La Réveillère Lépeaux : acteur conséquent de la Révolution française comme révolution bourgeoise

dimanche 6 janvier 2013.
 

Parmi les principaux acteurs de la Révolution française, nous avions distingué globalement plusieurs caractérisations possibles :

Révolutionnaires de 1789 1794 : présocialistes, robespierristes, patriotes, bourgeois révolutionnaires et constitutionnels, opportunistes, contre-révolutionnaires

La Réveillère Lépeaux fait partie des acteurs radicaux et conséquents de la Révolution bourgeoise sans jamais mettre un doigt dans le mouvement pré-socialiste et pré-prolétarien.

Né en 1753 dans une famille de propriétaires terriens angevins, il suit des études de droit, devient avocat à Paris puis professeur de botanique à Angers.

Le processus pré-révolutionnaire présente un aspect plus radical en Bretagne qu’ailleurs en raison de la résistance musclée de la féodalité provinciale.

27 janvier 1789 Le soulèvement à Rennes des jeunes bretons du Tiers-état face aux ratonnades nobles marque le début de la crise pré révolutionnaire de 1789

La Réveillère Lépeaux restera marqué par cette frontière politique déterminante entre tenants de la Révolution et contre-révolutionnaires. Il fait partie des premiers et n’en changera jamais puisqu’il n’aura d’activité politique ni sous le Premier empire, ni durant la Restauration.

Actif dans la préparation des Etats-Généraux, il est élu du Tiers-Etat en 1789.

Cahiers de doléances de 1789 (tiers-état, clergé, noblesse, Etats généraux)

Il fait partie des députés actifs de la révolution bourgeoise appuyée sur un puissant mouvement populaire durant l’année 1789. Lorsque Marx affirme que la Révolution française est portée au printemps 1789 par le pouvoir législatif, il fait référence à un fort courant dont La Réveillère Lépeaux.

4 et 5 mai 1789 : Ouverture des Etats généraux à Versailles. La Révolution française, politique et juridique, en marche

17 juin 1789 Les députés du Tiers état se proclament Assemblée nationale et s’octroient le vote de l’impôt

20 juin 1789 Serment du Jeu de Paume, symbole du combat pour la souveraineté populaire

23 juin 1789 : "Nous sommes ici par la volonté du peuple et nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes"

4 août 1789 Abolition des droits seigneuriaux par l’Assemblée nationale

Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (votée le 26 août 1789)

Lors des débats sur le rôle du roi dans la nouvelle architecture politique, les acteurs de la révolution bourgeoise se divisent en trois camps :

- les partisans d’un système à l’anglaise, comme Mounier, avec droit de veto absolu du roi sur les décisions de l’Assemblée nationale (les historiens en font les initiateurs de la droite française)

- les constitutionnels favorables à un système équilibrant les pouvoirs entre le Roi et l’Assemblée. Sur la question du veto, les conciliateurs, comme Pétion ou Barnave, défendent le droit de veto suspensif, c’est à dire le recours à de nouvelles élections en cas de désaccord entre le roi et l’Assemblée

- la gauche qui se regroupe dans le club des Jacobins et s’oppose au droit de veto royal

La Réveillère Lépeaux se range dans ce troisième courant. Pourtant, il se positionne contre la radicalisation politique succédant à la fuite du roi à Varennes qui pousse dans un sens strictement républicain ; il quitte même le Club des Jacobins à ce moment-là.

Elu député à la Convention nationale en 1792, il siège parmi les Girondins. Il joue un rôle central dans le vote du décret du 19 novembre 1792 :

19 novembre 1792 La Convention nationale "accordera fraternité et secours à tous les peuples qui voudront recouvrer la liberté"

Profondément opposé à la féodalité et au cléricalisme :

- en homme des Lumières, il croit en l’importance de la Raison et de la Science et jouera un rôle important dans la création de l’Institut de France

- il pousse à une révolution démocratique dans toute l’Europe

- il veut détruire la papauté et restera sur cette position lorsqu’il jouera un rôle politique décisif durant le Directoire

- il est un des promoteurs de la théophilanthropie, du culte de la Raison et de l’Etre suprême

- il est également un soutien actif du calendrier républicain

Après la chute des Girondins (2 juin 1793), il passe dans la clandestinité.

Après l’écrasement des robespierristes et pré-socialistes, La Réveillère Lépeaux reprend un rôle politique national important :

- durant la Convention thermidorienne (participation à la rédaction de la constitution de l’An III qui marque l’affermissement de la Révolution bourgeoise au détriment d’une part de la féodalité, d’autre part du mouvement populaire

- durant le premier Directoire il est membre du Conseil des Cinq-Cents. A partir du 1er novembre 1795, il fait partie des cinq Directeurs détenteurs du pouvoir exécutif avec Reubell, Barras, Carnot et Letourneur.

Avec le Directoire se stabilise une révolution bourgeoise :

- se donnant les moyens de maîtriser le pouvoir législatif par le rétablissement du suffrage censitaire.

- laissant libre cours au triomphe de l’intérêt individuel.

Le Directoire devient rapidement synonyme de corruption. Deux grands courants progressent :

- d’une part les pré-socialistes porteurs de revendications égalitaires, avec en particulier la Conjuration des Egaux

- d’autre part les royalistes appuyés sur toutes les forces ayant intérêt à liquider les acquis de la Révolution française

Les animateurs de la Conjuration des Egaux sont emprisonnés en 1796 (245 mandats d’arrêt), plusieurs d’entre eux guillotinés ensuite

Face à la poussée de la droite royaliste et du centre droit majoritaires dans les conseils et appuyés sur un mouvement de soutien de plus en plus en plus fort, les Directeurs, La Révellière-Lépeaux allié à Barras et Rewbell mène avec le soutien de l’armée le coup d’État du 18 fructidor an V (4 septembre 1797). De nombreux députés, prêtres et journalistes sont déportés en Guyane.

Responsable des questions culturelles et religieuses, La Révellière-Lépeaux institue le culte décadaire par la loi du 9 septembre 1798 (le calendrier républicain rythme la vie quotidienne ; le décadi remplace complètement le dimanche, y compris pour les mariages ; les fêtes chrétiennes traditionnelles (Noël, Pâques...) sont remplacées par des fêtes révolutionnaires.

En 1799, lorsque la droite reprend une partie du terrain perdu en 1797, Barras reste Directeur mais pas La Révellière-Lépeaux qui se retire alors de toute activité politique.


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