Forum Mondial Science et démocratie (4 articles)

jeudi 4 mars 2010.
 

1) Appel mondial

2) Organisations françaises participantes

3) Présentation

4) Bilan de la réunion du 23 janvier 2010

1) Appel mondial Pour un forum social mondial sciences et démocratie

Pour un dialogue politique entre les scientifiques et les mouvements sociaux à travers la planète.

Depuis 2001, les forums sociaux mondiaux (FSM) se sont progressivement inscrits dans les agendas de milliers d’ONG, médias, syndicats, mouvements sociaux, autorités locales, institutions et même gouvernements à travers la planète, comme un moment de réflexions, de partages et de constructions d’innovations sociales, culturelles et économiques à l’échelle du monde.

Bien que l’impact des sciences et des techniques sur toutes les dimensions de notre vie en société soit plus fort que jamais, nous observons, depuis l’origine des FSM, un déficit chronique de la présence des thèmes scientifiques et techniques. Il ne s’agit ni d’un désintérêt ni d’une absence de capacité d’expertise mais d’un manque de prise en compte politique des enjeux liés à la place et au devenir des sciences dans nos sociétés, de la part des mouvements sociaux mais aussi des scientifiques.

C’est pourquoi nous pensons que la construction d’un espace de coopérations ouvertes, de débats publics, larges et démocratiques, entre scientifiques et organisations du mouvement social à l’échelle de la planète ouvrirait des perspectives nouvelles pour :

1. promouvoir et développer le statut de biens communs des connaissances de l’humanité

2. débattre sur les enjeux et les moyens pour la science et les scientifiques d’exercer leurs responsabilités sociales ;

3. renforcer l’autonomie de la recherche, défendre les missions de service public de la recherche et améliorer les conditions dans lesquelles les activités scientifiques sont menées par les étudiants, les chercheurs et les ingénieurs ;

4. renforcer la capacité des mouvements citoyens à produire de la connaissance et à être partenaires des institutions scientifiques ;

5. renforcer la capacité de nos sociétés, au Nord comme au Sud, à prendre des décisions démocratiques dans le champ des sciences et des technologies.

Les membres de la communauté scientifique et les acteurs des mouvements sociaux ont besoin de partager leurs expertises et leurs conceptions pour construire une société plus respectueuse des droits humains, des cultures et des besoins sociaux et écologiques.

C’est pourquoi, nous, membres de la communauté scientifique, organisations et citoyen(ne)s appelons à l’organisation d’un forum social mondial « sciences et démocratie » à l’occasion du forum social mondial de Bélem, en janvier 2009, au Brésil.

Source : http://fm-sciences.org/appel/index....

2) Organisations à l’origine de l’initiative française 2010 du Forum mondial sciences et démocratie :

AITEC – Association Internationale de Techniciens, Experts et Chercheurs

AFPD – Association Françaises des Petits Débrouillards

Ars Industrialis

ATTAC – Association pour la Taxation des Transactions pour l’Aide aux Citoyens

CRID – Centre de Recherche et d’Informations pour le Développement

Espaces Marx

FMTS – Fédération Mondial des Travailleurs Scientifiques

FSC – Fondation Sciences Citoyennes

SNESUP – Syndicat National de l’Enseignement SUPérieur

VECAM – Veille Européenne et Citoyenne sur les Autoroutes de l’information et le Multimédia

3) Présentation

Par Fabien Piasecki, coordinateur à la Fondation Sciences Citoyennes et secrétaire du Forum Mondial Sciences et Démocratie

Dans La Chute, Albert Camus écrivait en 1956 : « Nous sommes lucides. Nous avons remplacé le dialogue par le communiqué. ». Par cette phrase, il voulait dénoncer une forme de renoncement et l’adhésion du plus grand nombre au modèle capitaliste dominant, qu’il soit médiatique, militaire, consumériste ou industriel. Cette soumission, les sciences et techniques n’y ont pas échappé dans la mesure où elles couvrent les quatre champs que je viens de mentionner.Loin de moi l’idée de dire que les scientifiques, les techniciens et les chercheurs sont à la botte : ce serait un mensonge éhonté. Seulement, il serait tout aussi mensonger de prétendre que l’industrie privée et l’État n’orientent pas les choix technoscientifiques. Ce n’était pas vrai en 1956, ça l’est encore moins aujourd’hui. Le cas français en est la parfaite illustration mais je suis sûr que mes collègues en parleront mieux que moi lors de leur présentation ou pendant les ateliers dédiés à ces questions.

D’un autre côté, quand les associations ou les ONG dénoncent les risques inhérents à la technoscience, souvent en s’attaquant à l’aval et non à l’amont de la production scientifique, elles oublient peut-être parfois les conditions dans lesquelles la science d’aujourd’hui se fait et l’inquiétude et le questionnement au quotidien de bon nombre de scientifiques, de techniciens et d’ingénieurs.

