La « Cocarde étudiante », syndicat d’extrême droite

jeudi 30 janvier 2025.
 

Vivier de jeunes parfois très radicaux et violents, la Cocarde est un syndicat étudiant d’extrême droite. Une étiquette qu’il récuse d’ailleurs à cor et à cri comme le fait Bardella dans son torchon, se faisant passer pour les victimes d’une diabolisation outrancière et injustifiée. Injustifiée ? Vraiment ? C’est ce que nous allons voir. Notre article.

La cocarde étudiante : de qui parle-t-on ?

La cocarde compte environ 500 membres, dont 200 sur Paris. L’association revendique son combat contre le « gauchisme culturel », le blocage des facs, se prononce pour la préférence nationale, ainsi que pour une forme de souverainisme antilibéral, la parole est ouvertement masculiniste, contre la « propagande » LGBT+ et l’écriture inclusive.

Imprégnée des théories de Renaud Camus lorsqu’elle dénonce le « péril migratoire » et refuse le « changement de peuple », la Cocarde se fait le « chantre » des théories du grand remplacement, attirant ainsi nombre de militant·es issu·es de la nébuleuse fasciste.

Nombre de ses membres naviguent donc en parallèle au sein des différentes mouvances violentes nées de la dissolution de Génération Identitaire, du Bastion Social, du Groupe Union Défense (GUD), Les Zouaves Paris ou d’autres toujours en activité comme l’Action Française (mouvement royaliste et nationaliste) et assurent ainsi, c’est leur ambition avouée, un rôle d’entremission et de structuration.

Il est à noter également que l’action prosélyte du syndicat ne se limite pas aux seules facultés. Depuis peu, le réseau se développe dans les lycées, en quête de jeunes hommes et de jeunes femmes faciles à endoctriner de leurs idées racistes et haineuses maquillées avec des discours et des codes de communication efficaces empruntés aux réseaux sociaux.

Par exemple au travers de campagnes pour l’écologie, favorisant une approche plus neutre politiquement et faire glisser lentement le curseur politique vers une droite extrême et nauséabonde. S’agissant de recruter de jeunes adultes avec un esprit critique c’était déjà craignos, mais ici, vos enfants, vos frères et vos sœurs, vos amis sont en danger.

Si la cocarde nie être associée au FN/RN, le syndicat entretient pourtant de manière documentée des liens avec le Rassemblement national de la jeunesse (ex-Front National de la Jeunesse, ex Generation Nation) au travers de formations idéologiques et militantes, ou d’afterwork très arrosés.

Des liens tout sauf anecdotiques. Invitant à de multiples reprises des responsables du parti de la haine (mais aussi de Reconquête) comme Bardella ou Marion Maréchal (qui figure en photo sur leur site) pour animer des conférences, le syndicat a donné à ses membres la consigne de voter FN/RN lors des présidentielles de 2022.

Cette porosité avec le parti fondé par Jean-Marie Le Pen ne s’arrête pas là. Plusieurs syndiqué·es se sont retrouvé·es sur les listes du parti au dernières municipales. La Cocarde fournit également nombre de collaborateur·ices parlementaires très actif·ves et influent·es auprès des député·es FN/RN à l’Assemblée nationale ou au Parlement européen.

Un de leurs anciens présidents est par exemple devenu attaché parlementaire de Bardella avant d’exercer la même fonction au Parlement européen auprès de Catherine Griset, actuellement entendue dans l’affaire des assistant·es du RN. Certain·es député·es, bien que cherchant généralement à le cacher, stratégie de normalisation oblige, sont même passé·es par leurs rangs.

Ainsi, malgré l’hypocrisie latente visant à ne pas heurter la sensibilité de leurs électeurs, ni entacher l’image du RN avec les actions violentes des membres du syndicat, difficile de ne pas saisir qu’à la manière de l’Action Française (dont est issu Darmanin), la Cocarde a vocation à recruter, former et fournir ses futurs cadres au FN/RN.

