culturelles de grande ampleur, avec des méthodes d’éducation populaire compréhensibles et mobilisatrices. Ces batailles idéologiques passent sans aucun doute par la (re)définition de l’héritage historique que nous aimerions voir transmis à tous. Gardons en tête qu’une offensive historique très réactionnaire, menée depuis plusieurs années, rend cette confrontation nécessaire. J’ai déjà eu l’occasion d’en parler dans ce blog. La révolution Française est essentiellement l’objet de bien des pilonnages. Vous ne me croyez pas ? Osez dire le nom d’un Révolutionnaire de 1789 à 1793, et vous serez aussitôt insultés par tous ces publicistes (les Michel Onfray, Lorant Deutsch, Jean Sevilla et compagnie) qui ont pignon sur rue et table ouverte dans bien des magazines à grand tirage. Ils poursuivent une quête. Ils veulent faire détester la Révolution. Ils cherchent à salir toute lutte d’émancipation, toute mobilisation populaire. Avec eux, le Peuple est toujours vulgaire, brutal, manipulé. Ils souhaitent de surcroit rendre toute Histoire nationale de l’immigration honteuse, tout intérêt intellectuel avec l’histoire politique du Maghreb suspecte. Toute forme d’internationalisme doit être ridiculisé. Toute explication des luttes nationales et anti-coloniales doit être moquée, déformée, minorée. Ils veulent ainsi effacer deux siècles d’histoire pour nous faire revenir à l’Ancien Régime, et nous présenter notre histoire comme une communion harmonieuse entre un peuple et son souverain très chrétien. C’est pourquoi je crois ce débat historique aussi important que le combat social. Les deux se nourrissent l’un de l’autre. Pour le mener, je fais partie de ceux qui n’ont jamais mis leur carte d’identité idéologique dans leurs poches.
Pour moi, c’est la République qui fonde la Nation. Et non l’inverse. Fils des Lumières, héritier du long combat du Peuple pour acquérir sa pleine souveraineté, je suis avec les parisiennes qui marchent sur Versailles pour aller chercher le roi, avec les soldats de Valmy qui crient « Vive La Nation » et font fuir les armées autrichiennes, avec les jacobins et les révolutionnaires de 1793, avec les quarante-huitards qui proclament la IIe République et abrogent l’esclavage, avec le grand Victor Hugo parti dans l’exil, avec les communards sur les barricades et massacrés au cimetière Père Lachaise, du coté de Georges Clémenceau et Jules Maigne qui s’opposent à Jules Ferry s’engageant dans l’entreprise coloniale en 1885, avec les soldats du 17e qui refusent de tirer sur les vignerons en colère sur les allées Paul Riquet de Béziers, avec Jean Jaurès qui refusait la guerre et fut assassiné par un nationaliste, avec les ouvriers de 36 en grève qui obtiennent ainsi les congés payés, avec les français résistants à l’occupant nazi, luttant avec ceux qui croyaient au ciel ou ceux qui ni croyaient pas, avec Jean Moulin refusant de parler même sous la torture, avec Missak Manouchian donnant sa vie pour la France, du coté des peuples opprimés qui se libèrent enfin de la tutelle coloniale qui n’avait rien à voir avec la belle promesse républicaine, du côté des travailleurs en grève en mai 68, avec le peuple dans la rue le 11 janvier 2015 qui dit "non" au fanatisme, etc, etc… et ainsi les pages de mon manuel d’Histoire de France se tournent au gré de ces luttes qui parfois ont gagné et hélas aussi, souvent ont perdus.
