Le voyage du bonnet rouge (chant, 1792)

jeudi 9 juillet 2020.
 

Cette composition de 1792, très chantée à l’époque, présente une grande importance.

Le bonnet rouge était porté durant l’Antiquité, en Grèce comme dans la république puis l’empire romain, par les esclaves affranchis.

Dès 1789, ce couvre-chef est utilisé par les insurgés et sans-culottes comme élément de reconnaissance, de pair avec le tutoiement "citoyen", la pique, le brûle-gueule, le pantalon, la Carmagnole. Pourquoi cette utilisation d’un vêtement disparu depuis près de deux millénaires ?

- la référence des révolutionnaires aux aspects positifs de l’Antiquité est fréquente

- ce bonnet, dit phrygien, symbolise l’affranchissement d’anciens esclaves, d’anciens sujets, devenus libres, majeurs, autonomes.

Le 10 août 1792, tournant entre révolution bourgeoise et révolution plébéienne, beaucoup d’insurgés parisiens l’arborent. A partir de cette date, il s’impose parmi le Club des Jacobins. " Il déplaît souverainement aux modérés et suscite les réserves de Robespierre" (Marc Angenot).

Le symbole du bonnet rouge va alors bien plus loin que la seule référence aux affranchis de l’Antiquité. Sa dimension sociale, révolutionnaire et internationaliste est évidente comme l’indiquent bien les paroles ci-dessous du "Voyage du bonnet rouge".

Le contenu de la chanson doit être par ailleurs mis en relation avec la flambée internationaliste de l’automne 1792 en France avec par exemple le décret du 15 décembre.

15 et 17 décembre 1792 : La Révolution française proclame la guerre révolutionnaire aux privilégiés

Après le 9 thermidor, ce bonnet rouge subit la haine de tous ceux qui veulent éradiquer les acquis et symboles de 1793. Aussi, il disparaît dans la rue. Parmi les diatribes contre les sans-culottes et leur bonnet rouge, l’ouvrage "Le drapeau rouge : rituels et discours" signale celui-ci : « la couleur de leur affreux bonnet, signe infernal de leur ralliement, [qui] entretenait la soif du sang humain qui les dévore. » (Le Moniteur, 19 Germinal an IV)"

La répression de ce ce symbole rouge et même par de la couleur rouge sous l’Empire, la Restauration et ensuite (dans le Nord Aveyron, un brave homme a été arrêté et conduit sous escorte à Rodez devant la justice pour avoir prononcé les mots de République rouge en 1848) sera dure, permanente. Pourtant, elle refleurira avec la généralisation du drapeau rouge dans la seconde moitié du 19ème puis surtout au 20ème siècle.

Le drapeau rouge de la République sociale, drapeau ouvrier socialiste communiste, étendard du genre humain

Les voyages du bonnet rouge

paroles de : Sallé

air de : On doit soixante mille francs

Le bonnet de la liberté

Brille et voyage avec fierté

En dépit des despotes. (bis)

Sa course embrasse l’univers

Partout il va briser les fers

Des braves sans-culottes. (bis)

*

Déjà ce signe rédempteur

Imprime une juste terreur

Sur le front des despotes. (bis)

Ils s’arment en vain contre lui !

Les sceptres tombent aujourd’hui

Devant les sans-culottes. (bis)

*

A Rome, à Londres, à Berlin,

A Vienne, à Madrid, à Turin,

On voit les fiers despotes, (bis)

Sur ce bonnet, en lettres d’or,

Lire tous l’arrêt de leur mort,

Au gré des sans-culottes. (bis)

*

L’esclave, enfant de Mahomet,

Libre en recevant ce bonnet

Va frapper ses despotes. (bis)

Déjà sous les yeux du sultan

Il bénit le nouveau turban

Des Français sans-culottes. (bis)

*

Enfin, de Paris au Japon

De l’Africain jusqu’au Lapon,

L’égalité se fonde. (bis)

Tyrans, le sort en est jeté :

Le bonnet de la liberté

Fera le tour du monde. (bis)


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