« Le printemps 2018 s’annonce silencieux dans les campagnes françaises », reflet d’une véritable « catastrophe écologique », alerte le Muséum d’histoire naturelle. Les études enregistrent le déclin inexorable des espèces d’oiseaux inféodés aux espaces agricoles. Les oiseaux, du fait de leur place dans la chaîne trophique, sont révélateurs des perturbations affectant les différentes composantes des écosystèmes (habitat naturels, faune du sol, insectes, etc). Leur disparition en milieu agricole traduit donc un phénomène global de perte de biodiversité. Les causes sont à chercher dans l’intensification des pratiques agricoles et surtout l’utilisation de pesticides. En conclusion, les chercheurs soulignent que « cette situation n’est pas encore irréversible » mais « qu’il devient urgent de travailler avec tous les acteurs du monde agricole pour accélérer les changements de pratiques ».

A quand une mobilisation forte pour changer de modèle agricole ?

Depuis une dizaine d’années, les gouvernements successifs enchaînent des plans visant la réduction des pesticides. Lancé en 2018 à l’issue du Grenelle de l’environnement, Ecophyto poursuivait l’objectif de réduire les pesticides de 50% en dix ans. En 2015, l’échec est patent, l’objectif est repoussé à l’horizon 2025 dans le cadre d’un plan remanié « Ecophyto II ». Plus de 70 millions d’euros sont dépensés chaque année pour des actions de recherche, d’investissement, de démonstration, d’aides aux agriculteurs, etc. Peine perdue : l’utilisation des produits phytos a augmenté de 20 % entre 2008 et 2015. Les principales organisations agricoles et l’agroindustrie ont freiné des quatre fers pour limiter l’ambition des mesures et s’assurer que les moyens financiers ciblent les actions les moins transformantes. Un « monde sans phytos » n’est pas possible, clament les partisans du système agricole conventionnel. Et d’asséner les progrès réalisés depuis plusieurs années en matière « d’optimisation » et de « raisonnement » des pratiques.

Le gouvernement devrait annoncer prochainement son plan d’actions sur les pesticides. Son nouveau plan « Ecophyto 2+ » devrait recycler les mesures existantes. Il y a fort à parier que les campagnes françaises soient de plus en plus silencieuses.

Anne Sampognaro