Hausse des inégalités : si même Wall Street s’inquiète !

samedi 11 octobre 2014.
 

La banque Morgan Stanley vient de publier une étude étonnante. Etonnante parce que celle-ci admet enfin que l’augmentation toujours plus forte des inégalités salariales plombent le retour tant espéré de la croissance. On a hâte qu’une banque française en arrive enfin à la même conclusion...

« Y a quelque chose qui cloche là dedans, j’y retourne immédiatement ». Il y a peu de chances que les économistes qui turbinent dans les grandes banques de Wall Street fredonnent « La java des bombes atomiques » de Boris Vian. Pourtant, cette chanson exprime bien le désarroi qui semblent les gagner. Car un constat s’imposent à eux : les inégalités croissantes de revenus plombent toute chance d’un retour à la croissance. Après une étude de Standard & Poor’s, c’est au tour de Morgan Stanley de rendre public une étude concluant en ce sens, et intitulée « Inégalité et consommation ». Un mini-événement que même le temple de la pensée libérale, le Wall Street journal, n’a pas manqué de relater.

Ce genre de conclusions n’étonnera pas les économistes moins orthodoxes. Paul Krugmann, Branko Milanovic ou encore Thomas Piketty, pour ne citer qu’eux, se tuent à répéter ce que l’histoire économique enseigne depuis Keynes : si les revenus des classes populaires qui forment la majorité de la consommation ne sont pas assurés, impossible pour l’économie de connaitre de la croissance. En redécouvrant ce quasi-théorème, les économistes des grandes banques de Wall Street semblent aussi perdus qu’une poule devant un couteau.

Dans le rapport, cela se traduit donc plus pudiquement par : « une croissance plus forte des salaires est essentielle pour que les perspectives macroéconomiques (retournent au vert), car il aiderait à ce que les ménages dépensent plus largement et ce dans tous le spectre des revenus » écrivent les auteurs. Et parce leur étude s’adressent à leur chefs, les traders, pardon les « banksters », ils les prennent par les sentiments : cette option de hausse des salaires est également souhaitable dans la mesure où elle pourrait conduire la Federal Reserve, la banque centrale américaine, à relever ses taux (proches de zéro) alors qu’elle rechigne à le faire. Autrement dit, en plus d’appeler à une hausse des revenus des classes populaires, les économistes de Morgan Stanley, en appellent à plus d’inflation. Se mettant dans les pas d’une autre institution : le FMI. On rêve !

Il y a cependant loin de la coupe aux lèvres. Il existe en effet un fossé entre une prise de conscience (même si elle vient d’une banque) et une prise de décision politique... Cependant il faut noter qu’aux Etats-Unis, certaines banques commencent donc à s’interroger sur le modèle de développement par compression des salaires. Modèle qui, on le sait, est également à l’œuvre de ce coté-ci de l’Atlantique. A quand une étude semblable de la BNP-Paribas ?

Emmanuel Levy - Marianne


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