Le livre noir du capitalisme (par GILLES PERRAULT)

mercredi 6 juin 2018.
 

« Il faudrait pouvoir écrire le livre noir du capitalisme pour montrer à quel point ce système est odieux parce qu’il tue des millions de personnes et qu’il dépossède tous les autres de leur humanité, pour montrer comment ce système divise le monde en deux catégories d’êtres humains plus sûrement qu’aucun système totalitaire n’a pu le faire. Et nous finissons par accepter cette vision bipolaire du monde comme inéluctable. Tout notre monde marchand, moderne, publicitaire concourt à tenter de nous faire admettre qu’il n’y a pas d’autre solution. Et pourtant c’est faux. »

Fin XIXe siècle - début du XXe

Les dernières répressions anti-indiennes aux USA, qui virent le terme du génocide engagé au XIXème siècle : 100 000

La guerre anglo-boer (pour le contrôle de l’Afrique du Sud) 1902 : 100 000

Victimes des conquêtes coloniales de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle (dont la conquête de la Corée par le Japon, 1908) : 500 000

La guerre russo-japonaise (1904-1905). La seule bataille de Moukden fit plus de 100 000 morts : 300 000

La répression de la Révolution de 1905 en Russie : 100 000

La guerre italo-turque pour la Tripolitaine (1911) : 50 000

Les guerres balkaniques (1912-1913) entre la Turquie, la Serbie et la Bulgarie : 500 000

Le génocide arménien en Turquie : 1 000 000

La première Guerre Mondiale (1914-1918) : 8 500 000

La guerre civile en URSS, les famines et les épidémies consécutives aux interventions étrangères et au blocus par l’Occident : 6 000 000

Les répressions après le mouvement révolutionnaire dans les différents pays d’Europe, Finlande, Pays-Baltes, Hongrie, Allemagne, Pologne, Roumanie, Bulgarie (1918-1923) : 200 000

La guerre gréco-turque (1920-1922), avec plus de 1 500 000 exilés : 100 000

Les victimes du fascisme en Europe avant la Seconde Guerre Mondiale (1924-1939) : 150 000

La guerre franco-espagnole contre les marocains du Rif (1925-1926) : 50 000

Les interventions militaires des USA en Amérique centrales, en Amérique du Sud et aux Caraïbes (1910-1940) : 50 000

La guerre du Chaco pour son pétrole, entre la Bolivie et le Paraguay (1931-1935) : 150 000

Les victimes des famines et des épidémies aux Indes, en Chine et en Indochine (1900-1945), dont 6 000 000 pour la seule Chine : 8 000 000

Les répressions massives et la guerre civile déclenchée par Tchang Kaï-Chek en Chine (1927-1937) : 1 000 000

La guerre d’agression japonaise en Chine (1931-1941) : 1 000 000

La guerre du fascisme italien en Ethiopie : 200 000

La guerre civile en Espagne, déclenchée par Franco, soutenue par Hitler et Mussolini et facilitée par la "non-intervention" : 700 000

Seconde partie du XXe siècle

La Seconde Guerre Mondiale, victimes militaires et civiles, y compris déportés et Holocauste : 50 000 000

La guerre française en Indochine (1946-1955) : 1 200 000

La guerre américaine au Vietnam (1956-1975) : 2 000 000

Les répressions colonialistes d’après-guerre en Algérie (1945), Maroc, Tunisie et Afrique noire : 500 000

La répression colonialiste à Madagascar : 800 000

Les massacres indo-pakistanais consécutifs à la partition de l’Inde (1948), dont 14 millions de personnes déplacées : 300 000

La Guerre en Algérie (1956-1962) : 1 200 000

Les massacres anti-communistes en Indonésie, après septembre 1965 : 1 500 000

La guerre et les répressions au Bengale Oriental / Bengladesh (chiffres d’Amnesty International) : 3 000 000

Les quatre guerres israélo-arabes au Proche-Orient (1948-1956-1967-1973), dont 700 000 palestiniens déplacés 300 000

