Italie : la débâcle de la droite de Berlusconi aux municipales marque la fin d’une époque

jeudi 10 mai 2012.
 

Débâcle de la droite de Silvio Berlusconi, abstentionnisme et montée en force du mouvement populiste du comique Beppe Grillo : les Italiens ont exprimé à leur façon malaise social et ras-le-bol face aux partis traditionnels lors des municipales partielles de dimanche et lundi.

"Cet effondrement représente la fin d’une époque durant laquelle la droite avait Berlusconi pour chef et réussissait d’une manière ou d’une autre à remporter les élections en imposant sa vision du monde", résume le sociologue Antimo Farro dans un entretien.

Les résultats encore provisoires du premier tour sont sans appel : le Peuple de la Liberté (PDL) du Cavaliere, en déroute, se retrouve exclu du second tour des 20 et 21 mai dans plusieurs villes, à commencer par la plus grande en jeu dans ce scrutin, Palerme, où deux candidats de gauche sont arrivés en tête.

L’ex-allié de la coalition gouvernementale de Berlusconi, le parti xénophobe de la Ligue du Nord, subit le même sort : cette formation, "la plus proche des idées de (la leader du Front National) Marine Le Pen, a subi un revers important à cause notamment des scandales de corruption" qui ont affecté plusieurs de ses dirigeants, explique le Pr Farro.

L’effondrement des deux partis, qui ont dirigé l’Italie jusqu’en novembre 2011, a profité au centre-gauche mais souvent avec des candidats non estampillés Parti démocrate (PD, principal parti de gauche).

L’autre grand bénéficiaire est le mouvement "Cinq étoiles" de Beppe Grillo, comique reconverti dans la politique depuis plusieurs années et grand pourfendeur des partis traditionnels.

En Vénétie, son candidat, un ingénieur de 32 ans, a remporté dès le premier tour la mairie de Sarego, fief de la Ligue du Nord qui y avait installé son "parlement". Excellent résultat aussi à Parme, où le candidat "Cinq étoiles" a obtenu 20% et affrontera au second tour un adversaire du PD.

"Le virus se répand !" a exulté lundi soir Beppe Grillo, un barbu à la crinière poivre et sel connu pour ses diatribes enflammées et ses déclarations à l’emporte-pièce. "Ah ah ah, on se retrouvera au parlement !" s’est pris à rêver celui que les politiques ont toujours brocardé en le traitant de "clown", "phénomène médiatique inquiétant" et d’"homme incontrôlable".

Pour Massimo Gramellini, éditorialiste du quotidien La Stampa, ces résultats doivent être interprétés comme "un non aux partis, pas à la politique : ils montrent l’exigence de réformes urgentes du système politique".

Il se veut rassurant sur "Cinq étoiles" : ses représentants "sont parfois naïfs, souvent populistes, mais ils sont vivants".

Quant au taux de participation, même s’il est en baisse de 7 points à 68%, il reste "important en dépit de l’éloignement vis-à-vis des partis", souligne Antimo Farro, qui met aussi l’accent sur "une montée du repli identitaire en raison de la crise, avec comme en France et en Grèce une opposition à la mondialisation et à l’Europe".

Le sociologue Carlo Carboni est plus inquiet : "Le vrai problème, ce sont les gens qui ne votent plus. Pour les faire revenir aux urnes, les partis doivent être réformés au plus vite", préconise-t-il dans un entretien au Corriere della Sera.

Pour lui, l’équation est simple : l’Italie "a besoin de dirigeants capables de transmettre au pays espérance et optimisme".

Un défi qui n’a pas échappé au président de la République Giorgio Napolitano : les résultats de ce scrutin sont un "motif de réflexion pour les forces politiques et les citoyens sur leur rapport avec la politique", a-t-il confié mardi matin à des journalistes.


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