Bowling for...

samedi 21 avril 2007.
 

Le film arrive d’Outre Atlantique. C’est une histoire comme on en a déjà entendu parler. Des adolescents achètent des armes à feu et s’en vont faire un carton sur tout ce qui bouge peu ou prou dans leur collège. On ne saura rien des motivations, du déclencheur, des raisons profondes de la tuerie. On saura seulement qu’il y a suffisamment de ressentiment supporté, de rancœur dans ces vies à peine ébauchées pour que la folie surpasse tout le reste, l’amour de leurs mères, les copains, l’avenir espéré.

C’est une histoire qui, heureusement, ne peut pas arriver en vrai dans un pays civilisé. Une histoire inventée pour faire peur.

Vous disiez ? Columbine... C’est le nom de l’école ? Ah oui ? Un drame réel ? Vous êtes sûr ? Des gamins pourraient donc se procurer de quoi faire un carnage sans que personne ne s’en émeuve... Difficile d’y croire, tant tout ceci nous paraît à des années-lumière de nos réalités. Mais dans ce pays-là, la réalité dépasse souvent la fiction. Et même souvent l’affliction.

Ce film, un jeune homme l’a rejoué tragiquement il y a trois jours, à Virginia Tech. 33 morts. 33... Ca semble tellement abstrait ce chiffre, 33. On essaie de se rendre compte, en arrivant à l’école le matin, ce que ça donnerait 33 gamins sur le carreau là dans la cour. On ne peut pas.

Et pourtant... On ne va pas refaire le procès éternel mille fois débattu ici, par nos bonnes consciences jugeantes. On ne va pas...

Et pourtant... Et pourtant, ce pays-là, si merveilleux que certains le prennent pour modèle (suivez mon regard) c’est le pays de toutes les injustices, de toutes les compétitions, de tous les excès, des laissés-pour-compte d’un libéralisme forcené, le pays des villes artificielles, où tout est réglementé, où même les fleurs sont policées, où les barrières et les barrages se ferment à minuit, le pays de la liberté d’étriper son voisin s’il a lorgné un peu trop longtemps sur ta bagnole ou ta bicoque, le pays qui laisse ses enfants devenir cinglés de haine, si désemparés que la seule issue à tant de solitude, c’est le carnage.

Pour se dédouaner, on nous annonce que le meurtrier est coréen. Ouf ! On a eu chaud ! Et puis, aussi, il était « un peu » dérangé, il regardait les filles, le soir, avec ses jumelles. Tout va bien, dormez tranquilles. Le monstre a vécu, il s’est suicidé juste après la tuerie. Le cauchemar est terminé.

Mais quelque part, au fin fond d’une autre université, un autre peut-être prépare autre chose, de plus sanglant, de plus atroce. Va savoir. La NRA de Charlton Heston a de beaux jours devant elle. Fatal. La trouille est mauvaise conseillère. Les gamins vont être équipés de flingues, à côté du téléphone portable, ça ne fait pas un pli.

Dans ce pays-là, le maître mot c’est défense. Se défendre, défendre son bien, et pour cela, avoir chez soi un arsenal prêt à l’emploi. Et s’appuyer sur une loi de 1787 qui autorise les particuliers à détenir des tas de bidules à trouer le chaland. La NRA, cette puissante association qui a pignon sur rue, a largement soutenu Bush, pour ses campagnes électorales. Un pays de violences, où les inégalités engendrent la terreur, étonnez-vous après ça que des gamins grillent les plombs.

Michaël Moore, au Festival de Cannes en 2002 : "Aux Etats-Unis, si vous êtes malade, si vous êtes pauvre, allez-vous faire voir ! Si vous êtes désespéré, on vous cognera dessus. Voilà l’éthique de la société américaine. Mais, pour moi, ce genre de société mène au terrorisme. "

brigitte blang prs 57


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