Entretien avec Leila Chaibi, fondatrice de Jeudi Noir (PG, FG)

vendredi 9 mars 2012.
 

Fondatrice de Jeudi noir, Leila Chaibi est chargée de la précarité au PG et membre du conseil de campagne du Front de gauche.

Quelle est votre vision de l’engagement des jeunes  ?

Leila Chaibi. Les situations de précarité font qu’on 
a difficilement accès 
au cadre traditionnel 
du mouvement ouvrier. Les jeunes ne trouvent pas toujours 
leur compte dans un engagement traditionnel. Avec Génération Précaire, nous avons décidé d’occuper l’espace médiatique par le biais d’actions festives 
et visibles. C’est une façon de mettre 
à l’ordre du jour un problème qui n’est pas pris en compte par les politiques. Comme la crise du logement. Puisqu’il y a des immeubles vides, on les réquisitionne 
et on loge des gens pendant un an. Quand on organise un pique-nique dans un supermarché, c’est faire passer le message qu’on peut récupérer du pouvoir sur 
nos vies. C’est une autre façon de militer.

Vous avez tout de même choisi d’entrer 
en politique. Pourquoi  ?

Leila Chaibi. J’ai franchi le pas en politique parce que je me suis aperçue qu’on 
ne pouvait pas déconnecter chaque 
lutte, sur le logement, la précarité 
ou les stages, d’un projet politique 
plus large. On est dans un système 
qui considère que le droit au logement 
est moins important que le droit 
de propriété. Avec le collectif Jeudi noir, 
on avait beau rencontrer des ministres, 
rien ne changeait. Si le gouvernement 
avait une volonté de réquisitionner 
les logements vides, les choses 
ne se passeraient pas comme ça. 
Pour faire avancer nos revendications, 
je me suis dit qu’il fallait avancer sur 
deux jambes, se battre sur le front social 
et sur le front politique. Le Front de gauche porte une alternative avec des mesures concrètes. Et, depuis quelques mois, 
on a le sentiment que la politique 
reprend du sens.

La campagne électorale prend-elle suffisamment en compte les problématiques des jeunes  ?

Leila Chaibi. La jeunesse est davantage victime de précarité que les autres catégories de la population. Pour autant, 
la solution n’est pas de trouver 
des sous-dispositifs qui visent particulièrement la jeunesse. Quand 
on arrive sur le marché du travail, 
c’est plus facile d’employer un jeune 
en contrat précaire parce qu’il ne connaît pas la sécurité de l’emploi, ni le Code 
du travail. Avec les stages à 30% 
du Smic sans cotisations sociales, 
puis les CDD qui n’en finissent pas, 
c’est une sorte de bizutage social qui 
ne devrait pas exister. À mon sens, 
les contrats de génération ou emplois-jeunes ne sont pas non plus une solution. C’est prendre le problème à l’envers. 
Il faut au contraire donner le droit commun à tous. Les jeunes sont des salariés comme les autres.

Les jeunes éprouvent les plus grandes difficultés à se loger. Que propose 
le Front de gauche sur ce sujet  ?

Leila Chaibi. Effectivement, les jeunes sont plus victimes de la crise parce qu’ils vivent dans de petites surfaces, dont le prix 
au mètre carré est très élevé. La plupart 
des étudiants et des jeunes travailleurs 
se logent dans le parc privé. Le sésame 
pour avoir un logement, c’est le CDI. Mais 
il faut compter huit à dix ans pour qu’un jeune y accède. C’est un cercle vicieux qu’il faut casser. Si, d’un côté, il est essentiel de construire davantage de cités universitaires, il faut, dans un même mouvement, réguler le parc privé. Aujourd’hui, une chambre de bonne à 600 euros, c’est légal. Or, c’est inadmissible. Le Front de gauche propose d’encadrer les loyers des petites surfaces, d’appliquer des taxes sur les logements vacants et de les réquisitionner. Il faut aussi rendre accessible le parc social aux jeunes. Or, les délais restent trop longs.

Entretien réalisé par Ixchel Delaporte, L’Humanité


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