Cet état de fait, volontairement caricaturé ici, a amené une poignée d’organisations de la société civile, parmi lesquelles la Fondation Sciences Citoyennes, les Petits Débrouillards, le Centre de Recherche et d’Informations pour le Développement ou encore VECAM à passer du stade de la posture, de l’invective, bref du communiqué à celui de la recherche du dialogue.

Autrement dit les divergences de points de vue et de positions entre le monde de la recherche et celui des mouvements sociaux méritaient bien mieux que des opinions arrêtées ou des regards en chien de faïence. D’autant plus que les deux mondes s’étaient déjà retrouvés sur le terrain des luttes.

Aussi, à l’été 2007, après plusieurs mois d’échanges avec des organisations syndicales de l’enseignement supérieur et de la recherche, avec les représentants des travailleurs scientifiques, avec des organisations de chercheurs engagés, avec des associations du mouvement social autour de la planète, un appel pour un Forum Mondial Sciences et Démocratie a pu être écrit collectivement.

Cet appel invite à la construction d’un espace de coopérations ouvertes, de débats publics, larges et démocratiques, entre scientifiques et organisations du mouvement social à l’échelle de la planète pour ouvrir des perspectives nouvelles pour :

* promouvoir et développer le statut de biens communs des connaissances de l’humanité ;

* renforcer la capacité des mouvements citoyens à produire de la connaissance et à être partenaires des institutions scientifiques ;

* débattre sur les enjeux et les moyens pour la science et les scientifiques d’exercer leurs responsabilités sociales ;

* défendre les missions de service public de la recherche et améliorer les conditions dans lesquelles les activités scientifiques sont menées par les étudiants, les chercheurs et les ingénieurs ;

* renforcer la capacité de nos sociétés, au Nord comme au Sud, à prendre des décisions démocratiques dans le champ des sciences et des technologies.

Cet appel a été lancé officiellement lors d’une conférence internationale organisée par la Fondation Sciences Citoyennes intitulé Living Knowledge – Savoirs vivants regroupant des représentants des différentes organisations que j’évoquais à l’instant. L’accueil fait à cette initiative a été tel que les bonnes volontés ont pu être réunies dans le but de mettre en place le premier FMSD.

Tout au long de l’année 2008, des rencontres ont eu lieu notamment au Canada, en Inde et au Brésil pour diffuser l’appel et fédérer de nouvelles organisations autour du processus FMSD.

Et, il y a un an quasiment jour pour jour s’est tenu le premier Forum Mondial Sciences et Démocratie, à Belém au Brésil, en marge du Forum Social Mondial. Il a rassemblé plus de 300 représentants du monde de la recherche et du mouvement social venant de 4 continents, 18 pays.

Les débats ont porté sur les enjeux des thématiques Sciences et Démocratie, sur les biens communs, sur les luttes pour la démocratisation des sciences et des choix scientifiques, sur les coopérations possibles entre sciences et société pour un monde soutenable et une responsabilité partagée, sur la gouvernance de la recherche ou encore la co-production des savoirs.

Ces débats ont montré à quel point il était nécessaire de trouver un langage commun entre les différentes parties prenantes pour pouvoir envisager des actions ou des travaux collaboratifs dans un second temps.

L’expérience de Belém a été fabuleuse dans le sens où les participants ont fait preuve d’une écoute indéniable, d’un réel intérêt pour les expériences et propositions des uns et des autres.

Autrement dit cette première étape a été celle de l’apprentissage mutuel.

Depuis, cet espace-réseau s’est structuré autour d’un conseil international transitoire, en charge des orientations politiques et stratégiques du processus jusqu’à Dakar où se tiendra, en janvier 2011, le 2nd Forum Mondial Sciences et Démocratie une nouvelle fois en marge du Forum Social Mondial. Par ailleurs, les groupes les plus impliqués dans le processus jusqu’à maintenant à savoir le Brésil, l’Inde, le Canada et la France cherchent à diffuser l’initiative à l’échelle nationale pour que les questions « Sciences et société » ne soient plus le parent pauvre du mouvement social.

Les ponts existent entre la recherche et le mouvement social. Encore faut-il convaincre les uns et les autres de les traverser plus souvent.

C’est le moment pour moi de vous remercier tous de votre présence ici au nom de l’organisation à laquelle j’appartiens, la Fondation Sciences Citoyennes et au nom du secrétariat international du FMSD. J’en profite pour remercier chaleureusement les quelques personnes qui ont assuré la coordination de cette initiative à savoir Janine Guespin pour Espaces Marx, Christelle Baunez pour ATTAC, Cécile Cabantous pour Ars Industrialis, Marc Delepouve pour le SNESUP, Hervé Le Crosnier pour VECAM et Lionel Larqué pour Les Petits Débrouillards. Et je n’oublie pas la vingtaine d’organisations déjà impliquées ou qui ont rejoint l’aventure pour construire cette initiative et qui ont coordonné les ateliers qui vont se tenir tout au long de la journée. Merci également à Moussa Mbaye, venu de Dakar pour l’occasion. Moussa représente Enda Diapol, une organisation membre du Centre de Recherche et d’Informations pour le Développement. Il participera à la plénière de clôture pour évoquer notamment avec nous les sujets que nous devrons porter à Dakar l’année prochaine.

