Des chrétiens continuent à prendre à la lettre ce qui est écrit dans la Bible. Un exemple est la lecture littérale des paroles du Christ affirmant que les serpents ne peuvent tuer « ceux qui auront cru en lui ». Plusieurs décès réfutent la validité de cette prédiction. Il est intéressant de voir comment des croyants continuent à croire malgré la réfutation de cette affirmation.
Des chrétiens continuent à prendre à la lettre ce qui est écrit dans la Bible. Un exemple est la lecture littérale des paroles du Christ affirmant que les serpents ne peuvent tuer « ceux qui auront cru en lui ». Plusieurs décès réfutent la validité de cette prédiction. Il est intéressant de voir comment des croyants continuent à croire malgré la réfutation de cette affirmation.
Des chrétiens — surtout aux États-Unis — continuent à croire ce qui est écrit dans la Bible comme s’il s’agissait de récits historiques, malgré les découvertes de la géologie et de l’astrophysique. Jusqu’à la Renaissance, quasi tous les savants occidentaux, se basant sur la chronologie contenue dans la Bible, croyaient encore que la Terre avait été créée il y a environ 6000 ans. Ainsi Kepler (1571-1630) avait calculé que Dieu avait créé la Terre en 3999 avant J.-C. et Newton (1643-1727) pensait que c’était 5 ans plus tard. Aujourd’hui, des données scientifiques solides permettent de préciser l’âge de la Terre à 4,55 milliards d’années, à quelques millions près [1]. Suivant la Bible, Dieu a créé également les hommes il y a environ 6000 ans. Selon les découvertes des paléoanthropologues, l’Homo sapiens est apparu il y a environ 300 000 ans [2].
Les serpents ne sont pas dangereux pour les vrais chrétiens
Dans l’Ancien Testament, le psaume n° 90 enseigne que « celui qui dit que Yahvé est son Dieu, marchera sur le lion et la vipère, foulera le lionceau et le dragon ».
Le Christ se serait-il inspiré de ce psaume ? On lit dans l’Évangile selon Saint Luc : « Comme approchait le temps où Jésus devait être enlevé de ce monde, il pris résolument le chemin de Jérusalem » (9 : 51). « Le Seigneur désigna encore soixante douze disciples » et leur dit : « Je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds serpents, scorpions, et toute la puissance de l’Ennemi, et rien ne pourra vous nuire » (10:17). Dans l’Évangile selon Saint Marc (chap. 16), on lit que Jésus, après sa résurrection, se manifesta aux Onze disciples et que ses toutes dernières paroles rappelèrent l’invulnérabilité aux morsures de serpents qui leur était réservée : « 16“Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; celui qui ne croira pas, sera condamné. 17Et voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom ils chasseront les démons, ils parleront en langues nouvelles, 18ils saisiront des serpents, et s’ils boivent quelque poison mortel, il ne leur fera pas de mal ; ils imposeront les mains aux infirmes et ceux-ci seront guéris”. 19Or le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et il s’assit à la droite de Dieu ».
Une implication vérifiable-réfutable de la vérité des pouvoirs donnés par le Christ à ses disciples est d’examiner si, effectivement, l’imposition des mains guérit les infirmes et si les morsures de serpents venimeux restent sans effet chez les chrétiens. La mise à l’épreuve des faits a été réalisée par des chrétiens pentecôtistes américains.
Aux États-Unis, la manipulation de serpents venimeux (serpents à sonnettes et serpents cuivrés), au cours d’offices religieux, est apparue à la fin du XIXe siècle, principalement dans des régions rurales de l’Est et du Sud-Est. C’est une pratique de chrétiens fondamentalistes qui font une lecture littérale de la Bible.
Plusieurs chercheurs universitaires ont observé et analysé cette pratique, notamment le docteur en histoire David Kimbrough (Taking up serpents. Snake handlers of eastern Kentucky. Mercer University Press, 2002, 248 p.), le professeur de théologie Ralph Hood et le professeur de psychologie Paul Williamson (Them that believe : The power and meaning of the Christian serpent-handling tradition. University of California Press, 2008, 322 p.). La pratique de la manipulation est interdite dans beaucoup d’États et plus ou moins tolérée dans d’autres.
