L’extrême droite veut utiliser le football pour distiller son racisme

jeudi 22 décembre 2022.
 

1) Marion Maréchal et Zemmour donnent le ton

Voici quelques jours, Eric Zemmour avait lancé clairement sa campagne de réfutation du slogan "black, blanc, beur" de 1998 en s’insurgeant contre "le fait qu’il y ait 8 ou 9 joueurs d’origine africaine ou de couleur noire dans l’Équipe de France".

Interrogée par Sonia Mabrouk, Marion Maréchal Le Pen, vice présidente de Reconquête. a complété ce 15 décembre, sur Europe 1 enfonçant le clou contre l’équipe de France victorieuse en demi-finale de la coupe du monde qui compte "trop de visages issus de l’immigration".

"Ce qui est sûr c’est que le visage de cette équipe est composée de visages issus de l’immigration qui sont surreprésentés dans cette équipe indéniablement".

Et d’ajouter : "Donc je ne suis pas sûre qu’elle soit représentative des équilibres entre français d’origine française et français d’origine immigrée".

Heureusement encore que l’équipe de France gagne, sinon nous aurions dû subir une campagne pire qu’en 2010.

Football et racisme : Evra et Anelka ont-ils déshonoré la France en Coupe du monde ? (juin 2010, Jacques Serieys)

Et n’oublions pas que dans cette affaire de composition des équipes de football, nous dormons sur un volcan.

Quotas ethniques dans le football : Le DTN suspendu Laurent Blanc s’excuse La FFF aurait listé les binationaux (9 articles)

2) France-Maroc. Quand l’extrême droite tente de rafler la victoire

De Zemmour au Rassemblement national, l’affiche de la demi-finale suscite les pires outrances de nationalistes en plein délire xénophobe de «  haine anti-France  », voire de «  colonisation inversée  ».

https://www.humanite.fr/sports/mond...

Y avait-il vraiment urgence à demander à un multirécidiviste de la condamnation pour haine raciale son avis sur France-Maroc  ? Pour BFM TV, cela a semblé être le cas, le 11 décembre, lorsque Éric Zemmour s’est vu demander si «  les images de liesse des supporters marocains  », après la victoire de leur équipe contre le Portugal, lui «  posent un problème  ». Oui, répond sans surprise le président de Reconquête  : «  Avec eux, ça se finit en émeute. Est-ce que, quand les Argentins célèbrent une victoire, ça finit en émeute  ?  »

BFM TV y gagne sa petite séquence polémique qui va alimenter ses réseaux sociaux. Éric Zemmour, quelques nouvelles minutes d’exposition médiatique de ses outrances. L’ex-polémiste a surtout donné, ce soir-là, le coup d’envoi d’un festival de récupération du match par l’extrême droite.

La proposition d’interdire les drapeaux marocains à Marseille

Du Rassemblement national aux franges ultra-identitaires, ils rêvent tous de voir la rencontre déborder. Pas sur le terrain, mais dans les rues de France. Et se sont relayés, depuis samedi, pour agiter leur «  crainte  » de violences, mercredi prochain, bien aidés par la complaisance de plusieurs médias. «  À chaque fois qu’il y a des matchs avec des équipes du Maghreb, c’est vrai avec le Maroc mais c’est aussi vrai avec l’Algérie, on a à chaque fois certains supporters qui se permettent des débordements qui sont intolérables  », a anticipé le président du RN Jordan Bardella, le 12 décembre, toujours sur BFM.

Le sénateur RN des Bouches-du-Rhône Stéphane Ravier est allé plus loin, en proposant d’interdire par arrêté préfectoral les drapeaux marocains à Marseille, le soir du match. Si on voulait provoquer l’ire des supporters des Lions de l’Atlas, on ne s’y prendrait pas autrement. Les fans du Maroc ont déjà été ciblés, à Fréjus, à la suite du huitième de finale Maroc-Espagne. Après des affrontements entre quelques jeunes et des policiers à la Gabelle, la mairie lepéniste a décidé de supprimer toute subvention municipale à ce quartier populaire.

