Les étudiants de kinésithérapie ont actuellement entamé un mouvement de protestation contre l’augmentation de leurs frais de scolarité qui peuvent atteindre jusqu’à 40 000 euros. La dérive qu’ils contestent est en marche depuis plusieurs années dans de très nombreuses formations. Il s’agit là de la conséquence de l’abandon des universités publiques par les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années.
La logique libérale a été initiée par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) portée par Valérie Pécresse lorsqu’elle était ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Cette loi instaure une soi-disant autonomie des universités qui a eu pour conséquence au fil du temps de diminuer leur financement par l’État pour les pousser à aller chercher des fonds privés pour compléter leur budget, les mettant ainsi en situation de précarité.
Ainsi, alors que le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter, leur budget a été diminué cette année de 900 millions d’euros et la loi de finances pour 2025 prévoyait une poursuite de cette cure d’austérité. Cette politique est clairement organisée pour ouvrir la porte au marché de l’enseignement supérieur privé. Le cas des écoles de kiné est emblématique. Il s’agit d’un secteur où les structures privées étaient très présentes et face à une incapacité des universités publiques d’offrir un nombre de places suffisantes, elles ont appliqué la loi du marché : « Tout ce qui est rare est cher, je suis rare donc je suis cher ».
Face à cette situation, les étudiants français sont de plus en plus nombreux à s’endetter pour payer leurs études. Nous sommes en train de suivre le chemin des États-Unis où la dette étudiante dépasse les 1 700 milliards de dollars avec des étudiants obligés de rembourser leur dette sur parfois plus de 20 ans. Il faut bien comprendre que la logique des néolibéraux est que le marché investisse plus largement en France ce secteur aujourd’hui financé essentiellement par des fonds publics.
Leur objectif est strictement identique à celui qu’ils visent dans le domaine de la santé. Regardons les chiffres de plus près, le budget de l’enseignement (Éducation nationale et Enseignement supérieur et de la recherche) en 2024 est de plus de 350 milliards. En en faisant basculer la moitié vers le secteur privé à but lucratif, vous pouvez imaginer les bénéfices potentiels pour les actionnaires.
Les termes de prédateurs ou de fossoyeurs ont été utilisés pour les vautours qui ont investi dans le domaine de la santé. Nous pouvons utiliser les mêmes qualificatifs pour ceux qui opèrent dans le domaine de l’enseignement. Un récent scandale est d’ailleurs emblématique des dérives actuelles avec la fermeture d’une école de kiné à Saint-Ouen qui fournissait un enseignement très médiocre à des tarifs très élevés.
L’affaire n’a pas fait grand bruit mais il a fallu mobiliser des fonds publics pour permettre aux étudiants de poursuivre leurs études. Ainsi comme trop souvent dans notre système capitaliste, les bénéfices ont été encaissés par les actionnaires mais les conséquences de leur défaut ont été prises en charge par des fonds publics.
Christophe Prudhomme, Tribune dans L’Humanité
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