Les fidèles en question croient que rien ne peut leur arriver aussi longtemps qu’ils sont habités par l’esprit et que si l’esprit les quitte, ils doivent lâcher le reptile aussi vite que possible. Il n’est pas rare qu’un fidèle se fasse mordre et meure, mais ce fait ne fait pas perdre la foi à la plupart de ces pentecôtistes.
Il y a trois ans, l’exemple du pasteur Jamie Coots a fait grand bruit dans la presse. Coots avait participé au programme « Snake Salvation » diffusé sur la chaîne du National Geographic. Il avait été poursuivi par la justice pour possession illégale de serpents venimeux, mais n’en avait pas moins continué à pratiquer la manipulation de reptiles « dans le respect de la tradition ». Il a été mordu huit fois et a chaque fois refusé l’aide médicale. Il expliquait ces morsures par une punition divine pour une action qu’il n’aurait pas dû faire ou par la disparition momentanée de l’esprit. En 1998, Melinda Brown, âgée de 28 ans et mère de cinq enfants, a été mordue à mort lors d’un service religieux dans l’église de Coots. Celui-ci a alors déclaré que « tout ce qui arrive, là où cela arrive, est la volonté du Seigneur ». Le mari de cette femme a continué à manipuler des serpents et a été mordu mortellement trois ans plus tard, alors âgé de 38 ans. Coots lui-même a été mordu mortellement par un serpent à sonnettes en 2014 alors qu’il présidait le service religieux. Cela n’a pas empêché son fils Cody Coots de continuer cette pratique, notamment avec le serpent qui avait tué son père. Trois mois après la mort de son père, il a été lui-même mordu par un serment à sonnettes, mais a survécu à sa blessure malgré l’absence de soins médicaux. Il est toujours le pasteur de l’Église Full Gospel Tabernacle in Jesus Name [4].
André Gide avait raison de dire que « la foi soulève des montagnes, oui : des montagnes d’absurdités ». Les « fous » du Dieu chrétien, de Yahvé, d’Allah et d’autres dieux sont souvent dangereux et pour les autres et pour eux-mêmes.
Des explications ad hoc pour rendre irréfutable
Les croyants, qui ne se laissent pas déstabiliser par des faits venant contredire leur foi, recourent à des « explications ad hoc », des explications qui permettent de sauver leurs croyances quels que soient les événements observés. Leurs religions sont dès lors des systèmes « irréfutables », aux antipodes des véritables sciences.
Karl Popper a clairement exposé cette problématique, qu’il a comprise à l’occasion de sa rencontre avec les psychanalyses de Freud et d’Adler en 1919. Les psychanalyses — entendues comme des théories selon lesquelles il y a, caché à l’intérieur de nous, un « arrière-monde » que peuvent révéler seulement des « experts » qui ont été longuement initiés — font, comme les religieux, appel à des explications ad hoc pour assurer leur invulnérabilité. C’est pour cette raison que Popper — tout en admettant que Freud, Adler et d’autres psychanalystes ont dit des choses intéressantes — a considéré les psychanalyses comme des pseudosciences [5].
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[1] Krivine, Hubert (2011) La Terre, des mythes au savoir. Préface de J. Bouveresse. Cassini, 290 p.
Recension : http://www.pseudo-sciences.org/spip...
[2] Richter, A. et al. (2017) The age of the hominin fossils from Jebel Irhoud, Morocco, and the origins of the Middle Stone Age. Nature, 546 : 293-296.
[3] http://people.com/celebrity/jamie-c...
http://www.kentucky.com/living/reli...
[4] http://www.nydailynews.com/news/nat...
http://www.kentucky.com/news/hot-to...
[5] Sur Popper et la psychanalyse : https://blogs.mediapart.fr/jacques-...
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