Les répressions anti-kurdes de la Turquie, de l’Iran et de l’Irak : 200 000

La guerre Iran-Irak : 600 000

La guerre au Timor Oriental : 200 000

Les interventions directes américaines ou par guérilla ou groupes paramilitaires interposés au Nicaragua, Salvador, Guatemala, Panama, République Dominicaine, etc. : 200 000

Les répressions en Amérique Latine, soutenues par les services américains : 150 000

Guerres en Angola et au Mozambique : 3 000 000

Fin du XXe siècle

La guerre du Golfe, victimes directes : 200 000

Irak, victimes de la dénutrition dues au blocus international : 500 000

Les massacres en Somalie, au Libéria, au Rwanda, Burundi, Sierra Leone, Congo/Zaïre, Congo/Brazzaville, Afrique du Sud (Apartheid). Inclues les victimes des famines (Sahel, Somalie, Ethiopie, etc.) : 4 000 000

La guerre inter-intégriste en Afghanistan après la chute du dernier gouvernement progressiste : 700 000

Les guerres et massacres ethniques en ex-Yougoslavie, provoqués par la désintégration du pays et encouragés par les puissances occidentales (1996-1996), dont plus de 1 million de réfugiés 200 000

Entre 1990 et 1995 seulement, les guerres ont provoqué dans le monde 5 millions et demi de morts civils pour les trois quarts (Europe 250 000, Asie 1 500 000, Moyen et Proche-Orient 200 000, Afrique 3 500 000).

A ce tableau incomplet, il faut ajouter la mort par malnutrition de près de 6 millions d’enfants.

En 1997, les réfugiés et exilés se comptaient au nombre de 40 millions.

Source : "Le Livre Noir du Capitalisme", Ed. Le Temps des Cerises, Paris, 1998

« QUANT au Livre noir du capitalisme, il s’écrit tous les jours sous nos yeux et dans nos vies. Populations courbées sous la dictature des marchés financiers ; chômage ravageur ; guerres tribales déclenchées avec cynisme pour prendre le contrôle, par-delà les fantoches locaux, des richesses du sous-sol ; diktats économiques imposés par les institutions internationales et qui, en réduisant drastiquement les dépenses publiques consacrées à la santé, font chuter l’espérance de vie ; innombrables migrants condamnés à l’exil pour échapper à une condition désespérée... Et si chaque système doit se juger au nombre de ses victimes innocentes, de quel poids pèseront les 40 000 enfants qui, selon l’Unicef, meurent chaque jour de malnutrition dans le tiers-monde ? Le malheur des hommes mérite mieux qu’un livre tapageur. L’espérance d’y remédier exige davantage qu’une opération de propagande. »

GILLES PERRAULT.

Authentique histoire des violences coloniales, "Le Livre noir du colonialisme", coordonné par Marc Ferro (1), brosse le tableau de six siècles de pillages, d’oppression et d’extermination qui ont permis l’essor de la civilisation occidentale et du capitalisme. On peut parier que ce Livre noir du colonialisme n’aura pas l’impact médiatique du Livre noir du communisme, même si son préfacier, Marc Ferro, affirme dès les premières lignes, en déroutant un peu le lecteur, que les deux ouvrages "forment couple". Il ne s’agit pas, cette fois-ci, d’un produit idéologique. C’est une somme sur la gigantesque vague de violence qui a accompagné l’essor de la civilisation occidentale et du capitalisme à partir du XVIe siècle. Pour la première fois, le lecteur dispose d’une vision d’ensemble sur le coût humain et social du colonialisme. Rien de vraiment nouveau, puisque chacun des thèmes ici traités a déjà fait l’objet de nombreuses études, mais cette panoramique engendre une perception nouvelle. Le lecteur ne peut s’empêcher de tirer sa conclusion : nos sociétés occidentales - le capitalisme libéral, aujourd’hui présenté comme le meilleur des mondes - se fondent sur un immense cortège de violences, de souffrances et de mort.


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