Les binationaux sommés de choisir

Derrière cette rhétorique, l’extrême droite tente d’entonner le vieux refrain des «  faux Français  », voire des «  ennemis de l’intérieur  ». «  C’est une génération qui arrive à l’âge adulte en France et qui se comporte comme les ressortissants d’un État étranger en exprimant en permanence un sentiment de revanche  », juge par exemple Jordan Bardella.

Les binationaux franco-marocains sont sommés par l’eurodéputé RN de «  choisir, à un moment donné  », entre la France et le Maroc. Et se verront reprocher ce choix s’ils préfèrent, le temps d’un match, le drapeau rouge à étoile verte. Le proche d’Éric Zemmour, Damien Rieu, y voit, lui, carrément un «  choc de civilisation  », arguant que l’équipe du Maroc est soutenue par les islamistes et le Hamas face à la culture occidentale.

Cette stigmatisation des supporters maghrébins a du reste débuté très tôt dans la compétition. Dès les phases de poule, après la victoire des Marocains sur la Belgique (entachée de quelques heurts outre-Quiévrain), l’hebdomadaire d’extrême droite français Valeurs actuelles publiait cette une choc  : «  Bienvenue au Belgikistan  », assortie de l’image d’un supporter marocain posant devant une voiture brûlée dans les rues de Bruxelles. Et accompagnée de ce surtitre  : «  Bientôt en France  ». On les sent presque savourer. Souhaitons, qu’importe l’issue du match, une grande liesse populaire pour gâcher la leur.

3) Italie : Des supporters marocains agressés par des militants d’extrême droite

Plusieurs supporters marocains qui célébraient la victoire du Maroc contre l’Espagne en huitièmes de finale, ont été agressés par des militants d’extrême-droite en Italie. D’énormes dégâts matériels ont été enregistrés et 13 agresseurs arrêtés.

https://www.bladi.net/agression-sup...

L’exploit des Lions de l’Atlas contre la Roja, mardi au Qatar a été célébré dans plusieurs capitales du monde. Mais, les manifestations des supporters marocains n’ont pas été acceptées à certains endroits.

C’est le cas à Vérone en Italie où des hommes cagoulés ont agressé les supporters marocains alors qu’ils célébraient leur équipe nationale, s’en prenant aux voitures avec des chaînes et des bâtons, rapporte la presse locale. Les attaques ont causé des dommages à quatre véhicules, tandis qu’une femme qui a été touchée par « des éclats de vitres brisées » a été légèrement blessée.

Selon le rapport de la police, 13 agresseurs soupçonnés d’appartenir à un mouvement d’extrême-droite ont été interpellés. Ils sont accusés d’avoir « endommagé des biens et blessé des personnes après leur violente agression contre les voitures des supporters. »

4) Après le match France/Maroc, l’extrême droite passe à l’attaque dans plusieurs villes

Lyon, Paris, Montpellier, Nice… Après France/Maroc, l’extrême droite a attaqué plusieurs villes du pays. Loin du monde imaginaire des plateaux de CNEWS, la fraternité a primé entre les supporters des deux équipes. Puis l’extrême droite a gâché la fête. Ratonnades, attaques au mortier, expéditions punitives : plusieurs blessés sont à dénombrer. Sans parler du climat nauséabond que l’extrême droite propage en France petit à petit. Une peste brune se diffuse, sans réaction aucune du ministre de l’Intérieur et du reste de la macronie. Le tout, dans un contexte politique précis : 89 députés RN élus à l’Assemblée nationale, explosion des attaques fascistes et chaines d’infos d’extrême droite en roue libre. Les groupuscules d’extrême droite menacent la République. Ils doivent être dissous sans attendre. Notre article.