StreetPress a identifié de son côté plusieurs militants issus de la cocarde, actuellement en fonction au Palais Bourbon ou au Parlement européen.

L’insoumission relate pour sa part la porosité existante entre ces groupuscules et le RN

Pour aller plus loin : Extrême-droite : qui se cache derrière Marine Le Pen et Éric Zemmour ?

Estimant qu’il serait vain de dénoncer la porosité entre le FN/RN, la cocarde et ces groupes violents sans apporter quelques illustrations de cette violence et rapporter quelque une des nombreuses sanctions juridiques prononcées contre leurs membres, nous avons effectué un petit recensement non exhaustif de leurs actions pour vous.

Pour l’exemple, citons les liens entretenus avec les « Zouaves Paris » qui venaient en renfort de leurs collages, tractages et manifestations. Dissout en janvier 2022, le décret dispose que ce groupuscule était « à l’origine de nombreux et récurrents agissements violents », qu’il propageait un discours « ouvertement raciste » et qu’il diffusait « régulièrement des images reprenant les symboles de l’idéologie nazie », soutenant « le concept de supériorité des “Blancs” » et valorisent « les comportements violents à l’encontre des homosexuels et transsexuels ».

Des faits que ne pouvaient ignorer les responsables de la Cocarde faisant appel à eux. D’autant que les responsables faisaient parfois eux même partis de ce groupe ou s’en montraient très proche. Sur son compte instagram, Luc Lahalle, ex-président du syndicat, devenu attaché parlementaire de Bardella puis de la député européenne C. Griset, publie une photo où il pose avec Aloys Vujinovic, figure des Zouaves.

Petite chronologie d’un syndicat nauséabond

Mai 2018, la victime d’un passage à tabac sur un campus parisien fini aux urgences, bilan : fractures au visage et points de sutures. L’Unef dénonce l’attaque, plusieurs sources identifient des militants de l’Action française et de La Cocarde.

Octobre 2019, fac de Nanterre, la Cocarde s’invite pour les élections étudiantes. Leurs tractages virent systématiquement à l’affrontement. Les Zouaves Paris – qui ont depuis été dissous pour leur violence comme expliqué plus haut– viennent en renfort du syndicat étudiant. Ils revendiquent même, photo à l’appui, leur présence sur place et avoir « chassé » sur le campus, armés de béquilles.

Tours, janvier 2020, la Cocarde attaque des étudiant·es en grêve avec l’Union des étudiants tourangeaux (Udet), un groupuscule proche de la mouvance néofasciste. L’Udet, communiquera sur des « affrontements » et des adversaires laissés « dans un piteux état ». Même moment, même circonstances, Paris, des militants de La Cocarde attaquent des étudiant·es mobilisé·es devant Assas.

Mars 2020, Besançon, lors d’un meeting de Philippe Poutou, un groupe agresse un militant « gauchiste ». Théo Giacone, responsable local de La Cocarde, sera identifié par témoin. Paris, novembre 2021. Mobilisation contre les violences faites aux femmes.

Des militants fascistes débarquent armés de barres en fer et provoquent une rixe suite a l’indignation des manifestant·es lorsque Némésis, groupe femonationaliste s’affiche avec une banderole islamophobe : « On est chez nous ». Le commando dénombre au moins trois membres de La Cocarde : Stanislas d’Elloy, Vianney Vonderscher, Tim Frey, respectivement représentant du syndicat à Nanterre et militants.

7 décembre 2021, fac de Jussieu, pendant que La Cocarde tracte pour instiller sa propagande, un étudiant de gauche se fait agresser par les Zouaves. La victime raconte : « Apparemment, ils rôdaient dans le quartier pour protéger les étudiants d’extrême droite de l’éventuelle arrivée d’antifas ». Même période, fac de Tolbiac, tabassage d’un jeune homme pris pour cible par les zouaves en marge d’un autre tractage de la cocarde.

