Les caisses sont vides, il n’y a plus d’argent … mais ils fraudent des milliards !

mercredi 18 février 2015.
 

« Trop d’impôts, tue l’impôt », « une fiscalité confiscatoire », « l’insupportable pression fiscale », « l’impôt, extorsion de fonds ». Une puissante campagne idéologique vise à montrer que ce sont les possédants, les très hauts revenus, voire les patrons, qui sont victimes d’un État budgétivore et « spoliateur ».

Cette ambiance anti-impôts est créée par ceux qui protestent préventivement, avant même qu’on n’augmente leurs impôts. Il s’agit souvent de gens dont les revenus sont souvent deux, cinq, voire dix fois ce qu’ils seraient si leurs revenus avaient à voir quoi que ce soit avec leur qualification, leur travail ou leur importance pour le pays...

Au moment où Pierre Gattaz appelle les patrons à des jacqueries anti-impôts, au moment où il veut supprimer l’impôt sur la fortune, il est bon de rappeler que la fraude fiscale approche les 80 milliards par an. Ce n’est pas loin de deux fois le coût annuel de la dette. C’est, ce qui est soustrait à l’Etat, donc aux citoyens, en une seule année. Comme l’a souligné France-Inter (mardi 2 septembre 2014) : « Une note de l’AGEFI, le quotidien des affaires et de la finance révèle que les premiers adeptes de la fraude fiscale sont... les dirigeants d’entreprise ! Les plus gros escrocs ne sont pas forcément des repris de justice désœuvrés qui préparent le casse suivant comme certains personnages d’Ocean’s Eleven. Non, les plus gros fraudeurs au FISC sont les chefs d’entreprise, et c’est de pire en pire depuis deux ans. C’est la commission des infractions fiscales qui le déplore dans son rapport annuel. »

Oui, la bonne santé des entreprises est indispensable pour le pays ! Oui, beaucoup de chefs d’entreprise essaient d’innover ! Non, tous les patrons ne sont pas des dissimulateurs ! Mais ceux qui truandent, plongent l’ensemble du pays, y compris les entreprises, dans la difficulté. De ceux-là, Pierre Gattaz n’a à notre connaissance jamais parlé.

Selon une enquête du journal économique belge L’Echo, la Belgique accueille près de vingt des 100 plus grosses fortunes françaises. Et les Français détiendraient ainsi au moins 17 milliards d’euros dans ce pays (le figaro.fr, 13/09/2014). Premier cité, Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France. Le patron de LVMH n’est pas installé en Belgique, mais il y a domicilié plusieurs sociétés depuis 1999. Figure aussi dans la liste l’animateur de télévision Arthur. (...) Il y a des noms très connus, comme la famille Mulliez, propriétaire d’Auchan, l’acteur Gérard Depardieu. Les différentes sociétés belges des Mulliez totaliseraient un capital d’un milliard d’euros. Les hommes d’affaires Bernard Tapie et Stéphane Courbit font aussi partie du lot. Dans la longue liste, figure encore la famille Bongrain (...). »

De plus, ce processus se démocratise. L’Echo ajoute que depuis l’arrivée de François Hollande à la présidence, des centaines de Français aisés moins connus ont franchi la frontière. La peur du rouge ??? Ou simplement parce que dès qu’on est un peu plus riche, on devient plus facilement patriote ? Il y réalité une sorte de partage entre paradis : l’argent très sale, c’est pour les paradis fiscaux des Caraïbes, l’argent moins sale (venant de la fraude fiscale par exemple), c’est pour la Suisse. La dispense d’imposition de certains grands groupes, c’est pour le Luxembourg, voire l’Irlande. Pour la Belgique, ce n’est généralement pas de l’argent sale : son attractivité réside en une fiscalité plus légère sur les entreprises et sur les successions, et surtout en l’absence d’ISF. Il suffit donc de jouer habilement : bénéficier de tous les services publics français sans y contribuer, puisqu’on met le patrimoine ailleurs !

Selon Le Monde (28/11/2014) :« Le magazine économique Bilan a publié vendredi 28 novembre son classement annuel des 300 familles et personnes les plus fortunées de Suisse. Dans ce palmarès figurent 49 Français, installés en Suisse pour bénéficier d’un régime fiscal plus favorable, qui cumulent un patrimoine de 55 milliards de francs suisses (près de 46 milliards d’euros). Trois familles françaises figurent en outre dans la catégorie la plus élevée de ce classement, à savoir celle des fortunes supérieures à 5 milliards de francs suisses (environ 4 milliards d’euros) ».

Bien sûr, il ne s’agit que des fortunes déclarées « légalement », les coffres suisses ne représentant qu’une partie du trésor. Mais au moins cela montre-t-il le degré d’accumulation qu’a permis un laxisme fiscal assumé et que s’y intéresser n’est pas dérisoire. A titre d’exemple, avec l’une de ces fortunes seulement, on pourrait lancer et financer le plan quadriennal pour l’éducation supérieur et la recherche, par exemple. C’est bien l’ordre de grandeur. Mais puisqu’on vous dit qu’il n’y a pas d’argent ...

Pour en revenir à la HSBC Suisse, d’après Le Monde du 27/01/2014, « de grands noms, avocats, hommes d’affaires, vedettes du show-biz, sont cachés dans cette liste d’évadés fiscaux potentiels, titulaires d’un compte chez la filiale suisse de la banque britannique HSBC à Genève.

Pour RTS Info (05/11/2014), « L’enquête contre la filiale suisse de HSBC progresse en France. HSBC est soupçonnée d’avoir effectué, entre 2006 et 2007, du « démarchage bancaire illicite » ainsi que du « blanchiment de fraude fiscale ». Les deux juges en charge du dossier auraient obtenu de nouveaux éléments permettant de démontrer que des employés de HSBC ont « très fréquemment » traversé la frontière franco-suisse pour permettre à leurs clients français de contourner le fisc, notamment grâce à des montages offshore. »

Le Monde (09/01/2015) assisté de 55 médias internationaux, dévoilent la face cachée du secret bancaire en Suisse. Selon les enquêteurs, explique Le Monde, près de 180,6 milliards d’euros auraient transité, à Genève, par les comptes HSBC de plus de 100.000 clients et de 20.000 sociétés offshore, « très précisément entre le 9 novembre 2006 et le 31 mars 2007″. Qui peut-on trouver sur les données récoltées ? « Des trafiquants d’armes ou de stupéfiants, des financiers d’organisations terroristes, des politiciens, des vedettes du showbiz, des icônes du sport ou des capitaines d’industrie », écrit Le Monde. Mais aussi des « diamantaires belges », « des protagonistes de l’affaire Elf » ou « de nombreuses familles juives dont les avoirs avaient été mis en lieu sûr, en Suisse, au moment de la montée du nazisme en Europe »

« HSBC Private Bank a continué d’offrir des services à des clients qui avaient été cités défavorablement par les Nations Unies, dans des documents légaux et dans les médias pour leur lien avec le trafic d’armes, les diamants de guerre ou la corruption », fustige de son côté le consortium des journalistes d’investigation.

Cette démocratisation du truandage à l’impôt en quelque sorte, cette tricherie de masse, ce travail de fourmis sont l’œuvre de gens dont la plupart s’offusquent de payer trop d’impôts... mais qui par contre ont bien su profiter de toutes les largesses de l’état et de tout ce que la nation a pu mettre à leur disposition !

H . AUDIER


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