De loin, je préfère cette Histoire sociale et populaire… à celle brumeuse des Gaulois ou celle mystique des Rois de France couronnés dans leur cathédrale, même si je connais l’apport de Louis XI, flanqué de Philippe de Commines et d’Olivier le Daim à la construction du sentiment national. Mes morceaux choisis de l’Histoire de France, sont plus utiles en 2016 pour nous rassembler, ils n’excluent personne, ils intègrent. Toutefois, curieux de tout, je ne méprise rien de toutes les facettes de notre Histoire et je connais l’apport intellectuel du catholicisme dans notre culture. Mais, dans mon Panthéon, je sais faire des choix. Comment faire autrement ? Et non, mon Histoire n’est pas abstraite, ni glacée. Elle s’incarne. Elle sait se nourrir de visages d’hommes et de femmes dont nous chérissons la mémoire. Et je bâtis ainsi un récit national progressiste, nourri des espoirs de lendemains meilleurs. Il ne peut être le copié-collé d’une histoire érudite et universitaire qui est la tâche des universitaires et historiens de métiers qui nourrissent par leurs recherches nos réflexions, qu’elles soient scientifiques ou pédagogiques. Il est aux antipodes d’un Roman national qui n’est généralement que mythe et propagande au service d’un pouvoir politique en place. C’est ainsi je crois qu’il faut faire aimer notre pays et la République, enfantée par la Révolution et ses idéaux universalistes, sans laquelle finalement la France ne serait qu’un pays si banal et si ennuyeux. C’est ainsi je le sais que notre Histoire est aimée dans le monde entier. Celle qui est née dans le fracas de la grande Révolution, quand son Histoire brûle de flammes qui réchauffent encore tous les peuples du monde, surtout ceux qui souffrent. Le Révolutionnaire Saint-Just disait en 1793 « Pour fonder la République, il faut la faire aimer ». On ne saurait mieux dire. Et je m’étonne que tant de responsables politiques aient le mot « République » en permanence dans la bouche, mais qu’ils n’organisent nulle cérémonie pour célébrer chaque 21 septembre, l’entrée en République dans l’Hexagone.
L’utilisation de l’Histoire dans le débat politique ne doit donc pas nous effrayer. Cessons de pousser des cris sitôt que des références historiques apparaissent dans les débats. La droite sarkozyste n’a d’ailleurs pas le monopole des appropriations malheureuses de l’Histoire de France. Récemment encore, François Hollande dans une longue interview accordée à la Revue Le Débat, et menée par l’historien Pierre Nora et le philosophe Roland Gauchet, attestait combien les Présidents de la République ont toujours cherché à utiliser l’Histoire pour justifier leur action présente. Quitte à déformer la réalité des faits. Dans cet entretien, le Président de la République ose se placer, sans modestie, dans la continuité l’historique de l’œuvre de Léon Blum et François Mitterrand, et affirme qu’il serait confronté à présent à des « Insoumis » dont « le but est l’empêchement ». L’action de son gouvernement serait ainsi « défiée, comme elle l’a toujours été, par une autre gauche, qui s’est écartée de la gouvernance du monde ». C’est à dire le refus d’exercer le pouvoir. Que voilà une faible argumentation ! La critique que nous portons avec "La France Insoumise" ne serait qu’une critique de gens refusant l’exercice du pouvoir ? Qui peut penser que les forces qui ne supportent pas la politique de Hollande ne veulent pas gouverner ? Une grande majorité des anciens ministres de Hollande sont désormais contre lui. Jean-Luc Mélenchon est un homme d’expérience ayant exercé le pouvoir et qui souhaite à nouveau mener ce pays, notamment pour un grand changement social, écologique et institutionnel. Mais, plus globalement, ces extraits cités plus haut attestent bien que l’Histoire n’est pas seulement malmenée par la droite. Aussi, disons le clairement. Il n’est jamais vraiment « nul » de vouloir parler du passé. Même quand le débat est fort mal posé, comme dans le cas présent. Même quand il est victime de simplification, de caricature, d’instrumentalisation. Ne reculons jamais devant l’obstacle. Notre rôle doit toujours de chercher à redonner du sens, à mettre de la clarté là où l’obscurité semble s’imposer. L’Histoire n’appartient pas aux seuls historiens, même si leur rôle est indispensable. L’Histoire appartient à tous. Il nous reste collectivement à en faire bon usage.
Ma conclusion est simple : Une phrase comme « Nos ancêtres les gaulois » nous enferme dans des mythes et des références anciennes qui ne fournissent aucune clé pour comprendre le présent. A contrario, affirmer « Nos ancêtres les révolutionnaires de 1789 », nous propulse vers l’avenir !Entre les deux, il faut choisir. Notre passé peut être un pont pour avancer vers un avenir commun.
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