Février 2024, Lyon, trois étudiants de la cocarde commettent une agression raciste au couteau. L’un d’eux, tête de liste de la cocarde pour les élections du CROUS sera placé en garde à vue, un autre, porte-parole du syndicat écope de 6 mois de prison ferme pour les faits. Mars 2022, Génération Zemmour, La Cocarde étudiante et des néonazis de Jeunesse Saint Roch tractent à la fac Paul-Valéry de Montpellier, cagoulés et armés (gants coqués, gazeuses, matraques télescopiques), et attaquent des étudiant·es de gauche.

Montpellier fin janvier 2024, des militants d’extrême droite venus en nombre intimident les manifestant·es qu’ils estiment être de gauche, et empêchent leurs prises de parole, comme s’en vantera le torchon d’extrême droite « Livre Noir ». Insultes, intimidations et menaces pleuvent également sur les reporters présent·es.

Issu du groupe, un militant cagoulé et armé de gants coqués passe même à tabac un homme qui alerte sur la tentative de récupération par l’extrême droite de cette mobilisation. L’agression fera le tour des réseaux sociaux et les nervis seront identifiés par la Jeune Garde comme étant membres de divers groupuscules réputés violents dont membres de la Cocarde.

Les violences d’extrême droite, en chiffres

À celles et ceux qui, biberonné·es à la propagande des médias bolloréens, seraient tenté·es de renvoyer dos à dos les violences de la gauche antifasciste et celle des milices de l’extrème droite, nous rappelons les information données par le rapport nommé « Vioramil » (« Violences et radicalités militantes en France depuis les années 1980 », commandé par l’Agence Nationale de la Recherche).

En effet, la France compte environ 3300 militant·es au sein de groupuscules d’extrême droite, dont 1300 sont fiché·es « S ». On y apprend également qu’environ 70% des actes violents militants ont été commis par des membres de groupuscules d’extrême droite.

La droite radicale étant responsable de 17 morts sur la période étudiée allant de 1980 à l’année 2019. Depuis 2019, au moins cinq autres meurtres sont à ajouter à cet odieux constat. Sur la même période, « l’ultra gauche » ne dénombre 4 victimes, toutes au compte de l’action directe durant les années de plomb. Rien depuis plus de 30 ans.

C’est également près de 130 arrestations effectuées par les forces de l’ordre pour des actes de terrorisme d’extrême droite entre 2011 et 2022. Les chiffres comprennent les attentats perpétrés, avortés et déjoués. Officiellement, les forces de l’ordre ont enregistré une hausse des infractions en raison de l’origine ou la religion entre 2017 et 2022.

Les services de gendarmerie ou de police ont enregistré 6 555 crimes et délits et 5 983 contraventions racistes et discriminantes en 2022 contre 5000 crimes et délits en 2020.

Vous l’aurez compris, le renouveau des cadres du FN/RN ne se distingue en rien de l’ancienne garde du parti. Sous le costard cravate et les bonnes manières censées faire illusion pour les moins bien renseignés d’entre nous, leurs idées restent tout aussi radicales et dangereuses. Elles s’accompagnent d’une sympathie pour les acteurs et leurs actions violentes, de passage à l’acte, et constituent un corps politique qui continuent de frayer avec les franges les plus extrêmes et les plus nauséabondes du paysage politique français.

N’ayant rien à envier au nationalisme des heures les plus sombres de notre histoire dans sa logorrhée idéologique, ses victoires électorales quelle doit en grande partie à la propagande déversées par les médias de certains milliardaires et à la désinformation, lui offrent une tribune médiatique et des ressources financières permettant de développer les structures qui assurent le recrutement et la formation des cadres de demain comme la Cocarde.

Pire, elles les incite au passage à l’acte et aux intimidations, selon les mêmes procédés employés par les milices nazis dans les années 30 et qui ont permis son accession au pouvoir.

Par A. G.


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