Ratonnades, attaques au mortier, expéditions punitives : l’extrême droite est passée à l’attaque après le match France/Maroc

L’extrême droite s’est déchainée à la suite de la demi-finale France/Maroc. Loin du monde imaginaire des plateaux de CNEWS, la fraternité a primé entre les supporters des deux équipes. La fraternité, mais aussi le respect propre à toute compétition sportive, et le sentiment d’avoir assisté à un match historique. Sur les plateaux de la chaine d’extrême droite, on attendait la bave aux lèvres un déchainement de violences pour hurler à la « pré-guerre civile ». Avaient-ils prévu que la violence viendrait en réalité de fachos excités ?

À Montpellier, une quarantaine de fascistes ont attaqué des supporters à coups de… mortier ! Plusieurs blessés sont à dénombrer. À Nice, des identitaires ont lancé des ratonnades contre des supporters marocains isolés. À Lyon, plus d’une cinquantaine de militants d’extrême-droite se sont armés (battes de baseball, gazeuses, bar en fer, matraque…) à proximité de leurs locaux dans le Vieux-Lyon puis sont partis attaquer des jeunes supporters du Maroc isolés.

Une cinquantaine de personnes proches de l’ultra droite s’apprêtaient à rejoindre les Champs-Élysées à Paris à l’issue de la demi-finale France/Maroc. Ils étaient prêts à en découdre. 47 ont été arrêtées, dont 15 fichés S, avant d’être placées en garde à vue (Le Parisien). Parmi eux des militants du GUD (Groupe Union Défense, ndlr) récemment réactivé par des militants d’extrême droite, mais aussi de Génération Identitaire, groupuscule dissout en 2021.

Dans les personnes interpellées, nous retrouvons Marc de Cacqueray-Valmenier, leader du groupuscule d’extrême droite officiellement dissout, « les Zouaves Paris ». Ce dernier est parti prendre les armes à l’étranger fin 2020 au Haut-Karabakh, lieu d’une « quasi-guerre sainte selon la propagande d’extrême droite, qui y voit une nouvelle bataille entre l’Occident chrétien et « l’envahisseur » musulman » (Streetpress).

Explosion des attaques fascistes, rhétorique à la sauce CNEWS et accession du RN à l’Assemblée nationale

Ce déchainement de violence intervient dans un contexte d’explosion des attaques fascistes dans notre pays. Mercredi 7 décembre, une quinzaine de fachos a attaqué la faculté de Bordeaux, où les députés insoumis Carlos Martens Bilongo et Louis Boyard tenaient une conférence. Deux jours plus tard, une réunion publique devait se tenir à Toulouse avec cinq députés insoumis. L’extrême droite a propagé sa haine en tagant le lieu où la réunion devait se tenir.

Des tags emplis de haine, notamment « qu’il retourne en Afrique ! ». Carlos Martens Bilongo, député LFI insulté par un député RN à l’Assemblée nationale devait participer à cette réunion publique. En octobre dernier, l’extrême droite s’est déchainée dans plusieurs villes du pays. Des violences, menaces verbales et physiques ont eu lieu à Lyon, Rennes, Strasbourg, Paris, Metz, Perpignan. « Immigrés assassins ! », pouvait-on entendre dans leurs manifestations nauséabondes.

L’accession de 89 députés Rassemblement National (RN) à l’Assemblée nationale, couplée au quasi-silence de la minorité présidentielle sur la montée de la violence d’extrême droite, ses votes communs avec le RN pour défendre le capital contre le travail, une normalisation du RN, ex-FN, fondé par un ancien Waffen-SS… L’explosion des attaques fascistes est le résultat d’un contexte politique précis.

Concernant plus précisément le match d’hier soir, cela faisait quelques jours que les éditorialistes d’extrême droite chauffent à blanc les esprits. CNEWS était, comme souvent, en roue libre en parlant de cette demi-finale historique. Florilège : Ils ne se considèrent plus comme Français », « le symbole de la conquête par excellence », « un fond de revanche coloniale », « remplacement populationnel », « conquête de l’espace public », « pré guerre civile », « il y en a marre de ces intifadas ». Difficile de croire que cette rhétorique n’aurait pas un tant soit peu remonté à bloc certains fachos prêts à en découdre. La situation est grave. L’extrême-droite est, plus que jamais, un danger pour la République.


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