Pandémie en Palestine : approfondissement de l’abject

mardi 9 juin 2020.
 

Il y a quelque chose d’étonnant, si ce n’est révoltant, dans la manière dont certains médias tissent des louanges et félicitent l’État d’Israël pour l’efficacité dont il ferait preuve dans sa lutte contre la pandémie. Peut-être conviendrait-il de mettre les points sur les « i » et de combler quelques oublis tellement opportuns qu’ils en paraissent volontaires. En commençant par une question simple : quelle est l’étendue des responsabilités de l’État d’Israël ?

Il serait erroné de les réduire au maintien du bien-être des seuls citoyens juifs de l’État d’Israël. Cet État est seul à contrôler, ô combien fermement, tout ce qui entre dans les territoires palestiniens, qu’ils soient annexés, occupés ou sous blocus. Tout, c’est-à-dire aussi le matériel médical et les fournitures sanitaires nécessaires à la lutte contre la pandémie, les maladies et les blessures. Cela fait, au bas mot, des mois, si ce n’est des années que la bande de Gaza se trouve en situation de catastrophe sanitaire. L’irruption du coronavirus ne fait qu’empirer cette situation. Ses geôliers ne peuvent prétendre que ce n’est pas de leur ressort. Mais ce dédouanement ne leur paraît pas encore suffisant.

Répression des initiatives palestiniennes contre la pandémie

Le gouverneur palestinien de Jérusalem, Adnane Gheith, et le ministre palestinien des affaires de Jérusalem, Fadi al-Hadmi, ont décidé d’agir pour protéger les habitants. Cette tentative de porter secours à la population de Jérusalem-Est, avec notamment des opérations de désinfection, a tourné court avec l’arrestation début avril des deux responsables palestiniens.

Cette semaine, la police israélienne a fermé une clinique de dépistage de la maladie Covid-19 à Silwan, quartier populaire de Jérusalem-Est. En cause : des tests de dépistage menés sous la supervision de l’Autorité palestinienne, selon la police (La Croix, 18 avril 2020).

Crachats de soldats et de colons

Des témoins oculaires ont par ailleurs rapporté avoir vu des soldats israéliens cracher intentionnellement et à plusieurs reprises sur des voitures, des murs et des seuils de porte, à Hébron, indique le Palestinian chronicle du 12 avril. Après le retrait des soldats israéliens, les travailleurs palestiniens se sont précipités pour stériliser les endroits où les soldats ont craché, craignant une infection par le coronavirus, en particulier en raison d’informations récentes selon lesquelles de nombreux soldats israéliens ont été diagnostiqués positifs.

Les colons ne sont pas en reste. Les habitants du village de Beit-Iksa ont par exemple rapporté « que des colons israéliens de la colonie de Ramot (construite, en violation du droit international, sur des terres appartenant à Beit Iksa) ont également craché sur des voitures entrant et sortant de ce village entouré de colonies israéliennes illégales. Un groupe de jeunes du village a désinfecté la route et les voitures, rapporte l’agence de presse palestinienne WAFA. La colonie de Ramot signalait à ce moment 17 cas de coronavirus sur une population de 550 personnes »*.

Comment ne pas penser aux délinquants d’il y a quelques années, menaçant de mordre les policiers venus les arrêter en criant « J’ai le SIDA » ? Le rêve fou des partisans les plus fanatiques du gouvernement israélien, qui en sont aussi les piliers, ressemble fort à cet acharnement à faire disparaître ou périr la majorité indigène des territoires qu’ils dominent. Leurs crachats dépassent ici leur caractère de marque de mépris ou d’insulte pour se transformer en armes biologiques fantasmées très concrètes*.

À côté de ces réalités, le fait de confier la surveillance des personnes contaminées via leur téléphone mobile au Shin Beth (Service de sécurité intérieure israélien) apparaît presque comme anecdotique. Vous plairait-il de voir les RG (Renseignements généraux) prendre en charge le suivi de la pandémie en France ?

Philippe Lewandowski


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