« Il ne faut pas juger la Waffen SS comme un collectif… » – En Autriche, le chef de l’extrême droite et allié de Bardella aux portes du pouvoir

samedi 25 janvier 2025.
 

Comme une impression de déjà-vu, et pourtant… en début de semaine le président de la République autrichienne, Alexander Van Der Bellen, issu des écologistes, demandait au leader du parti d’extrême droite autrichienne du FPÖ (parti de la liberté de L’Autriche) Herbert Kickl, allié de Jordan Barella en France, de former un nouveau gouvernement.

Arrivé en tête lors des élections législatives de septembre 2024 avec près de 29 % des suffrages, le FPÖ (parti fondé par d’anciens nazis) apparaît en réalité comme un quasi habitué des responsabilités gouvernementales. Ce dernier ayant en effet participé à diverses coalitions avec la droite au tournant des années 2000 et plus récemment de 2017 à 2019.

Les élections de 2024 marquent cependant un tournant, car si le FPÖ semble être un parti de gouvernement presque comme les autres en Autriche, c’est la première fois que le président de la République offre à l’extrême droite la possibilité de le diriger. Il était en effet généralement de rigueur que les conservateurs de l’ÖVP obtiennent la chancellerie dans le cas des accords gouvernementaux. C’est en tout cas ce qui s’était passé lorsqu’en 1999 le FPÖ arriva très légèrement devant les conservateurs de l’ÖVP. Notre article.

En Autriche, l’extrême droite n’a jamais été autant proche du pouvoir

L’arrivée possible de Kickl à la chancellerie en 2025 résulte notamment de l’échec des négociations de coalition entre le chancelier sortant de droite (voire droitier) Karl Nehammer, avec les socialistes du SPÖ et les libéraux de NEOS. Ces négociations infructueuses conduisirent à un changement de cap des conservateurs, préférant de nouveau négocier avec l’extrême droite, alors qu’une violente rupture, au parfum de Russie, avait fait imploser leur dernière alliance en 2019. Négocier quitte à laisser à Herbert Kickl les clefs du pays ?

Les conservateurs posent tout de même quelques vagues conditions comme le maintien de la « démocratie libérale », le respect de l’État de droit et de la liberté de la presse ainsi qu’une politique extérieure toujours tournée vers l’Europe et non vers Moscou. Il est vrai que ces quelques thématiques apparaissent comme les grands sujets de discordes possibles entre les deux partis de droite, qui se retrouvent plus aisément sur les questions « d’identité » et d’immigrations…

Le schéma reste cependant inédit. Si l’extrême droite ne devance finalement les conservateurs que d’une poignée de points, ces derniers dégringolent de plus de 11 % quand le FPÖ en gagne près de 13, tout en atteignant des sommets inédits dans les sondages depuis lors. S’opère alors un retournement dans le rapport de force entre des conservateurs, très « droite décomplexée » et une extrême droite radicale, à l’image de son chef de fil Herbert Kickl. Le scénario ressemble globalement à ce qui a pu se produire en Italie avec Salvini, puis Meloni « aux dépens » de Forza Italia.

Pour aller plus loin : 80 ans après, l’ombre de l’extrême droite s’étend sur l’Europe

Selon Herbert Kickl, tous les SS ne sont pas des criminels

Celui qui se revendiquait Volkstribun (tribun du peuple) se rêve aujourd’hui en Volkskanzler (Chancellier du peuple), reprenant sans vergogne une sémantique très hitlérienne. Toujours dans cette thématique fleurie, ce dernier affirme qu’il ne faut pas juger la Waffen-SS comme un collectif, en d’autres termes, tous les SS ne sont pas des criminels… Propos très similaires à ceux qu’avaient tenus Maximillian Krah, ex-chef de fil de l’AFD allemande (extrême droite) pour les élections européennes.

Ces déclarations graves ayant provoqué la dislocation du groupe Identité et Démocratie au Parlement européen où RN, AFD et FPÖ étaient alliés. Là où Jordan Bardella et Marine Le Pen avaient dénoncé publiquement leur ex-allié Krah pour ses propos, le feront-ils pour l’autrichien ? En tout cas, le possible futur chancelier autrichien apparaît souriant lorsqu’il pose à côté de son non moins souriant nouveau président de parti au niveau européen, un certain Jordan Bardella…

Pour compléter le portrait de Kickl, il convient d’ajouter toute une valse de propos infâmes, qu’ils soient de sa plume ou de sa voix (ce dernier ayant écrit de nombreux discours pour divers cadres et meneurs de l’extrême droite autrichienne). Ce dernier naviguant entre allusions antisémites et propos islamophobes et xénophobes, le sieur est en outre un adepte de la théorie du grand remplacement, vantant les vertus d’une « Autriche forteresse ». Par ailleurs, il voulait « concentrer » les migrants dans des centres, allusion explicite à des heures sombres

Il se prévaut aussi d’élucubrations complotistes sur les vaccins contre le coronavirus qualifié « de vaste expérience d’ingénierie génétique dont l’issue est incertaine ». Au niveau international, le possible futur chancelier se dit admirateur de Viktor Orban, tout en adoptant des positions favorables à la Russie, toujours en guerre contre l’Ukraine.

Alors que tous les regards sont portés sur l’Allemagne et sur une AFD toujours plus radicalisée, c’est chez le voisin autrichien que le danger semble le plus imminent. Contrairement à la république alpine, le cordon sanitaire contre l’extrême droite semble se maintenir outre-Rhin, mais jusqu’à quand ? En tout cas, les manifestations s’amplifient dans plusieurs grandes villes autrichiennes et notamment à Vienne où les organisateurs revendiquent la présence de 50 000 personnes mobilisées le jeudi 9 janvier contre la formation d’un nouveau gouvernement FPÖ – ÖVP.


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