Complément d’enquête. Kerviel : au cœur du mensonge.

samedi 23 janvier 2016.
 

Ce 18 janvier, la justice a renvoyé au 21 mars, au plus tôt, toute décision sur un éventuel nouveau procès.

Le jeudi 14 janvier 2016, France 2 publiait un numéro de « Complément d’enquête » sur l’affaire Kerviel.

Retrouvez l’émission en cliquant ici :

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Le feuilleton judiciaire de l’affaire Kerviel va-t-il une nouvelle fois rebondir ?

Jérôme Kerviel saura le 18 janvier si la révision de son procès lui est accordée. A trois reprises, le trader accusé d’avoir fait perdre presque 5 milliards à la Société générale a été condamné à cinq ans de prison, dont trois ferme. Mais un témoignage clé pourrait faire basculer le dossier : la commandante de la brigade financière a repris son enquête et découvert de nouveaux éléments. Vous entendrez ses explications dans ce « Document de Complément » à voir le 14 janvier, ainsi que d’autres témoignages troublants.

Huit ans après, la ligne de défense de Jérôme Kerviel n’a pas varié. Il refuse toujours de porter le chapeau : « Tout le monde savait », et la Société générale a fermé les yeux… sur 50 milliards d’euros de transactions frauduleuses. Mais cette fois, c’est lui qui porte plainte contre la banque. Pour « Complément d’enquête », l’ancien trader livre sa version des faits, point par point.

Une « guerre de communication »

L’enquête replace l’affaire dans le contexte des années 2000, quand les traders sont rois. Et retrace l’histoire d’une fuite en avant jusqu’au « pari de trop ». Du jour au lendemain, le petit Breton débarqué à la Société générale avec un simple DESS de finance, « mister Nobody » comme Kerviel se définit lui-même, devient l’ennemi public numéro un, celui qui a volé 5 milliards.

Son visage à la une de tous les journaux, le trader fait son mea culpa à la télévision à une heure de grande écoute. L’affaire déchaîne les passions : l’ancien communicant de Jean-Marie Messier va même travailler gratuitement pour l’accusé. Christophe Reille raconte pour « Complément d’enquête » une « guerre de communication » contre la Société générale. Et comment il a obtenu cette image, en mars 2008, d’un Kerviel sortant souriant de la prison de la Santé (par une porte dérobée) après sa détention provisoire. Une image qui va mettre en fureur la Société générale… Bataille médiatique gagnée.

Un combat judiciaire à rebondissements

Les soucis judiciaires, eux, s’amoncellent. C’est Nathalie Le Roy, commandante chevronnée de la Brigade financière, qui est chargée de l’enquête après la plainte pour fraude de la Société générale. La banque va « l’aider » à se forger sa conviction. « J’ai rédigé un rapport de synthèse à charge », reconnaît-elle aujourd’hui face au journaliste de « Complément d’enquête ».

Octobre 2010 : condamné à cinq ans de prison et à 4,9 milliards d’euros de dommages et intérêts, « une peine de mort sociale », Jérôme Kerviel est K.-O. Il décide de faire appel. Un deuxième round où il devra prouver que la banque savait, et a laissé faire. Il recourt à un nouvel avocat, David Koubbi. Cette fois, c’est Kerviel qui va porter plainte contre la banque, pour faux et usage de faux. Nathalie Le Roy va rouvrir sa propre enquête.

De nouveaux éléments troublants

L’enquêtrice et l’avocat racontent des échanges parfois vifs. Après une audition, Nathalie Le Roy croise David Koubbi, qui l’interpelle : si elle s’est trompée, va-t-elle « couvrir son erreur ou faire le job » ? Sa réponse à celui qu’elle traite dans son for intérieur de « chieur » : elle fera son travail… Et examinera les pièces inédites dénichées par l’avocat.

Parmi ces pièces, huit heures d’enregistrement de l’interrogatoire infligé à Kerviel par la Société générale une fois les pertes découvertes, le week-end des 19 et 20 janvier 2008. Selon l’avocat, plus de deux heures auraient été effacées… A l’époque, des blancs inexpliqués dans des extraits publiés par le site Mediapart avaient fait douter l’enquêtrice. La Société générale nie, et un rapport d’expertise établit que les enregistrements n’ont pas été falsifiés.

Des témoignages qui accusent la Société générale

Mais d’autres éléments accusent la banque, comme le témoignage de Sylvain P., un ingénieur de la Fimat, filiale de la Société générale. En 2007, il remarque un volume d’activité énorme générée par le compte SF581, celui d’un certain… Jérôme Kerviel. Mais celui-ci, une vraie « cash machine », dégage des résultats exceptionnels. Champagne à gogo et félicitations par mails s’ensuivent – des mails introuvables. Nathalie Le Roy interroge le responsable du courrier informatique de la Fimat : a-t-il reçu l’ordre de les supprimer ?

Il y a aussi ces très exceptionnelles « indemnités » versées aux anciens du desk Delta One, les collègues de Kerviel, tous virés. Le prix du silence ? « Complément d’enquête » a interrogé son ancien supérieur, qui a chargé l’ex-trader lors du procès : a-t-il perçu 1 million d’euros ? Enfin, le plus gros scandale de l’affaire Kerviel reste peut-être cette ristourne fiscale de 2,2 milliards d’euros accordée à la banque sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Un « coup de pouce » face à des pertes de 4,9 milliards – jamais questionnées par une enquête indépendante.


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