Intéressement : Sarkozy réinvente le capitalisme participatif

jeudi 5 juin 2008.
 

Au moment où l’on apprenait que les revenus des patrons du CAC 40 avaient augmenté de 58% en 2007, et alors que les grandes entreprises françaises continuent de faire de confortables profits, Nicolas Sarkozy lançait sa dernière grande idée pour améliorer le pouvoir d’achat des salariés de base : l’extension des mécanismes d’intéressement.

Grande (et vieille) idée du gaullisme « social », l’intéressement vise à faire profiter les salariés des bénéfices réalisés par leur entreprise. Le but : dépasser les conflits de classe et montrer que malgré les réalités économiques qui les opposent, patrons et employés ont des intérêts communs, et qu’ils gagnent ensemble à la réussite de leur entreprise. C’est beau comme du Royal.

Qu’on ne s’y trompe pas : les profits distribués ne représentent que des miettes. Au total, l’intéressement ne représente que 6 milliards d’euros, une somme que le gouvernement voudrait doubler. Lorsqu’on sait qu’une entreprise comme Total a réalisé à elle seule 12 milliards de profits en 2007, on voit bien que le compte n’y est pas. A cela, il faut enlever toutes les aides fiscales dépensées par l’Etat (et payées par les contribuables) pour inciter les entreprises à distribuer ainsi une part de leur profit. Aussi, pour intéresser les entreprises à l’intéressement, Sarkozy propose de leur accorder (en plus des aides déjà existantes) un crédit d’impôt égal à 20% des sommes distribuées. Rien que ça !

Bien entendu, cette somme versée directement aux salariés (le plus souvent en proportion de leur salaire : les plus gros salaires touchent les primes les plus importantes) est exonérée de cotisations sociales, ce qui constitue un manque à gagner pour les comptes sociaux, assurance maladie et retraites en particulier. Par ailleurs l’intéressement ne compte pas pour le calcul des pensions de retraite. Ce sont en outre des primes versées à la discrétion des véritables propriétaires de l’entreprise que sont les actionnaires. Last, but not least, l’intéressement ne concernera jamais qu’une minorité de salariés. En sont exclus tous ceux qui travaillent pour l’Etat et les administrations territoriales, les employés des très petites entreprises, ceux qui ont le malheur de travailler pour des sociétés qui ne font pas de profit, ceux qui bossent dans le secteur associatif et culturel, et bien entendu tout le secteur des services à la personne en est également exclu.

Alors pourquoi ne pas faire soumettre l’intéressement aux cotisations sociales ? Pourquoi ne pas rendre pérenne le montant de ces primes en passant outre l’avis des actionnaires ? Pourquoi l’intéressement ne peut-il pas compter pour la retraite ? M. Sarkozy, faites un effort ! N’est-il pas possible d’inventer un mode d’intéressement qui touche l’ensemble des salariés et qui permette tout cela à la fois ?

Mais ma bonne dame ! Il y a un mécanisme tout simple et magique qui existe déjà et qui permet tout cela à la fois : les augmentations salariales.

Écrit par David Cayla


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