19 mai 1871 L’école devient laïque

lundi 22 mai 2023.
 

Le 19 mai 1871, deux mois tout juste après le début de l’insurrection, la Commune de Paris décrète la laïcisation de l’école. Le programme politique de la Commune portait un projet profondément laïque, puisqu’on y parlait, déjà, de séparation de l’Église et de l’État, de suppression du budget des cultes et du salaire de leurs ministres, de sécularisation des biens congréganistes et de garantie de la liberté de conscience, comme étant la « première des libertés » reprenant là un article de la Convention, en 1795. Ce sont bien les mêmes principes qu’on retrouvera dans les textes de la 3ème République, quelques années plus tard.

C’est Édouard Vaillant qui est en charge des questions d’Éducation. Dès le 23 avril, Il va s’entourer de citoyens très au fait de ce qu’il nomme l’enseignement « intégral ». On traduit : pour la main et pour l’esprit de chaque individu enseigné. C’est la priorité des priorités. Le souffle de Condorcet est passé par là. La consigne est claire : l’instruction sera obligatoire, certes. Mais surtout gratuite et laïque.

Alors qu’on n’a connu jusqu’ici que des instituteurs plaçant le catéchisme bien au-dessus des Droits de l’homme, la Commission de l’Enseignement va décider, ce 19 mai, suivant en cela les recommandations de la Société nouvelle d’Éducation, de rendre l’enseignement laïque. Les municipalités suivent le mouvement, offrant même dans certains arrondissements le repas et les vêtements aux écoliers. Voilà l’école sécularisée. On décroche les crucifix des salles de classe, on déclare interdit l’enseignement religieux. Mais la laïcité selon Vaillant ne s’arrête pas là : il veut aussi voir les filles autant que les garçons avoir accès à l’éducation, afin que les droits politiques des femmes ne concernent pas qu’une poignée de jeunes filles privilégiées.

On va plus loin que jamais en décidant de la parfaite égalité de traitement entre les enseignants hommes et femmes.

On connait la fin de l’histoire : l’utopie termine dans un bain de sang une semaine plus tard. Le grand projet si généreux ne se réalisera pas. Pas tout de suite, en tous cas. Cependant, les graines de l’égalité avaient été semées. Les femmes, les hommes avaient côtoyé la fraternité. Rien ne serait plus comme avant. Jamais. Et Benjamin Buisson crut voir sur le pavé de Paris le « règne de la démocratie, plus accomplie qu’à Athènes, ou à Genève ». Les citoyens et citoyennes allaient apprendre à vivre, à juger, à se forger des opinions. C’était cela, la République.

Brigitte Blang


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