Elections départementales... Déjouer le piège de l’abstention

samedi 7 mars 2015.
 

Dans quelques semaines, les 22 et 29 mars, chacune, chacun sera appelé (e) à choisir celles et ceux qui les représenteront à l’assemblée départementale. Aucun débat sérieux n’est organisé sur les compétences de ces nouveaux conseils qui, jusqu’à présent, jouent un rôle important dans le financement des politiques sociales, culturelles et sportives, des écoles, de l’aide à la petite enfance, aux handicapés, aux retraités ou dans des mesures incitatives à l’emploi.

Au lieu d’un tel débat, qui permettrait aux citoyens avec leurs candidats de bâtir de nouvelles priorités de proximité et ferait du conseil départemental un bouclier social et écologique contre la crise et pour le mieux-être, nous assistons à un incroyable déferlement politicien, à mille lieues des préoccupations populaires. Ce dernier s’accompagne d’une promotion éhontée de l’extrême droite, à tel point qu’on a pu se demander la semaine dernière si le Salon de l’agriculture n’était pas devenu le ... festival du Front national. Écœurant et abject !

Face à l’affaissement de la droite en crise, au rejet de la politique telle qu’elle se pratique, de puissants réseaux, liés aux milieux d’affaires, ont décidé de jouer avec le feu et de promouvoir l’extrême droite de la famille Le Pen. L’opération en cours, s’appuyant sur la lourde déception d’une large proportion de l’électorat de gauche et de l’écologie politique, vise à tétaniser une partie de nos concitoyens, les poussant à s’abstenir ou à limiter leur choix de premier tour aux seuls candidats présentés par le parti gouvernemental. Cette maléfique stratégie conduit mathématiquement à faire progresser le Front national et à s’aligner sur les choix d’austérité, de chômage, de précarité, de réduction des droits sociaux. Il faudrait donc oublier que ce sont précisément ces choix qui font le lit de la droite et de l’extrême droite pour prétendre combattre leurs candidats dans les cantons ! Les dés seraient dès lors pipés et serait fermée la porte aux changements qu’espèrent les salariés, les précaires, les privés de travail, les retraités et tant de jeunes, au grand bénéfice des possédants. Et l’ignoble stratégie européenne consistant à mépriser le vote du peuple grec en rajoute encore en poussant au refus d’aller voter, si on n’y prend garde.

Force est de constater que le vote efficace et cohérent pour battre les candidats de droite et du FN est celui en faveur de femmes et d’hommes qui, sans ambiguïté, combattent leurs choix et dénoncent les manœuvres qui les favorisent. Dans des configurations parfois différentes, ils ont pour originalité de s’être coalisés avec ceux du Front de gauche dans une démarche de rassemblement pour une plus grande utilité.

L’affaire est d’autant plus sérieuse et grave que les électrices et électeurs sont convoqués aux urnes pour élire une assemblée, alors que la loi pour « une nouvelle organisation territoriale de la République », qui doit préciser les compétences des différents échelons administratifs, ne sera votée que trois mois après le scrutin. Personne n’est en capacité de dire exactement quelles seront les compétences dévolues aux départements, dont l’existence même reste sujette à caution, puisque le premier ministre avait annoncé leur disparition, puis laisse planer le doute.

Une fois les élections passées, qu’adviendra-t-il des départements et surtout des politiques publiques dont ils ont la charge ? Personne ne répond aujourd’hui à cette question. Aller voter pour les candidats de gauche, soutenus ou en alliance avec le Front de gauche, permettra de défendre et moderniser l’échelon départemental pour la mise en œuvre de politiques publiques favorables aux citoyens et à l’environnement.

Au même moment, le gouvernement annonce un tour de vis austéritaire inédit dans le budget des collectivités territoriales avec la suppression de 11 milliards d’euros de dotations jusqu’à 2017. Comment ne pas y voir bien plus qu’une simple coïncidence ?

Un citoyen est aujourd’hui pénalisé de multiples manières : son pouvoir d’achat est abaissé, il paie en général plus d’impôt et de surcroît le gouvernement ôte des moyens financiers à la fois à sa commune, à sa communauté de communes, à son département et à sa région. Autrement dit, les services auxquels il avait droit diminuent sans cesse. Le 22 mars, l’occasion est donnée de refuser l’austérité et de réclamer de nouveaux choix de justice dans le cadre d’une nouvelle répartition des richesses.

Réforme territoriale, baisse des dotations, offensive des marchés financiers dans toute l’Europe, avec le blanc-seing de nos gouvernants, ces élections sont extrêmement liées aux choix nationaux et européens. Avec des départements exsangues, certains minés par les emprunts toxiques prescrits par les banques aux collectivités, il ne suffira pas d’aligner des promesses électorales, mais bien d’appeler chacune et chacun à la mobilisation pour la démocratie locale, contre la mainmise des marchés sur notre économie, pour une réorientation du crédit vers les services publics, la protection sociale, la petite enfance et la jeunesse à travers les collèges, l’autonomie, le handicap, la culture, autant de compétences jusqu’à présent dévolues aux départements et autant de sujets fondamentaux pour la construction d’un avenir commun.

Les 72 milliards d’euros que gère l’ensemble des départements, au service du bien commun, quoi qu’on puisse penser des politiques menées ici ou là, représentent une manne à faire saliver les marchés financiers.

C’est du reste le programme de la droite qui, tout en se chamaillant entre ses différentes factions, n’a pour projet que d’aggraver la facture présentée à nos concitoyens en insistant pour diminuer encore plus la dépense publique utile, les aides sociales et en transférant au privé des pans entiers de nos services publics.

Dans un tel contexte, pour une électrice ou un électeur de gauche déçu (e), le pire choix est bien l’abstention qui crée un rapport de forces qui lui sera forcément défavorable en donnant mécaniquement un poids à la droite et à l’extrême droite bien plus élevé que leur influence réelle.

Il reste moins d’un mois pour discuter autour de nous, pour convaincre nos amis, collègues et voisins de la nécessité de porter dans les assemblées départementales des élus mobilisés contre l’austérité, pour le développement des services publics et l’orientation du crédit vers les besoins humains, des élus prêts à mener les combats indispensables contre la toute-puissance des marchés financiers et pour renforcer la démocratie locale.

Les citoyennes et citoyens soucieux de renforcer l’égalité républicaine ont tout intérêt à se déplacer le 22 mars prochain ! Car c’est bien l’avenir de la République, de ses institutions et de ses services publics qui va dépendre du résultat sorti des urnes.

Patrick Le Hyaric, eurodéputé du Front de Gauche


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