En conclusion, je dirai que 2010 sera une année riche pour le processus FMSD, nous aurons besoin de forces vives pour continuer à fédérer les chercheurs et les mouvements sociaux autour de notre initiative. Il nous faudra parvenir à toucher le plus grand nombre non seulement en France où des forums régionaux sont en train de se mettre en place notamment dans le Nord – Pas-de-Calais, mais aussi dans les régions du monde qui sont encore peu impliquées dans le processus, je pense en particulier au continent africain, aux Etats-Unis, à l’Europe de l’Est et à la Russie, au sud-est asiatique, à la Chine et au Japon.

Je terminerai cette rapide présentation du processus FMSD en faisant une nouvelle fois appel à Camus, il écrivait dans Le mythe de Sisyphe : « Vouloir c’est susciter les paradoxes. » Je nous souhaite à tous, collectivement, de susciter les paradoxes du monde complexe dans lequel nous évoluons pour en faire un monde socialement et écologiquement plus juste.

Je vous remercie.

Source : http://www.fmsd-france.org/?p=258&a...

4) La science a besoin de démocratie : Quelles coopérations nécessaires entre la recherche et la société ?

Bilan de la réunion du 23 janvier 2010

Le Forum mondial ’science et démocratie’(FMSD), lancé en janvier 2009à Belem à l’occasion du Forum Social Mondial (FSM) s’est donne pour tâche « la construction d’un espace de coopérations ouvertes, de débats publics, larges et démocratiques, entre scientifiques et organisations du mouvement social à l’échelle de la planète » pour pallier, « un déficit chronique de la présence des thèmes scientifiques et techniques depuis l’origine des FSM ».

Samedi 23 janvier a eu lieu à la bourse du travail à Paris une journée d’initiative française du FMSD destinée à faire connaître et ancrer en France ce processus. Plus de 200 personnes ont planché dans des ateliers en parallèle.

L’atelier ’Une nouvelle démocratie pour donner tout son sens au métier des travailleurs de la recherche’ proposé par ATTAC, Espaces Marx, Le SNCS et le SNESup, a commencé par un état des lieux : le constat est sans équivoque, quel que soit leur domaine, les travailleurs de la recherche subissent eux aussi une considérable dégradation de leurs conditions de travail qui touche au sens même de leurs métiers. Précarisation des jeunes, évaluations selon des critères de l’économie néolibérale qui conditionnent l’obtention du financement de leur activité, mise en concurrence permanente, sont autant de leviers du changement des métiers de la recherche qui contredisent leur éthique professionnelle et amènent inéluctablement à la perte de sens de ce pourquoi ils se sont engagés.

Le terme qui remplace ’recherche’ dans les textes officiels est ’recherche et innovation’, ce qui signifie que la recherche soit soumise au marché et à la course aux profits industriels et financiers. Ce qui est mis en cause, c’est l’autonomie des chercheurs, c’est à dire la possibilité pour ceux-ci de juger de la pertinence et de l’intérêt des recherches qu’ils mènent, et de choisir en conséquence, ce qui est pourtant la condition de leur efficacité et de leur créativité, au cœur même du sens de leur travail. Les pressions qui s’exercent pourraient même pousser à la fraude (pour obtenir un emploi, ou pour ne pas fâcher un financeur).

Les luttes actuelles de résistance à ces dégradations sont importantes : contre la précarisation des jeunes chercheurs parce qu’un emploi stable est une condition de l’autonomie ; pour la défense du service public de la recherche contre sa mise programmée à la disposition quasi-exclusive des grandes entreprises ; pour un financement de la recherche qui ne soit pas piloté par ces entreprises par le biais de comités opaques et non démocratiques...

Mais, sortir du dictat des entreprises et du profit, ne signifie pas pour autant revendiquer une recherche coupée de la société. Au contraire, dès maintenant, on peut aussi contribuer à redonner sens aux métiers de la recherche en mettant en place des pratiques de démocratie nouvelles, renouvelant l’autonomie de la recherche au sein d’une coopération avec la société. Les unes, qui ont été définies par un intervenant comme « démocratie coopérative », consistent à favoriser l’implication de citoyens au niveau de la recherche, par la prise en compte des savoirs dont ils sont porteurs, par l’échange d’informations sur les possibilités et les besoins, et par des coopérations. Les autres, dans le cadre de la démocratie participative, consistent à transformer les instances où se prennent les décisions de politique de la recherche, de manière à ce que scientifiques, syndicats, organisations et citoyens, puissent avoir aussi voix au chapitre, dans le respect mutuel. En France, à l’heure actuelle, les instances régionales peuvent offrir cette possibilité. Il faut savoir le revendiquer, dès maintenant, partout où cela est possible.

Janine Guespin professeur émérite à l’université de Rouen, membre du conseil d’orientation d’Espaces Marx

Source : http://www.espaces-marx.net/spip.ph...


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